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Rentrée combattive pour la CCI et le Medef Hauts-de-France
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Rentrée combattive pour la CCI et le Medef Hauts-de-France

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Philippe Hourdain, président de la CCI de région Hauts-de-France, et Frédéric Motte, président du Medef des Hauts-de-France, ont profité de leur traditionnelle conférence de presse de rentrée pour passer en revue différents points d'inquiétude pour l'économie régionale.

— Photo : Jeanne Magnien - Le journal des Entreprises

Malgré des créations d'entreprises et d'emplois en hausse, et des défaillances en baisse dans la région, signes d'une conjoncture porteuse dans la région, la CCI et le Medef ont appelé à la vigilance sur plusieurs points, en cette rentrée 2018.

« En politique générale, le premier point d'inquiétude, c'est le prélèvement à la source », attaque Frédéric Motte, le président du Medef des Hauts-de-France. « C'est une mauvaise idée pour la consommation des ménages, et cela s'accompagne d'incertitudes techniques mauvaises pour les entreprises, qui se retrouvent à devoir investir pour faire face à une véritable usine à gaz. » « Aujourd'hui, ajoute pour sa part Philippe Hourdain, président de la CCI de région Hauts-de-France, les entreprises ont une bonne capacité d'investissement, mais elles n'ont pas la visibilité pour le faire. Les incertitudes permanentes limitent la capacité des entreprises à se développer, c'est un vrai souci qui a un effet négatif sur le moral des chefs d'entreprise. »

Colère sur les ports

Les remous causés, cet été, par la proposition de la Commission européenne de redéfinir le tracé des voies commerciales maritimes entre l'Irlande et l'Europe continentale après le Brexit, en ignorant superbement les côtes françaises, ne se sont pas apaisés. Au contraire, la rentrée devrait voir tous les acteurs régionaux remonter au front.

« Le mépris de l'Europe, cet été, envers les ports français est inacceptable. »

« Nous avons une vraie volonté de faire de la région un hub logistique européen, et nous avons tous les atouts pour le faire. Le canal Seine-Nord on y croit, il est désormais inévitable et on y arrivera. En revanche, il est impossible pour nous d'ignorer que nos ports en côtoient d'autres, beaucoup plus puissants, et qui sont eux aussi en train de se regrouper. Pour autant, le mépris dont a fait preuve la Communauté européenne cet été envers les ports français est inacceptable », s'étrangle Philippe Hourdain.

« Comment construire une relation forte avec les ports du Benelux, si l'Europe elle-même nous place dans une situation de faiblesse telle, qu'on nous oublie sur les routes maritimes ? C'est une mesure d'une stupidité et d'un mépris insignes, contre laquelle nous mettons en place une stratégie commune, puisque tout le monde se rend bien compte de l'impact qu'une telle mesure pourrait avoir pour l'ensemble du territoire, qui constitue l'hinterland de nos ports. »

La mobilité engluée ?

Philippe Hourdain et Frédéric Motte sont également revenus sur le coup d'arrêt donné au projet de tram entre Lille et Lesquin, en juin. Faute de consensus entre les élus, la délibération qui devait donner le coup d'envoi de l'appel d’offres pour le projet a été retirée de l'ordre du jour du conseil métropolitain, et repoussée sine die. Des atermoiements incompréhensibles pour les représentants de la CCI et du Medef.

« Tout le monde a compris les effets de la thrombose routière qui mine la région, et Lille en particulier », martèlent d'une seule voix Philippe Hourdain et Frédéric Motte. « Mais on attend toujours les mesures d'envergure. La confusion autour du tramway est une vraie déception. S'il s'agit d'attendre les résultats des municipales de 2020, ce n'est pas tenable, il y a urgence ! Faut-il le rappeler, le versement transport des entreprises au sein de la Métropole européenne de Lille (Mel), c'est 2 %, soit 230 M€ par an, et rien n'avance. On en veut pour notre argent ! »

L'urgence de la formation

Autre sujet pressant pour les entreprises du territoire, les problèmes de recrutement. « Cela devient un frein au développement des entreprises », soupire Philippe Hourdain. « Tous les jours dans l'industrie, on voit des marchés qui partent ailleurs, parce que les entreprises n'ont pas les techniciens qu'il faut, c'est catastrophique. Je l'ai déjà dit, j'attends vraiment un électrochoc à propos de l'apprentissage. Il faut convaincre les jeunes que c'est un moyen d'ascension sociale. »

« Tous les jours dans l'industrie, des marchés partent ailleurs, parce que les entreprises n'ont pas les techniciens qu'il faut. »

« Les patrons doivent mieux vendre leurs métiers, et ouvrir leurs usines », renchérit Frédéric Motte. « 9 % des jeunes au chômage, aujourd'hui, c'est incompréhensible ! Il y a un vrai changement de logiciel à faire, et nous y travaillons. Il faut développer les relations entre l'école et l'entreprise, et tout mettre en œuvre pour anticiper les réformes annoncées sur l'assurance chômage et la formation, pour être en ordre de marche à la rentrée 2019. Et ça vaut aussi pour les patrons, qui pourront se former à l'Institut du dirigeant, qui a pris un peu de retard, mais ouvrira en janvier 2019. »

La CCI dans la tourmente

Enfin, Philippe Hourdain a évoqué la période difficile qui s'ouvre pour les CCI dans la région. Elles ont vu, en quelques années, leurs dotations baisser de plus de 80 %. Une baisse qui devrait se traduire cette année par « au moins un plan social » au sein des CCI, regrette le président, qui évoque néanmoins « des pistes » pour assurer l'entrée des chambres de commerce et d'industrie dans un nouveau modèle. « Il faut se remettre en question, mais il est certain que je vais me battre pour les collaborateurs, et que mon souci principal, c'est le mal-être qu'ils expriment. Ils ne sont pour rien dans cette situation, c'est seulement la triste vérité des chiffres », se désole Philippe Hourdain, qui vient de vendre son entreprise pour consacrer davantage de temps à ses différents mandats.

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