Pas-de-Calais
Cédric Watine : « Il n’y a pas de don naturel pour manager, ça s’apprend ! »
Interview Pas-de-Calais # Management

Cédric Watine dirigeant de Fogepack Cédric Watine : « Il n’y a pas de don naturel pour manager, ça s’apprend ! »

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Cédric Watine, dirigeant de Fogepack (35 salariés, 12 M€ de CA) dans le Pas-de-Calais, produit depuis une dizaine d’années un podcast consacré au management, qui remporte un succès grandissant. Chantre d’un management bienveillant, le dirigeant y diffuse des conseils pratiques, pour aider les chefs d’entreprise comme les cadres à mieux manager.

Cédric Watine s'appuie sur son expérience de dirigeant de Fogepack, dans le Pas-de-Calais, pour développer des contenus autour du management — Photo : Outils du Manager

Le Journal des Entreprises : Cela fait une dizaine d’années que vous avez lancé le podcast Outils du manager. Comment ce projet est-il né ?

Cédric Watine : Je suis chef d’entreprise depuis vingt ans, après une dizaine d’années dans un grand groupe international. Cela fait environ trente ans que j’ai entamé ma carrière de dirigeant et, globalement, tout se passait bien. Du point de vue du développement de l’entreprise en tout cas. Mais au bout d’un moment, j’ai constaté que j’avais du mal à faire en sorte que les gens adhèrent à la stratégie que je mettais en place. Et que souvent il y avait une grosse différence, à la fin de l’année, entre ce que je leur avais demandé de faire, et ce qu’ils avaient réellement fait. Bref, j’avais un problème de management, et un besoin de réponses qu’on ne m’avait pas fournies pendant ma formation, ni après.

C’est en cherchant à me documenter que je suis tombé sur un podcast américain, Manager’s Tools, qui existait depuis deux ou trois ans. J’ai mis en place quelques-uns de leurs conseils dans mon entreprise et, très vite, ça a très bien fonctionné. J'ai eu l'accord des créateurs de Manager’s Tools pour adapter les contenus en français. C’est comme ça que je me suis lancé.

L'émission a fonctionné tout de suite ?

C.W. : À l’époque, c’était les tout débuts du podcast, format audio qui n’était pas aussi connu et à la mode qu’aujourd’hui. Au début, j’ai fait ça dans mon coin, sans trop regarder les audiences, en parallèle de mes activités de dirigeant. Mais au bout d’un moment, ayant de plus en plus de retours par courriel et de commentaires, je me suis rendu compte que j’atteignais les 200 000 à 250 000 téléchargements par an, ce qui était déjà assez considérable.

Aujourd’hui, avec 800 000 téléchargements à l’année, Outils du Manager est le premier podcast sur le management en langue française. Ces contenus sont gratuits même si, au fil des années, j’ai complété l’offre en proposant également des interventions en entreprise et des séminaires, ainsi que des formations en ligne, qui sont payantes. J’ai aussi écrit un court livre, Le Manager Essentiel, disponible gratuitement en téléchargement, qui donne des clés pour aller un peu plus loin.

Quels sont les conseils que vous donnez aux managers au travers de ces différents supports ?

C.W. : Mon credo, c’est la pratique. Je ne cherche pas à aller trop loin dans la théorie, mais à donner aux gens des outils pratiques pour résoudre le problème qu’ils rencontrent dans leur équipe. C’est souvent la porte d’entrée du podcast d’ailleurs : les gens viennent, parce qu’ils ont un problème précis.

« Un mauvais management peut être très destructeur pour les salariés. »

J’essaye donc d’apporter des réponses très pragmatiques pour les aider. Je suis chef d’entreprise, pas consultant, donc dans la plupart des cas je parle d’expérience, en me basant sur des situations que j’ai moi-même rencontrées, ou qu’on m’a soumises lors de formations. Cette approche "bottom-up", par le terrain, a deux vertus : d’abord elle résout le problème en question, et puis elle montre au manager que des solutions existent, ce qui lui donne envie de se former davantage, et de s’améliorer. Il n’y a pas de "don naturel" pour manager, ça s’apprend !

Mais quelle est la doctrine qui sous-tend votre approche ?

C.W : Il n’y en a pas vraiment, à part la simplicité, la bienveillance et la confiance. Je crois vraiment que le plus efficace, c’est de partir de ce qu’on fait au quotidien. Un mauvais management peut être très destructeur pour les salariés et le manager doit être attentif à atteindre les résultats fixés, mais aussi à la rétention. Il ne faut pas que ses équipes se « grillent » à essayer d’atteindre leurs objectifs, il doit les préserver.

La règle principale, c’est de ne pas mettre les gens en danger. Je lis beaucoup de livres de management, de psychologie, de communication… parfois, on y voit des propos aberrants. Par exemple, dans l’un de mes derniers épisodes, j’aborde une question qui peut sembler très triviale, mais qui est en fait un problème courant, et gênant : comment dire à l’un de mes salariés qu’il sent mauvais ? En faisant mes recherches, j’ai pu tomber sur des conseils vraiment affreux, voire dangereux pour la personne ! Dans ces cas-là, je n’hésite pas à dire ce qu’il ne faut surtout pas faire. La bienveillance, c’est vraiment ce qui sous-tend ma démarche, et qui fait qu’elle fonctionne.

Quelle est la première mesure à mettre en œuvre pour améliorer son management, selon vous ?

C.W : Dans mon émission, je donne quatre outils fondamentaux à mettre en place, et sur lesquels tout le reste va venir se construire. Mais à mon sens, le pivot, c’est l’entretien en tête à tête. Dans l’idéal, il faudrait que chaque manager passe au moins une demi-heure par semaine en tête à tête avec chaque membre de son équipe. C’est là que tout le reste va se jouer : la connaissance du salarié, la qualité de la relation, la bonne transmission des objectifs… La clé, c’est la communication.

« En moyenne, les cadres consacrent rarement plus de 15 % de leur temps au management... alors que c'est ce pour quoi ils sont payés ! »

C’est un cap à passer pour beaucoup de managers, qui remplissent leur mission d’encadrement, en plus de leurs propres tâches, et ont le sentiment de ne pas avoir assez de temps. Et c’est vrai qu’en moyenne, les cadres consacrent rarement plus de 15 % de leur temps au management. Mais des solutions existent pour les aider à compartimenter leur temps, et se donner les moyens de s’investir de plus en plus dans le management – ce pour quoi, après tout, ils sont payés.

Comment voyez-vous la suite pour le podcast ?

C.W : Depuis quelque temps, Outils du Manager dispose d’une chaîne YouTube, où sont postées de très courtes vidéos qui reprennent certains conseils des podcasts, dans un format plus ramassé. Pour le moment, je sous-traite toute la partie technique, mais pour continuer à développer le podcast, il va falloir que j’embauche. C’est l’objectif de cette année.

Je compte aussi étoffer le catalogue de formations, pour continuer à monétiser mes contenus… et lancer un nouveau projet, autour du « dirigeant libéré », avec des contenus, et pourquoi pas du coaching, pour aider les dirigeants à se libérer de leur entreprise, et à prendre de la distance.

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