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Setforge accélère sur la décarbonation
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Setforge accélère sur la décarbonation

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Frappé de plein fouet par la crise de 2008, le groupe ligérien Setforge a, depuis sa reprise par le groupe Farinia en 2009, amorcé un rebond et vise la neutralité carbone en 2050.

Setforge L’Horme va investir 5,1 millions d’euros dans une nouvelle ligne de traitement thermique qui va lui permettre de réduire de 50 % ses émissions de CO2 — Photo : Setforge

Flash Back. Le 16 mars 2009, le groupe Setforge, alors composé de quatre sociétés (Setforge L’Horme, Setforge Extrusion, Setforge Gauvin et Setforge La Clayette) est repris à la barre du tribunal de commerce par le groupe Farinia (1 300 salariés ; 250 M€ de CA en 2020-2021), propriétaire à l’époque de deux forges dans le nord de la France.

"À l’époque, Setforge avait pris le virage de l’automobile. C’était l’avènement des moteurs à très forte combustion interne et les constructeurs étaient passés des vilebrequins en acier moulé aux vilebrequins en acier forgé. Setforge a beaucoup investi pour prendre ce virage, mais le démarrage de la production est arrivé au même moment que la crise des subprimes de 2008 et nous avons été pris dans un effet de ciseau entre des investissements et amortissements à financer et des ventes à l’arrêt. Ce qui a précipité notre placement en redressement judiciaire", relate Didier Forestier, président de Setforge L’Horme.

Une stratégie repensée

Douze ans plus tard, la situation du groupe dont le siège social est basé à L’Horme a bien changé. La reprise par le groupe Farinia, "qui voulait constituer un champion français de la forge" a permis à Setforge de renouer avec la croissance. "L’organisation et la stratégie du groupe ont été entièrement repensées. Nous nous sommes rendu compte que nous ne pouvions pas produire des pièces pour l’automobile comme nous produisons des pièces pour le textile, l’aéronautique, le pétrole ou la construction. L’actionnaire a donc décidé de segmenter les activités avec d’un côté des entreprises qui ne produisent que pour l’automobile et d’autres qui ne font que des pièces hors automobiles. Ce qui nous a aussi permis de beaucoup nous diversifier", explique Didier Forestier.

Résultat, l’automobile, qui est aujourd’hui portée par les deux anciennes usines de Renault à Hagondange en Moselle, reprises en 2011, ne pèse plus que 40 % de l’activité du groupe. "À L’Horme, nous en sommes complètement sortis en nous réorientant sur la partie construction avec les engins pour les travaux publics, mais aussi l’énergie, l’armement et le ferroviaire", précise le président de Setforge L’Horme, qui emploie 80 salariés et réalise 12,8 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Outre la diversification, qui a permis de sortir de la dépendance à l’automobile, Setforge a aussi progressé grâce à sa stratégie offensive en matière de croissance externe. "Setforge, c’est aujourd’hui 10 sociétés dont quatre dans la Loire, 800 collaborateurs et 190 millions d’euros de chiffre d’affaires. La dernière opération de croissance externe date de juin 2021 avec la reprise de Manoir Bouzonville en Moselle", précise Raphaël Barnouin, responsable marketing et communication du groupe.

Cap sur la neutralité carbone en 2050

Pour poursuivre son essor, le forgeron ligérien a décidé de se mettre au vert. "En tant qu’industriel énergivore, nous nous sommes fixé pour objectif de suivre les accords de Paris en visant la neutralité carbone en 2050. Et c’est maintenant que cela se joue. Si on attend 2040, nous n’y arriverons pas. Je suis persuadé que les entreprises qui ne prennent pas le virage maintenant sont amenées à disparaître", expose Didier Forestier.

Consigné au sein du projet Energeco, cet objectif de neutralité carbone se matérialise déjà par des engagements concrets en matière d’efficacité énergétique et de réduction des émissions. "Grâce à notre Lab, localisé à L’Horme et très impliqué dans l’industrie 4.0, nous avons mis en place des solutions connectées permettant le monitoring de notre consommation énergétique dans l’ensemble de nos sociétés ainsi que des innovations favorisant l’amélioration de notre performance énergétique et le développement de bonnes pratiques chez nos collaborateurs", explique le président de Setforge L’Horme.

Pour accélérer sa décarbonation, le groupe a également intégré récemment la communauté Coq Vert. Initiée par Bpifrance en partenariat avec l’ADEME et le ministère de la Transition Écologique, cette communauté regroupe les entreprises françaises engagées dans la transition écologique. "En parallèle, Setforge a intégré la première promotion de l’Accélérateur Décarbonation de Bpifrance et de l’Ademe. Une promotion composée de 15 entreprises dont Setforge L’Horme est le pilote", souligne Didier Forestier.

5 millions d’euros dans une nouvelle ligne de traitement thermique

Pilote de l’Accélérateur Décarbonation, Setforge L’Horme l’est aussi au sein du groupe. "L’objectif est de faire de Setforge L’Horme un modèle en matière de décarbonation pour l’ensemble des autres sociétés du groupe", confirme Didier Forestier.

Dans cette optique, l’usine de L’Horme vient de lancer un projet de décarbonation de sa ligne de traitement thermique, composé de cinq fours (trois fours à haute température et deux fours à basse température) qui fonctionnent pour l’heure au gaz. "Cela représente un investissement de 5,1 millions d’euros financé à hauteur de 23 % par l’Ademe dans le cadre de France Relance. L’idée est de passer nos deux fours à basse température à l’électrique et de remplacer les trois fours à haute température qui ont plus de 35 ans d’existence par des fours nouvelle génération. Ils fonctionneront au gaz car il n’y a pas d’alternative pour chauffer à 900 degrés mais leur meilleure efficacité énergétique diminue la consommation de gaz de 20 %", explique Didier Forestier.

Pour l’heure, les 5 fours qui composent la ligne de traitement thermique de Setforge L’Horme sont alimentés au gaz. Deux d’entre eux vont passer à l’électrique — Photo : Setforge

En améliorant l’efficacité énergétique de ses fours, Setforge L’Horme va également réduire le temps de cycle de ses traitements thermiques. "Nous sommes obligés de chauffer nos fours très longtemps pour avoir une parfaite homogénéité. Les fours nouvelle génération seront homogènes tout de suite réduisant de 20 % nos temps de cycle. Sans compter le fait que parfois nous n’obtenons pas les résultats escomptés. Nous avons aujourd’hui 5 % de repasse sur nos pièces. Demain, c’est autant de coûts cachés en moins qui vont disparaître avec cette nouvelle ligne", argumente le dirigeant.

Économies, nouveaux marchés et recrutements

Grâce à sa nouvelle ligne de traitement thermique, Setforge L’Horme devrait ainsi réduire de 50 % ses émissions de CO2. Un gain environnemental qui devrait se traduire par une économie d’environ 20 000 euros par mois sur la facture énergétique de l’entreprise ligérienne, qui pour l’instant n’est pas soumise à la taxe carbone. "20 000 euros au prix d’aujourd’hui ! Compte tenu des augmentations de prix dans l’énergie, cela pourrait faire beaucoup plus dans les années à venir", précise le dirigeant.

En "verdissant" sa production, Setforge L’Horme s’assure également de rester dans la boucle des grands donneurs d’ordres européens. "Cela va nous permettre de répondre aux attentes de nos clients qui nous questionnent de plus en plus sur le bilan carbone des pièces. Dans nos offres, nous allons d’ailleurs adjoindre ce bilan carbone pour que nos clients aient une vision en toute transparence de ce que l’on produit. Cela ne viendra pas remplacer la technique et le prix, mais ce sera un argument commercial en plus", assure Didier Forestier.

À l’échelle du groupe, cette volonté de décarboner la production devrait aussi faciliter l’accès à de nouveaux marchés. "C’est vrai qu’avoir une image plus verte va aussi nous aider à aller chasser les marchés de la mobilité électrique. Les Tesla et consorts sont forcément plus sensibles à cette thématique. La décarbonation peut donc nous apporter un vrai avantage concurrentiel dans l’automobile, le camion et, demain, dans la construction", argumente Raphaël Barnouin.

"Sans oublier la question du recrutement. Les jeunes générations sont de plus en plus sensibles à ces thématiques environnementales. Décarboner notre production, c’est aussi une façon de soigner notre marque employeur pour attirer les talents de demain dont on a besoin", conclut Didier Forestier.

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