« Nous recevons quatre à cinq appels par jour, mais pour l’heure, je souhaite garder la main sur mes deux sociétés » affirme de suite Bastien Lucas, jeune entrepreneur de la région brestoise qui souhaite calmer les ardeurs des investisseurs. Par prudence mais aussi par envie de continuer à entreprendre. À peine sorti de son école de commerce en 2011, il a fondé EcoAction+, la première entreprise de collecte de déchets de bureau sur la région brestoise (plastiques, papiers, piles, déchets électroniques, 430.000€ de CA) aujourd'hui concurrencée par deux autres acteurs sur le secteur.
Un marché de niche qui grandit
« Nous comptons aujourd'hui sept salariés à Bourg-Blanc et deux sur notre site rennais, créé fin 2015. Nous recherchons d'ailleurs actuellement un commercial. Une concession existe également près de Toulouse. Nous sommes encore une TPE mais avec une croissance de 25% par an du chiffre d’affaires ». Une perspective de développement assurée notamment par une réglementation venue valider ce qu'il avait su pressentir : depuis le 10 mars 2016, un décret a fixé le tri des déchets recyclables en entreprise.
200.000€ investis pour recycler les mégots
Bastien Lucas vient de lancer en mars dernier sa seconde société, MéGo!, intégralement tournée vers le recyclage des mégots de cigarette et installée en face d'EcoAction+, dans la ZAC de Breignou-Coz à Bourg-Blanc. L’idée pourrait paraître fumeuse si l’on ne comptait pas dans le monde quelque 8 millions de mégots jetés à chaque minute, dont 70% sur la voie publique. Un défi écologique et financier, car les mégots jetés au sol se diluent rapidement dans l’eau, relâchant les métaux lourds et autres substances nocives qu’ils contiennent. Augmentant par là même le coût du traitement des eaux usées. « Avec des partenaires européens, nous avons développé et déposé un brevet sur la première unité en France, et certainement au monde, de dépollution de mégots en cycle fermé. Nous avons investi 200 000 € dans une machine qui permet de recycler puis réutiliser l’eau qui sert à dépolluer les mégots. Sorti de là, il reste 10% de boue, un déchet dangereux incinéré chez un partenaire. Ainsi que la fibre composite de mégot, ignifuge et résistante à l’eau : c’est elle que nous valorisons ».
Très bientôt, une nouvelle machine permettra de transformer ce matériau composite en plaques de plastique. « Plusieurs designers attendent cela avec impatience, pour créer de nouveaux objets ». Et donc imaginer de nouveaux débouchés. « Il s’agit d’un marché en plein développement car nous savons que la réglementation va bientôt évoluer en ce sens ». En attendant Bastien Lucas a déjà convaincu de grandes sociétés de lui confier leurs mégots, grâce à une cinquantaine de collecteurs en forme de cigarette géante : Enedis, Vinci, Thalès, Orange, B&B Hotels, Hénaff, etc.
La société monétise déjà cette activité et vise un premier chiffre d'affaires de 50.000€ pour 2018, en visant une croissance de 30% par an. « Le mobilier que nous vendons à nos clients est fabriqué à Brest. Et nous leur facturons plusieurs centaines d'euros chaque tonne collectée. En contrepartie, ces sociétés gagnent en propreté et en image».
Deux tonnes de mégots ont été collectées à ce jour par son unité qui peut traiter 50 tonnes par an. Les collectivités aussi se montrent de plus en plus intéressées. « Le Conquet (Finistère) pourrait devenir le premier site pilote. Les villes de Paris et Castres ont déjà mis en place des solutions. Brest métropole visitera notre site en novembre. Et le conseil départemental de la Manche très prochainement ».
