Sans se départir de son sourire, avec une humilité de tous les instants, Olivier Gelly, fondateur de la marque d’espadrilles catalane Payote (16 salariés, CA 2021 : 1,3 M€), égrène les commandes prestigieuses accumulées au cours des derniers mois : la Fédération française de rugby, la Fédération américaine de basketball (la NBA), le musée du Louvre, le Palais de l’Élysée, etc. Ce qui avait commencé en 2016 avec la sympathique ambition de donner une nouvelle jeunesse à ce produit purement régional devient une réussite économique évidente. "Nous avons enregistré deux millions de commandes en 2021 et pourtant nous ne sommes en capacité que d’en fabriquer 100 000", explique Olivier Gelly, qui s’apprête donc à lancer son entreprise dans un nouveau cycle de croissance.
Un nouveau site pour tenir la cadence
Depuis le démarrage, Payote s’est allié à un autre fabricant d’espadrilles, le basque Megam, qui dispose d’une unité de fabrication à Mauléon (Pyrénées-Atlantiques). Celle-ci arrivant à saturation, Payote a créé, en 2021, un premier atelier qui a lui aussi rapidement plafonné, avec une surface limitée à 300 m2. La PME catalane embraye donc sur un véritable projet destiné à la faire passer à la taille industrielle.
Payote prévoit d’investir de 1,8 à 2 millions d’euros dans la construction d’une nouvelle usine, située à Perpignan (Pyrénées-Orientales). L’acquisition d’un terrain de 5 000 m2, qu’elle vient de signer, lui permet de lancer le chantier en juin prochain. Livrable dans 18 mois, le site devrait générer, dès la mise en route, de 20 à 30 embauches. "Nous allons notamment investir dans des machines de couture ou de découpe laser, car l’automatisation de la chaîne de fabrication est un des problèmes auxquels nous nous heurtons actuellement dans l’usine de Mauléon. L’objectif est de pouvoir produire de 800 000 à un million d’espadrilles par an. Cette nouvelle usine nous permettra aussi de résoudre une problématique de logistique, qui se pose à nous de longue date", analyse Olivier Gelly.
Des valeurs communes avec la clientèle
Sur un marché estimé à 12 millions d’espadrilles vendues en France tous les ans, dont 9 millions sont fabriquées en Chine, le pari de Payote semble pour le moins audacieux. Mais Olivier Gelly inscrit sa démarche dans l’air du temps, tourné vers la relocalisation des industries dans les territoires, autour de valeurs partagées avec les consommateurs. "Depuis l’origine, nous maintenons une transparence totale sur notre fabrication, pour dire qui fabrique quoi, et avec quelles matières. Cette proximité avec le client nous a permis de donner un second souffle à l’espadrille. La nouvelle usine est d’ailleurs conçue pour que nous avancions tous ensemble. Des ateliers seront ouverts aux fidèles de la marque pour qu’ils viennent eux-mêmes fabriquer leur modèle personnalisé, dans un esprit de tourisme industriel" rajoute-t-il.
Dans l’immédiat, Payote vient de renforcer son atelier déjà opérationnel. L’entreprise a fait l’acquisition de 4 machines dédiées à la couture italienne, technique la plus difficile à maîtriser dans la chaîne de fabrication, au moment de coudre les cônes de tissus sur la semelle des espadrilles. L’atelier devrait pouvoir, ainsi, remonter sa fabrication de 1 500 à 4 000 paires par jour. Sur le plan commercial, Payote vient d’ouvrir, après Perpignan, une deuxième boutique à Toulouse. Avec les volumes dont elle disposera grâce à la nouvelle usine, l’entreprise catalane prévoit l’ouverture de 10 autres boutiques en France, et 10 de plus à l’international, en privilégiant ses principaux marchés (États-Unis, Japon, Angleterre, Belgique, Suisse). Elle affiche un prévisionnel de 2 millions d’euros en 2022.
