Dordogne
Avec Canopée, le groupe Bernier se rêve en leader du cercueil
Dordogne # Industrie # Fusion-acquisition

Avec Canopée, le groupe Bernier se rêve en leader du cercueil

S'abonner

Le fabricant périgourdin de cercueils Bernier s’est uni, en fin d’année dernière, au groupe familial Les Artisans du funéraire. Rebaptisée Canopée, la nouvelle entité a pour ambition de devenir le leader français du secteur. En parallèle, il augmente la cadence de ses investissements pour rester compétitif dans un marché qui se financiarise.

Olivier Bernier devant la future ligne automatisée d’assemblage et de ponçage des cercueils — Photo : Romain Béteille

Olivier Bernier, directeur général et fils du fondateur du groupe éponyme, a encore du mal à l’intégrer. Et pourtant, en décembre dernier, ce fabricant de cercueils aux 35 millions d’euros de chiffre d’affaires (pour 150 salariés) a bien racheté le groupe familial ariégeois Les Artisans du Funéraire (250 personnes, 55 M€ de CA). Pour l’occasion, les trois enfants Bernier et l’Ariégeois Bruno Barbe, 68 ans, ont pris la tête d’un nouveau groupe : Canopée. Il réunit neuf sociétés dont quatre issues de rachats effectués entre 2018 et 2021 par le groupe périgourdin : l’expert logistique parisien FAMA, les ébénisteries ligérienne La Qualité B et béarnaise Soulérot, et le grossiste deux-sévrien Laurentin.

Un mariage, 180 000 enterrements

Fabricants de 180 000 cercueils (pour 270 000 commercialisés) en 2022, dont 90 000 au sein du vaisseau amiral de Bernier, un immense site industriel de 26 000 m2 à Saint-Jory-las-Bloux (Dordogne), les deux groupes sont réunis pour monter "l’offre de produits et services la plus large du marché". Exclusivement nationale, la part de marché de Bernier, actionnaire majoritaire de Canopée à 60 %, passe ainsi de 19 à 43 %.

"Nous entretenions de bons rapports, mais nous étions concurrents. Bruno Barbe a toujours été anti-financiers et anti fonds d’investissement. Il a donc fait un pas vers un concurrent potentiellement à risque, plutôt que vers des fonds de pensions très demandeurs, le secteur du funéraire se financiarisant beaucoup", raconte Olivier Bernier.

L’usine phare du groupe Bernier, située en Dordogne, s’étale sur 100 000 mètres carrés dont 26 000 de bâti — Photo : Romain Béteille

Les deux groupes sont non seulement similaires dans leur structure mais aussi complémentaires. "Nous avons des ateliers très modernes grâce à des investissements récurrents sur la partie industrielle et la distribution (une dizaine de dépôts en France), pour rester compétitifs par rapport aux produits étrangers. Les Ateliers du Funéraires, dont la principale usine est au pied des montagnes ariégeoises, avaient moins de place que nous pour s’agrandir, ils ont dû composer avec ça et ont tout misé sur la logistique, l’organisation. Ils avaient dix commerciaux, nous aucun", résume le fils du cofondateur du groupe Bernier.

Saut technologique

Investissant en moyenne un million d’euros par an pour moderniser son outil industriel, le groupe périgourdin mise de plus en plus sur l’automatisation pour réduire la pénibilité de ses salariés. Sous sa nouvelle identité, il revoit déjà ses plans à la hausse. "Canopée va investir 20 millions d’euros sous trois ans pour augmenter la production et atteindre 230 000 cercueils par an", résume le chef d’entreprise.

90 000 cercueils sortent de l’usine de Saint-Jory-las-Bloux chaque année, soit entre 350 et 400 par jour — Photo : Romain Béteille

Le dernier investissement en date, que Bernier espère mettre en route d’ici à fin 2023, est une modernisation de l’assemblage et du ponçage des cercueils, "tâches auparavant très manuelles et répétitives, sur lesquelles nous avions du mal à fidéliser nos salariés sur la durée. Ceux-ci vont non seulement gagner en confort de travail mais aussi pouvoir fabriquer environ 10 000 cercueils supplémentaires, le tout sans réduire l’effectif de cette partie de la chaîne. Ce sont désormais des robots qui vont poser les couvercles sur les cercueils et les poncer". Coût de l’opération : 3 millions d’euros, en partie financés par une subvention d’aide à l’investissement du conseil régional (274 339 euros).

Vers une nouvelle usine

D’autres projets sont déjà dans les tuyaux. Parmi eux, une toute nouvelle usine à Dompierre-sur-Besbre (Auvergne-Rhône-Alpes) pour Carrier Fège Renaud, société du groupe Artisans du Funéraire spécialisée dans la fabrication de capitons, des textiles de rembourrage pour cercueils. "Jusqu’à présent, Bernier commercialisait des capitons achetés en Italie. Nous allons tout rapatrier en France, dans une nouvelle usine d’environ 3 000 m2, deux fois plus grande que l’ancienne", révèle Olivier Bernier. Trois à quatre millions d’euros supplémentaires seront nécessaires pour passer de 160 000 à 250 000 capitons fabriqués sur place. La livraison du nouveau bâtiment n’est pas espérée avant fin 2024.

Au minimum, une quinzaine d’étapes industrielles sont nécessaires à la fabrication d’un cercueil chez Bernier — Photo : Romain Béteille

Canopée travaille aussi à la mutualisation de ses commerciaux et plateformes régionales pour proposer l’ensemble de sa gamme partout. Elle réfléchit enfin à relocaliser la fourniture de panneaux en pin, principale essence dans la fabrication de cercueils après le chêne, auparavant achetés à l’export. Réunissant désormais 400 personnes, le nouveau groupe ne manque donc pas de chantiers pour répondre à une demande "en croissance constante" : si la France a dénombré 673 637 décès en 2022, elle devrait en compter 800 000 en 2045 selon les projections démographiques. De quoi largement voir venir.

Dordogne # Industrie # Fusion-acquisition # PME