France
Les entreprises soumises aux exigences RSE pour leur financement
France # Capital

Les entreprises soumises aux exigences RSE pour leur financement

S'abonner

De plus en plus de fonds d’investissement manifestent un intérêt pour les enjeux de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Avec l’ambition de construire des entreprises plus résilientes. Les sociétés - start-up, PME et ETI - dans lesquelles ils investissent doivent intégrer des critères ESG, Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance, dans leur stratégie.

Xavier Leroy, directeur du pôle conseil d’Ethifinance — Photo : DR

Du 20 au 22 septembre 2022, la croisette de Cannes a accueilli la septième édition de l’International Private Equity Market (Ipem), le rendez-vous annuel des fonds d’investissement. Il y fut question d’opportunités d’investissement dans un contexte inflationniste certes mais aussi d’ESG. "On l’a bien constaté, on ne parle plus que de ces critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG). Cela devient systématique dans les levées de fonds, ce qui est positif car cela montre que les acteurs ont des convictions", estime Xavier Leroy, directeur du pôle conseil d’Ethifinance, un groupe indépendant européen de services de conseil, recherche et notation financière et extra-financière.

Le secteur du private equity (capital investissement) manifeste en effet un intérêt croissant pour les enjeux de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Le fonds d’investissement Balderton, un des leaders européens du secteur, a par exemple récemment mis en place un programme de financement en faveur de la "croissance soutenable".

Ces acteurs financiers répondent ainsi aussi bien à des impératifs de marché qu’à un nouvel état d’esprit. Le fonds Alter Equity investit depuis près de dix ans dans des entreprises, essentiellement des start-up et des PME, dont l’activité est utile aux personnes ou à l’environnement, principalement dans les secteurs de l’éducation, de la culture, de la santé, de l’accès à l’emploi, mais aussi en ce qui concerne le dérèglement climatique ou l’épuisement des ressources naturelles. "Nous entrons au capital d’une entreprise à condition que ses produits ou ses services répondent à un enjeu social et environnemental majeur, comme les solutions proposées au dérèglement climatique, la préservation de la biodiversité et des ressources, la qualité de l’air et de l’eau, l’accès à l’emploi, le bien-être. Les entreprises doivent aussi progresser vers davantage de responsabilité sociale et environnementale dans la conduite des affaires. Ces deux enjeux restent indissociables", explique Gilles Geoffroy, associé au sein du fonds Alter Equity. Ce fonds a établi entre dix et quinze indicateurs qui donnent aux entreprises qu’il finance des objectifs quantifiés et adaptés, définis en fonction de leur business plan et de leur secteur d’activité, ainsi qu’une feuille de route et de progrès pour mesurer l’impact sociétal de la société. Pour une entreprise qui évolue dans le secteur du recyclage des déchets, le fonds va ainsi mesurer la quantité de déchets récupérés, le pourcentage de matières recyclées et faire le lien entre le développement de l’entreprise et son impact sociétal et environnemental. "On oblige par exemple les entreprises que nous finançons à réaliser un bilan carbone à une échéance d’un ou deux ans. Nous leur demandons de mettre en œuvre des actions en fonction de ce bilan pour réduire leur impact, puis nous auditons la mise en œuvre des actions définies. Pour chacune d’entre elles, nous fixons des objectifs de réalisation ou des objectifs quantitatifs", détaille Gilles Geoffroy.

Une logique de pilotage de la performance extra-financière

Dès lors qu’elles veulent lever des fonds, les entreprises doivent donc désormais afficher leur stratégie RSE. "Les entreprises cotées ont pour habitude de répondre à leurs investisseurs de façon permanente, d’être transparentes en matière d’information financière et extra-financière, mais cette exigence se décale vers les sociétés non cotées et les petites entreprises, tous secteurs d’activité confondus, avec les difficultés que cela implique", concède Xavier Leroy.

Les PME doivent notamment identifier et hiérarchiser les informations à intégrer dans leur stratégie RSE, déployer des ressources, tant financières qu’opérationnelles, pour mettre en place et s’approprier de nouveaux outils de mesure, de pilotage et de suivi.

Il s’agit également pour ces entreprises de parvenir à rendre cohérente et claire leur démarche RSE auprès de leurs investisseurs et des autres parties prenantes à l’aide d’indicateurs précis pour éviter toute forme de "green washing".

"Les entreprises vont devoir rapporter des indicateurs ESG de façon systématique explique Xavier Leroy. Les plus petites d’entre elles doivent donc prendre conscience que cette démarche est utile et ne pas se contenter d’indicateurs bruts, mais utiliser des méthodes de scoring pour mesurer les dispositifs dans le temps. Il faut sortir de la seule logique du reporting, qui n’est pas l’essentiel et entrer dans une logique de pilotage de la performance extra-financière pour créer de la valeur et réduire les risques". L’objectif étant, in fine, que la performance extra-financière d’une société soit établie avec des outils aussi irréprochables que ceux utilisés pour la performance financière.

France # Capital