"Je n’ai pas lu le livre sur Orpea", balaye d’emblée Jean de Miramon, dirigeant de Domani. Au sujet de la maltraitance des personnes âgées dans les structures d’accueil, "et des abus dans le secteur privé lucratif notamment", dénoncés dans l’ouvrage Les Fossoyeurs, le directeur général préfère opposer les valeurs de son entreprise de l’économie sociale et solidaire Domani, fondée à Bordeaux en août 2020. "Nous créons et animons de l’habitat partagé et accompagné à taille humaine, pour des habitants, comme l’on parlerait de colocataires pour des étudiants", précise-t-il, soucieux de se démarquer de la désignation "résident", laquelle est rattachée aux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Ouvert à Pessac, en mars 2021, le premier logement Domani est composé de sept studios, mutualisant cuisine, salle de séjour, de télé, et les services assurés 24 heures sur 24 par des auxiliaires de vie notamment. Les prochains colocataires seront accueillis à Mimizan dans les Landes, Castres dans le Tarn et Rodez en Aveyron en 2022.
La rentabilité attendue dans trois ans
La suite, c’est "l'ouverture d'une cinquantaine d'unités de huit personnes dans les trois prochaines années", pour une rentabilité attendue à l’issue de cette première phase. Ces projets, essentiellement dans le Sud-Ouest et en Ile de France, sont en cours d’examen par les deux cofondateurs et associés majoritaires, Jean de Miramon et Oscar Lustin, moins de cinquante ans à eux deux, diplômés d’HEC Paris. L'entreprise de 6 salariés compterait 25 collaborateurs en 2025.
"Adossés à DFI, Domani Foncière Inclusive, qui nous appartient, nous voulons aller vite et prouver que notre modèle d’habitat inclusif va fonctionner. Nous mettons les moyens pour cela en termes de développement, d’essaimage. Cette solution est par ailleurs encouragée par les pouvoirs publics depuis la Loi Elan", indique Jean de Miramon. "Le monde du handicap a beaucoup travaillé et défriché en amont, notamment en Gironde", salue le dirigeant qui rappelle que Domani s’est également inspiré d’expériences "de petites unités autonomes" venues du Québec, des Pays-Bas et d’Allemagne.
Effet d’aubaine
"Le département de Gironde est pilote sur le financement de l’AVP, l’aide à la vie partagée, pour accompagner le déploiement de l’habitat inclusif. Un effet d’aubaine pour nous ici", se félicite également le dirigeant citant le rapport sur l’habitat partagé de Denis Piveteau, conseiller d’État, et de Jacques Wolfrom, président du comité exécutif du groupe Arcade Vyv, remis au gouvernement en juin 2020 qui appuie le déploiement de l’AVP au niveau national. Ce rapport table sur la création d’environ 50 000 places pour personnes âgées en habitat API – accompagné, partagé et inséré dans la vie locale – d’ici 2030. Côté prix, l’entreprise bordelaise avance des restes à charge pour les locataires inférieurs de 20 % à ceux des Ehpad, pour des mensualités qui s’élèvent à 1 500 -1 600 euros. "Nous sommes convaincus par notre démarche et il y a de la place pour beaucoup d’entrepreneurs. Notre ambition est non seulement de devenir un acteur de référence, mais également de fédérer pour porter cette solution ensemble", conclut le dirigeant.
