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Les microbrasseries lorraines au coeur de la guerre de la bière
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Les microbrasseries lorraines au coeur de la guerre de la bière

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Largement dominé par Kronenbourg et Heineken, le marché de la bière est en nette progression avec cinq microbrasseries qui ouvrent chaque semaine en France. Pourtant, alors que les consommateurs réclament des produits locaux, les "contrats brasseurs" bloquent l'accès des microbrasseries aux distributeurs.

Caroline Ernst et Jean-Marc Lichtlé ont fondé la brasserie artisanale La Grenouille Assoiffée en 2013 en Moselle — Photo : © Jonathan Nenich

Depuis quelques années, elles fleurissent partout en Lorraine. Avec 85 sites de production et environ 250 emplois qui en découlent, les microbrasseries répondent aux consommateurs avides de produits locaux, artisanaux, traçables et répondent à la demande. En grande distribution, dans les boutiques de terroir, sur les marchés, il est possible d’acheter une bière lorraine. Mais pour ces microbrasseries, qui misent aussi sur l’export dans de faibles proportions, l’accès aux cafés, hôtels et restaurants reste un problème majeur.

Les « contrats brasseurs » vus comme déloyaux

Si les grands industriels comme Heineken ou Carlsberg (Kronenbourg), qui produisent 92 % des volumes (23,5 millions d’hectolitres), ne sont globalement pas vus comme un problème pour les microbrasseries, le recours aux « contrats brasseurs » pose question. Regroupés au sein du Syndicat national des brasseurs indépendants (SNBI), qui compte 440 membres, certains brasseurs luttent contre ces contrats qui engagent le distributeur et sont vus comme une entrave à la concurrence. Environ 80 % des distributeurs passent par ces contrats, dont la durée est souvent de cinq ans.

« Nous considérons ces contrats comme un abus de pouvoir. »

« L’approche pour les distributeurs est séduisante mais ces contrats bloquent le marché. Les industriels peuvent prêter du matériel coûteux, voire permettre des prêts financiers. En échange, le distributeur doit s’engager sur l’achat d’un certain nombre d’hectolitres en guise de remboursement », expose Rémi Schlienger, président de la brasserie La Fabrique des Gros, à Maxéville (Meurthe-et-Moselle). « Nous ne sommes pas contre les industriels, mais nous considérons ces contrats comme un abus de pouvoir. Nous comptons mener des actions pour nous faire entendre », poursuit Jean-François Drouin, président du SNBI et de la brasserie Les brasseurs de Lorraine, à Pont-à-Mousson, sans en dévoiler plus.

Le marché des cafés, hôtels et restaurants reste le plus lucratif, la marge sur les fûts étant plus importante que sur la vente de bouteilles. « C’est pour cela que les industriels veulent le contrôler. Avec les fûts, il n’y a pas la problématique de l’emballage, qui peut représenter jusqu'à 70 % du prix de la bière », poursuit le président.

« Une autre image »

Les gérants de la microbrasserie La Grenouille Assoiffée, à Vahl-lès Bénestroff (Moselle) voient, eux, les industriels comme une opportunité. « Via les formations qu'ils dispensent, ils permettent d’apprendre le métier, de le cadrer aussi. Ils encouragent notre développement, car nous apportons une autre image de la bière : un produit de dégustation, écologique, qui favorise les circuits courts », lance Caroline Ernst, cofondatrice.

L’Insee décompte plus de 1 600 brasseries en France. Elles n’étaient que 1 100 en 2017. « Cinq brasseries par semaine sont créées en France et seulement 25 % meurent au bout de cinq ans. La croissance vient des brasseurs indépendants. Ils apportent une bière de qualité, où les ingrédients et la provenance sont indiqués. Cela dynamise le marché. Les maladies, comme la vache folle ou la grippe aviaire, ont amené les gens à consommer moins mais plus qualitativement », ponctue Jean-François Drouin.

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