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bioMérieux investit 300 millions d’euros pour accélérer et réinternaliser des productions critiques
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bioMérieux investit 300 millions d’euros pour accélérer et réinternaliser des productions critiques

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Fleuron du groupe l’Institut Mérieux, spécialiste de la biologie au service de la santé, bioMérieux vient de s’offrir un beau cadeau pour ses 60 ans, un investissement de 300 millions d’euros pour accroître sa capacité de production, réorganiser ses approvisionnements et développer sa politique RSE. Son dirigeant, Alexandre Mérieux, annonce pour l’occasion qu’il va se concentrer sur la stratégie d’acquisitions.

Siège bioMérieux à Marcy-l'Etoile — Photo : www.noelbouchut.com - noel bouchut

Pour ses 60 ans, le spécialiste du diagnostic in vitro bioMérieux (13 800 salariés ; 3,6 Md€ de CA en 2022) a ouvert les portes de son site historique de Marcy-l’Étoile (Rhône), un poumon vert de 11 hectares accueillant une biodiversité sauvage ponctuée de sculptures de chevaux et de refuges LPO. Contraste saisissant à l’intérieur des bâtiments où ses 1 700 salariés, officient dans des salles blanches immaculées, à l’ambiance aseptisée.

"Ici, nous développons, concevons et fabriquons nos machines et nos tests. Nos solutions pour le secteur clinique permettent de déterminer l’origine de maladies et d’orienter le diagnostic médical", résume Alexandre Mérieux, président de bioMérieux. La filiale de l’Institut Mérieux (4,3 Md€ de CA en 2022) y assemble notamment plus de 130 millions de kits par an de sa marque phare en immunologie Vidas, dédiée à la détection de maladies infectieuses (Covid, HIV, dengue, etc.), et autres dysfonctionnements métaboliques, comme l’infarctus du myocarde ou des insuffisances rénales aiguës. La gamme s’adresse également au marché de la sécurité alimentaire en milieu industriel (détection de salmonelle, listeria, etc.). Le Sars-Covid-2 a même suscité un pic de ventes à 160 millions de ses tests en 2021 utilisés en milieu hospitalier pour l’orientation vers les soins d’urgence. "Le marché croît de 10 % par an", ajoute Emmanuel Brun, directeur de l’usine de Marcy (600 salariés en production, 150 collaborateurs en R & D).

Dans le contexte post-pandémie de Covid, marqué par la volonté des pouvoirs publics de renforcer l’outil de production de médicaments sur le territoire, l’industriel lyonnais acteur mondial du diagnostic in vitro a annoncé un plan d’investissement de 300 millions d’euros sur cinq ans pour ses sites industriels français. "Nous augmentons les capacités de tous nos sites français", déclare le dirigeant de la biotech. Avec l’objectif de disposer en permanence de 20 % de capacité excédentaire par rapport aux commandes de l’année.

Réinternaliser les matières premières stratégiques

Cette enveloppe de 300 millions d’euros lui permettra notamment d’internaliser certains approvisionnements critiques, incluant les composants plastiques des kits de détection Vidas et la production d’enzymes et autres matières premières stratégiques, jusqu’alors confiées à des sous-traitants.

En effet, depuis que la crise sanitaire a montré les vulnérabilités d’un modèle fondé sur un sourcing mondial, BioMérieux, soucieux de préserver son indépendance, a repris la main sur la fabrication de certains de ses composants. "La production de cônes, embouts et barrettes en plastique des kits de tests Vidas sera confiée à son usine de La Balme-les-Grottes (Isère), qui accueillera début 2024 une ligne d’injection plastique. Une vingtaine de postes seront créés", explique Alain Giovinazzo, directeur industriel Europe, qui ajoute que cette usine de 480 salariés pourrait accueillir à l’avenir d’autres productions.

De plus, le site de Marcy (1 700 salariés dont 429 pour le seul siège social monde installé sur le "Campus") accueillera prochainement un nouveau bâtiment d’une superficie de 1 500 m², des salles blanches pour la fabrication d’enzymes pour approvisionner en solutions de biologie moléculaire PCR sa filiale américaine BioFire, basée à Salt Lake City, acquise en 2013.

L’entreprise rhodanienne soigne sa poule aux œufs d’or. "Le spécialiste de la biologie moléculaire BioFire porte notre croissance, avec plus de 30 % d’augmentation de ses ventes de réactifs non respiratoires au premier trimestre 2023", affirme Alexandre Mérieux.

Enfin, en Isère, son site grenoblois de biologie moléculaire (290 salariés) va être agrandi pour accueillir une ligne de production de deux nouvelles gammes de tests. "Nous voulons accroître la fiabilité de nos process de production ainsi que leur agilité grâce à la digitalisation, tout en développant une politique de cybersécurité", ajoute le directeur industriel Europe.

30 millions d’euros pour la RSE

"Internaliser permet aussi de réduire les flux logistiques en travaillant en local to local, comme nous le faisons déjà aux États-Unis et en Italie", ajoute Alain Giovinazzo. Pour toutes les gammes à forte demande, l’entreprise préfère produire sur place comme l’atteste notamment le projet d’usine à Shanghai, en Chine. Et pour les inévitables transports, bioMérieux privilégie le bateau. Déjà 80 % des flux logistiques de la marque Vidas transitent sur l’eau pour en diminuer l’empreinte carbone. Mais ce n’est pas tout, 10 % des nouveaux investissements, soit 30 millions d’euros, seront consacrés à la RSE.

Le laboratoire lyonnais s’est donné pour objectif de réduire d’ici à 2030 de 50 % à 60 % ses émissions de gaz à effet de serre, notamment en privilégiant le transport par bateau, et de 30 % sa consommation d’eau. 95 % des déchets seront recyclés ou revalorisés pour produire de l’énergie. "Nous allons équiper nos parkings d’ombrières photovoltaïques pour autoconsommer 10 à 20 % de notre électricité sur tous nos sites", indique Alexandre Mérieux. L’industriel de la santé vient de signer un contrat pour acheter la production d’électricité photovoltaïque du niçois TSE Energy qui construit deux centrales solaires d’une puissance de 21,3 MWc (soit une vingtaine de millions d’euros investis par TSE).

Tests automatisés toujours plus rapides

Par ailleurs, en 2022, bioMérieux a investi 12,4 % de son chiffre d’affaires en R & D (1 500 scientifiques, 30 brevets déposés). "Le nerf de la guerre est d’arriver à produire des tests automatisés délivrant leurs résultats dans des délais de plus en plus courts", estime Alexandre Mérieux. Pour l’heure, la lutte contre l’antibiorésistance concentre plus de 75 % des investissements. La firme basée à Marcy-l’Étoile a notamment acquis l’année dernière la société américaine Specific Diagnostics qui conçoit un test de sensibilité aux antibiotiques. "La surconsommation d’antibiotiques crée de l’antibiorésistance", poursuit-il, d’où l’idée d’apporter des outils pour mieux cibler les molécules en fonction des infections.

Croissance externe en vue

En juin 2022, jusqu’alors unique actionnaire de l’Institut, la famille Mérieux a ouvert le capital à Exor, le holding familial de la famille italienne Agnelli, qui a des participations au sein de Stellantis, Ferrari, Iveco, Christian Louboutin ou encore de La Juventus de Turin. À Lyon, cela s’est traduit par une augmentation de capital estimée à 833 millions d’euros et une prise de participation de 10 % du capital de l’Institut Mérieux.

Ces ressources supplémentaires vont notamment permettre à bioMérieux d’accélérer dans le secteur de la santé, en saisissant des opportunités d’acquisitions. Un domaine stratégique sur lequel va se concentrer Alexandre Mérieux, déchargé d’une partie de ses fonctions grâce aux nouvelles fonctions accordées à Pierre Boulud. Depuis le 1er juillet 2023, Alexandre Mérieux est président exécutif et Pierre Boulud, membre du comité exécutif depuis 7 ans et ancien directeur général délégué, a pris la fonction de directeur général.

Depuis 1987, date du rachat du leader mondial de l’analyse bactériologique automatisée Videk à Saint-Louis, bioMérieux a racheté six sociétés, dont les américains Vitek (analyse bactériologique automatisée) et Specific Diagnostics (test de sensibilité aux antibiotiques) ou encore le néerlandais Organon Teknika (dépistage du VIH). Parmi elles, la pépite américaine BioFire acquise en 2013, dont le savoir-faire lui a permis de se positionner sur les tests Covid. D’autres devraient les rejoindre peut-être dans "la data, un secteur clé" pour Alexandre Mérieux, représentant de la troisième génération de la dynastie familiale.

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