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Olivier Salleron (FFB) : "Nous réclamons un ministre du Logement et un plan d’actions"
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Olivier Salleron président de la Fédération française du bâtiment. "Nous réclamons un ministre du Logement et un plan d’actions"

Le président de la FFB Olivier Salleron réclame un plan d’actions et un ministre de plein exercice pour le logement. Un secteur pas assez pris en compte par la majorité présidentielle, selon lui. La Fédération française du bâtiment a fait alliance avec d’autres acteurs (promoteurs, syndicats de l’immobilier, unions des notaires, copropriétaires, économistes, architectes…) pour peser dans le débat.

"Depuis la fin 2023, nous avons déjà perdu 6 000 emplois" alerte Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment (à droite, ici en janvier 2024 avec Christophe Marchand, président de la FFB Mayenne) — Photo : Frédéric Gérard

Que réclament la FFB et l’Alliance pour le logement (1) auprès du gouvernement ?

Depuis le premier gouvernement de cette majorité, en 2017, le logement est stigmatisé. Il n’y a même pas de ministre du logement, c’est un signe ! Nous demandons d’urgence la nomination d’un ministre avec un plan d’actions pour tous les territoires et la mise en place d’un conseil national de la construction. J’avais dit à Bruno Le Maire Maire qu’il n’y aurait pas de plein-emploi en France sans plein-emploi dans le bâtiment. Mardi (30 janvier 2024, NDLR), nous avons été reçus à Bercy en urgence. Nous avons rappelé que le logement est un enjeu pour la réindustrialisation et donc pour l’emploi. Le ministre est revenu sur la surtaxe des GNR (gazole non routier, NDLR) pour les agriculteurs : les entreprises du bâtiment aussi connaissent des difficultés, nous réclamons l’égalité de traitement sur le GNR ; et le gel des services REP [gestion de fin de cycle, NDLR] sur un an, le temps de rendre le dispositif efficace. Il faut mettre en place un statut fiscal du bailleur privé pour maintenir l’offre de logements locatifs.

Où en est la situation de l’immobilier neuf, premier touché par la crise du logement ?

La baisse de constructions neuves nous ramène au niveau du début des années quatre-vingt-dix, dans l’habitat individuel et collectif. En 2023, on est arrivé péniblement à 90 000 nouveaux logements, malgré une augmentation de la population et des familles monoparentales. En 2024, on pourrait être en dessous des 50 000 logements supplémentaires. Cela va encore bloquer le parcours de gens pour accéder à la propriété. 82 % des Français aspirent à vivre en maison individuelle. Mais si le parc n’est pas suffisant, beaucoup ne peuvent pas acheter, ils ne libèrent donc pas les logements loués, ce qui par répercussion ne profite pas aux chantiers de rénovation lors du changement d’habitants.

Quels Français sont les premiers touchés par cette situation ?

Les primo-accédants. Ceux qui n’ont pas d’apport ne peuvent pas acheter. Il y a eu la suppression du prêt à taux zéro, des prêts d’une durée de plus de 25 ans, la limite aux 35 % du budget des ménages : en trois ans, cela fait beaucoup. Et malgré les 2 milliards d’euros supplémentaires, portant l’enveloppe à 4 milliards depuis janvier, Ma Prime Rénov est trop compliquée. On complexifie les choses, donc des citoyens se désengagent du dispositif et cela ne bénéficie pas aux artisans pour l’obtention de chantiers

Comment ce contexte se concrétise en termes d’emploi dans vos métiers ?

Depuis la fin 2023, nous avons déjà perdu 6 000 emplois. Si cela continue, on pourrait en perdre 150 000 d’ici à la fin du premier semestre 2025. On observe ce recul dans tous les secteurs du bâtiment. C’est d’autant plus dommage, que depuis le Covid, nous avions réussi à recruter ou former 120 000 personnes supplémentaires à nos métiers. C’était positif. Les nouvelles normes environnementales des bâtiments notamment ont participé à l’attractivité de nos métiers.

La transition énergétique peut-elle permettre d’atténuer le phénomène à travers la rénovation des bâtiments ?

La rénovation représente 56 % de l’activité du bâtiment, mais ce n’est pas seulement de la rénovation énergétique. Et tous les artisans spécialisés dans le neuf ne peuvent pas décider comme cela de faire de la rénovation : il faut se former avant cela. Mais contrairement au neuf, la rénovation a des perspectives. La tendance s’amplifie avec une hausse des chantiers de 4 % chez les particuliers. Le plan sur les bâtiments tertiaires impose de porter à au moins 40 % la réduction des consommations énergétiques en 2030. Et sur les dix prochaines années, l’État a lancé un grand plan de rénovation de toutes les écoles de France, un chantier national évalué entre 30 et 40 milliards d’euros.

(1) L’Alliance pour le logement est constituée de la FFB et de son Pole Habitat ainsi que la FNAIM, la FPI, Procivis, l’USH, l’UNIS, l’UNNE, l’UNSFA et l’UNTEC.

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