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Olivier Bugette (La Boîte Immo) : « Le télétravail est totalement déshumanisant »
Interview Var # Informatique

Olivier Bugette (La Boîte Immo) : « Le télétravail est totalement déshumanisant »

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Au mois de juin 2020, les salariés de La Boîte Immo, spécialisée dans la digitalisation du secteur immobilier, ont aménagé dans un nouveau siège social flambant neuf. L’annonce d’une deuxième phase de confinement, assortie d’une obligation de télétravail, est mal vécue par son dirigeant Olivier Bugette et 20 % de ses salariés ont accepté de travailler à distance.

Olivier Bugette, président fondateur de La Boîte Immo. — Photo : Hélène Lascols - Le Journal des entreprises

Le Journal des entreprises : Comment vivez-vous les nouvelles mesures sanitaires, imposant notamment le télétravail lorsque cela est possible ?

Olivier Bugette : Je le vis très mal parce que ce sont des hauts fonctionnaires qui nous expliquent aujourd’hui que toutes les entreprises de France devraient passer en télétravail… Or, si cette solution était aussi facile, cela ferait bien longtemps que les entrepreneurs de tout le pays auraient arrêté de payer des charges importantes pour accueillir leurs salariés et je n’aurais sans doute pas fait le choix d’investir 5,5 millions d’euros dans un nouveau siège social pour mon entreprise, La Boîte Immo, spécialisée dans la conception de sites et logiciels immobiliers. Mais pour moi, cet investissement, tout comme le fait de partager un bureau, ont du sens.

Dans les faits, le télétravail fonctionne, le premier confinement nous l’a montré, mais le gouvernement confond le télétravail en mode survie et le télétravail comme une routine.

Selon vous, le télétravail entraverait-il le bon fonctionnement d’une entreprise ?

Olivier Bugette : Cette situation est difficile pour nous dirigeants d’entreprise. Je n’ai aucune envie de manager des personnes, présentes à 150 adresses postales différentes ! Créer une ambiance de travail à distance, je ne sais pas faire.

Avec le recul, je crois ne plus être le seul à penser que le télétravail n’est pas la panacée. J’en veux pour preuve ce qu’il se passe aujourd’hui : il n’est pas appliqué à si grande échelle qu’en mars dernier, personne n’a réellement souhaité s’y remettre.

Le télétravail, cinq jours sur cinq, a montré ses limites : il ne permet pas de réunir facilement des compétences différentes, comme nous avons l’habitude de le faire, il ne favorise pas l’émulation, il ne permet pas les échanges, si précieux, que l’on peut avoir en se croisant tous les jours. Et puis, en tant que patron, je ne peux pas savoir ce que font mes salariés chez eux. Ce n’est pas une question de confiance, mais, moi le premier, j’ai du mal à travailler de chez moi. Je considère qu’il y a un temps pour tout et un lieu pour tout.

« En télétravail, il y a un délitement de l’esprit d’entreprise. »

En télétravail, il y a un délitement de l’esprit d’entreprise, des salariés perdent le fil. C’est inévitable.

Le télétravail va à l’encontre des valeurs, qui font La Boîte Immo depuis plus de 10 ans : être un groupe d’êtres humains, qui se retrouvent tous les jours, échangent, travaillent ensemble. Le travail s’inscrit dans la continuité de notre vie sociale, quand le télétravail est totalement déshumanisant.

Comment le travail s’organise-t-il au sein de votre entreprise depuis le 30 octobre ?

Olivier Bugette : À l’annonce de cette deuxième phase de confinement, j’ai interrogé mes équipes pour leur proposer le télétravail sur la base du volontariat. Seuls 20 % (sur les 100 salariés présents au siège) d’entre eux ont adopté cette solution. Plus de 80 ont ainsi choisi de continuer de venir sur leur lieu de travail. Nous avons des bureaux agréables, il y a une bonne ambiance, de beaux outils de travail… Mes salariés n’ont pas voulu retourner travailler de chez eux, entre la table de cuisine et la salle de bains.

Par chance, nous avons récemment emménagé dans un nouveau siège social de 2 000 m², d’une capacité de 200 postes de travail, capable d’absorber notre croissance sur plusieurs mois. Aujourd’hui, 90 postes sont réellement occupés et les distances peuvent être respectées. La tolérance zéro s’applique sur le port du masque, nous avons rajouté des protocoles très contraignants, il y a du gel hydroalcoolique sur toutes les tables. À la sortie du premier confinement, nous avons investi, comme tous les autres dirigeants d’entreprise ou responsables de commerces, dans un équipement, digne d’un hôpital de campagne… Ce n’est pas pour fermer boutique quelques semaines plus tard.

Après la première phase de confinement, j’avais eu du mal à faire revenir certains salariés. En revanche, je n’ai eu aucun mal à les faire rester il y a quelques jours.

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