Les défaillances d'entreprise signent leur retour en force au premier trimestre 2022
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Les défaillances d'entreprise signent leur retour en force au premier trimestre 2022

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Cette fois, la tendance est en train de s’inverser. Après deux années passées à leur plus bas niveau, les défaillances d’entreprise se sont sérieusement redressées début 2022, selon le cabinet Altares. Une accélération des procédures collectives qui tient plus de la "normalisation" de l’économie que d’un emballement des faillites. Même si la vigilance reste de mise, notamment pour les PME.

Dans le secteur de la restauration, les procédures collectives ont enregistré l’une des hausses les plus spectaculaires de ce début d’année (+111 % par rapport à 2021, selon Altares). Mais elles se situaient aussi à un niveau "exceptionnellement bas" il y a douze mois — Photo : PlanetEarthPictures

Les défaillances d’entreprise font leur grand retour en 2022. Mais pas de panique dans l’immédiat : tout est relativement normal. C’est en quelque sorte le message d’Altares, dans son dernier bilan trimestriel de la sinistralité.

Une explosion des procédures collectives à relativiser

Au premier abord, les chiffres ont pourtant de quoi donner quelques sueurs froides : entre janvier et mars, le cabinet d’études a compté 9 972 procédures collectives, en hausse pour la deuxième fois consécutive (+34,6 % sur un an). Elles sont même tout proches de leur niveau de 2020 (-8,5 %), "avant que la Covid ne vienne bloquer l’économie". Sauf qu’à l’époque, l’épidémie avait déjà freiné le rythme des défaillances. Aussi la comparaison avec 2019 paraît-elle plus pertinente. Et s’avère des plus rassurantes, puisque les dossiers restent nettement moins nombreux en 2022 (-29,5 %).

« Il n’y a pas de déferlante de faillites, plutôt un dur retour à la réalité pour les entreprises. »

En réalité, tous les chiffres d’Altares subissent le même effet d’optique. Ainsi, les redressements judiciaires explosent sur un an (+46,6 %), tout comme les liquidations (+31,7 %). Et pourtant, l’un et l’autre restent très loin de leur niveau d’avant-crise (respectivement -46,1 % et -23,1 % comparés à début 2019). Idem pour les emplois menacés (30 260 au total, cette année) : ils s’accroissent en un an (+320), alors qu’il y en a encore quasiment 15 000 de moins qu’en 2019. Le cabinet en conclut qu’il n’y a "pas de déferlante, mais plutôt un dur retour à la réalité" : les restrictions sanitaires allégées et les aides publiques débranchées, les entreprises doivent désormais, et de plus en plus, ne compter que sur elles-mêmes. Comme avant, ou presque.

La guerre en Ukraine, nouvelle source de tensions

Longtemps redoutée, puis annoncée pour l’an dernier, la menace d’un tsunami de faillites semble donc bel et bien s’être fracassée sur la digue du "quoi qu’il en coûte" : "Plus de 46 000 entreprises ont été sauvées de la défaillance durant la longue période Covid", avance même le directeur des études d’Altares Thierry Millon.

Pas question pour autant de prendre à la légère la remontée en cours des procédures collectives. D’abord parce que le mouvement prend de l’ampleur au fil des mois, depuis qu’il s’est enclenché en novembre. Ensuite parce que le climat a changé avec l’assaut de la Russie sur l’Ukraine. "L’horizon s’assombrit" avec la guerre et ses corollaires (sur l’inflation, les approvisionnements, l’énergie, etc.), prévient l’étude. "Les turbulences de ce début d’année pourraient changer la donne", notamment en matière de délais de paiement. Mais, là encore, malgré ces "signaux qui incitent à la prudence", le cabinet se veut rassurant : "Les entreprises [disposent] encore de liquidités", selon lui, et le plan de résilience du gouvernement devrait jouer son rôle d’amortisseur pour les plus exposées à la crise russo-ukrainienne.

Les petites PME et les services aux particuliers fragilisés

Ce discours optimiste n’empêche pas Altares de s’inquiéter pour certains pans de l’économie française. À commencer par les PME de petite taille (10 à 49 salariés), "où les défaillances s’envolent de 56 % sur an" et dépassent leur niveau d’il y a deux ans. Il s’agit, pour l’essentiel, d’entreprises de la construction, du commerce et de l’industrie.

Côté secteurs justement, les activités B to C apparaissent comme les plus fragiles dans cette période de transition : les procédures collectives dans les services à la personne (coiffure-beauté), le commerce (automobile notamment) et la restauration (+111 % en un an) sont ainsi déjà revenues au-dessus de leur volume de 2020. À l’inverse, dans les services aux entreprises, les dossiers continuent de refluer pour les activités de nettoyage (-3 %) et de sécurité (-2 %).

Le retour en force des défaillances n’épargne, en revanche, aucune région de France métropolitaine, en dehors de la Corse (-2 %). Les voyants sont même au rouge vif dans les Hauts-de-France (+72 %, et même +92 % pour le département du Nord) et ce, pour le deuxième trimestre consécutif, ainsi qu’en Bourgogne-Franche-Comté (+66 %). Trois territoires limitent néanmoins la casse, avec une hausse inférieure à la moyenne nationale : l’Île-de-France (+16 %), le Centre-Val de Loire (+20 %) et la Bretagne (+27 %).

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