Philippe Hourdain: "Sur l'apprentissage, j'espère un électrochoc"
Interview # Politique économique

Philippe Hourdain le président de la CCI de région "Sur l'apprentissage, j'espère un électrochoc"

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Président de la CCI de Région, ancien président de la CCI Grand Lille, Philippe Hourdain est le dirigeant de l’imprimerie Adlis-HPC (Templemars). Il revient pour le Journal des Entreprises sur le projet de vingt mesures proposées par le gouvernement pour réformer l’apprentissage.

Le président de la CCI Hauts-de-France revient sur la série de vingt mesures proposées par le gouvernement pour réformer l'apprentissage, et le rendre plus attractif pour les jeunes et les entreprises — Photo : CCI Hauts-de-France

Le Journal des Entreprises : Le gouvernement a présenté une série de mesures pour réformer l’apprentissage. D’après vous, il y a urgence ?

Philippe Hourdain: En France, l’apprentissage n’a pas le succès qu’il mérite. C’est pourtant un principe formidable et une solution toute trouvée aux problèmes qui se posent dans beaucoup d’entreprises. À la CCI, on est bien placés pour savoir que les besoins de recrutements des entreprises de la région sont énormes, et qu’il y a un vrai manque de gens compétents et formés à des métiers très spécifiques. L’apprentissage peut être une réponse à ces besoins. Pourtant, il y a encore des freins, des deux côtés, qui peinent à être levés : Xavier Bertrand a rappelé récemment que, malgré les efforts déployés par la Région, l’apprentissage n’avait augmenté que de 10% dans les Hauts-de-France. C’est mieux qu’ailleurs, mais c’est loin d’être encore assez. Sur ces questions, le gouvernement semble vouloir donner plus de responsabilités aux branches professionnelles ; pour moi c’est une bonne idée, mais la Région ne doit pas perdre toute compétence sur l’apprentissage. Et il faut vraiment que tous les acteurs concernés se mettent autour de la table et travaillent ensemble, les entreprises, les collectivités, et l’Éducation Nationale.

Le JDE : Comment convaincre davantage de jeunes de tenter l’apprentissage ?

P. H. : Cela doit passer par une communication très forte, auprès des jeunes et de leurs familles. Il faut lutter contre certains a priori qui existent encore sur l’apprentissage, notamment dans l’industrie. On a laissé se dévaloriser les emplois industriels, en laissant penser que les usines sont des endroits sales, plein de poussières et de fumée… il est temps de montrer que c’est fini tout ça, et que l’usine du futur est déjà là ! Je suis confiant, je sais qu’on va y arriver, l’acculturation est en cours. De plus en plus, on voit de jeunes qui font des brillantes carrières, qui sont devenus ingénieurs, en commençant par l’apprentissage… des parcours comme ça, aujourd’hui tout le monde en a dans son entourage. Les mentalités vont changer rapidement, il faut s’y préparer.

Le JDE : Les réticences ne sont pas que du côté des jeunes ou des familles, tous les chefs d’entreprise ne sont pas très enthousiastes non plus…

P.H. : Il faut que du côté des entreprises, les mentalités changent aussi ! Pour le moment, chez les dirigeants, c’est la crainte des contraintes qui peut être un frein. Certains redoutent que prendre un apprenti amène plus de complications que de bénéfices, en rendant compliqué l’organisation en équipes, par exemple. Ce qui a été annoncé, qui va dans le sens de l’assouplissement des règles sur le temps de travail des mineurs, ou sur la temporalité de l’embauche et la rupture de contrat, c’est le pragmatisme qui manquait. Jusqu’à présent, quand ça se passait mal, puisque comme n’importe quel recrutement, celui d’un apprenti peut être loupé, c’était très difficile de rompre le contrat. Demain, ça sera plus facile, pour l’entreprise comme pour l’apprenti qui voudrait partir. Cette souplesse va avoir un effet important, et va lever les derniers freins… j’espère vraiment un électrochoc !

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