Vendée
Ukraine : la plus grosse commande de l'histoire du spécialiste de machines agricoles Carré est gelée
Vendée # Agriculture # Conjoncture

Ukraine : la plus grosse commande de l'histoire du spécialiste de machines agricoles Carré est gelée

S'abonner

L’entreprise familiale vendéenne Carré devait livrer 70 machines agricoles en Ukraine, une commande au volume inédit dans l’histoire de la PME de 150 salariés. Destinée à un distributeur basé à Zaporijia, la ville dont la centrale nucléaire a été bombardée ce vendredi 4 mars, elle est suspendue à l’évolution du conflit.

Benoît Carré, président de la PME vendéenne (ici au centre) s’était rendu en Ukraine fin janvier avant que le conflit n’éclate, pour rencontrer ses nouveaux partenaires — Photo : Carre

C’était du jamais vu dans l’histoire pourtant ancienne de l’entreprise Carré, fondée en 1938 et implantée au cœur de la Vendée, à Saint-Martin-des-Noyers. La PME familiale de 150 collaborateurs qui conçoit et fabrique du matériel agricole dédié au travail au sol et au désherbage mécanique, avait conclu fin 2021 un très gros contrat avec l’Ukraine. Le conflit entre la Russie et l'Ukraine a refroidi l’enthousiasme : le marché est gelé. "Nous avions touché du doigt la plus grosse commande de l’histoire de l’entreprise, on l’a seulement vu passer", se désole son président Benoît Carré.

La PME en pleine croissance (18 millions d’euros de chiffre d’affaires en juin 2021, plus de 20 millions envisagés au 30 juin 2022) avait sollicité voici un peu plus d’un an la CCI et son service à l’international pour prospecter en Ukraine. Un importateur ukrainien, qui déploie son réseau de distribution dans tous ce pays, s’était montré intéressé par le savoir-faire de Carré.

Un contrat est signé, portant sur 70 machines à fabriquer pour un montant d’un million d’euros. Seulement trois ont pu été livrées. "Les suivantes devaient l’être en mars et juin, précise Benoît Carré. Nous avions programmé la venue de l’équipe technique de l’importateur en Vendée fin février, elle a été annulée. Nous-même devions nous rendre sur place pour assurer des formations."

Des perspectives de croissance dans ce pays qui deviennent floues

Benoit Carré : "L’Ukraine était un marché qui pouvait atteindre 5 millions d’euros de chiffre d’affaires par an — Photo : Carre

Sur place, c’est à Zaporijia, là où se situent les bureaux de l’importateur. Une ville située au sud de l’Ukraine investie par les troupes russes vendredi 4 mars après que la centrale nucléaire, la plus grande d’Europe, ait été frappée par des missiles et gagnée par un incendie. "Les dernières nouvelles que nous avons eues de la part de notre partenaire remontent à la fin de la semaine dernière, remarque Benoît Carré, bien sûr nous ne lui avons pas demandé de prendre position sur le marché".
Lui-même s’était rendu à Zaporijia fin février, demeurant sur place huit jours. Les prémices d’une guerre n'avaient pas encore gagné les esprits ukrainiens. "Ce n’était même pas un sujet", se souvient le président de Carré.

Le montage des machines destinées à l’Ukraine n’avait pas débuté, un moindre mal pour l’entreprise vendéenne. Qui, au-delà de ce contrat ponctuel, voit des perspectives séduisantes devenir hypothétiques. Très gros exportateur de céréales dont le blé, premier producteur mondial d’huile de tournesol et de colza, l’Ukraine est une puissance agricole de premier ordre. "Pour nous, c’était un marché qui pouvait atteindre jusqu’à 5 millions d’euros de chiffre d’affaires par an", fait savoir Benoît Carré.

Seulement trois machines ont été livrées en Ukraine sur les 70 commandées — Photo : Carre

L’avenir, ce sont aussi les répercussions du conflit sur les marchés européens et français et par ricochet les possibles conséquences pour la PME vendéenne. Benoît Carré convoque le passé pour mieux analyser la manière dont le futur pourrait se dessiner. "En 2014, l’invasion de la Crimée a entraîné un embargo sur la Russie, empêchant les producteurs français d’exporter leurs produits dans ce pays. Les matières premières avaient déjà flambé. Et les constructeurs de machines agricoles qui étaient présents en Ukraine et en Russie se sont tournés vers d’autres pays d’Europe pour vendre leurs produits, chamboulant notre marché."

Sa crainte : que ce scénario se reproduise. "Cette crise de confiance pour l’agriculture, je l’appréhende, poursuit-il. Les agriculteurs ne savent pas s’ils vont gagner un, deux euros ou rien, ils ignorent où ils vont."

Lors de sa visite éclair au salon de l’Agriculture à Paris samedi 26 février, le président Emmanuel Macron avait eu le temps de glisser un message à leur endroit sous forme de mise en garde: "De manière certaine, cette guerre aura des conséquences sur nos exportations pour les grandes filières […] sur l’augmentation des coûts de l’énergie, sur l’alimentation du bétail, son coût, peut-être même la capacité à fournir". Et d’alerter : "Cette guerre durera, il faut nous y préparer".

Vendée # Agriculture # Industrie # Conjoncture # International
Fiche entreprise
Retrouvez toutes les informations sur l’entreprise CARRE DAUPHIN