Le CETI transforme les textiles usagés en bobines de fil
# Textile # Innovation

Le CETI transforme les textiles usagés en bobines de fil

S'abonner

A Tourcoing (Nord), le CETI vient d'inaugurer un démonstrateur capable de recycler les fibres issues de textiles usagés, pour en faire une nouvelle bobine de fil à tisser. Fruit d'un investissement de 2 millions d'euros, cet outil pourrait permettre à terme de bâtir une nouvelle industrie de recyclage du textile en région.

— Photo : ESL

Le CETI (centre européen des textiles innovants) vient de lancer un démonstrateur capable de recycler les textiles usagés, pour en faire un nouveau fil prêt à être tissé. Installé dans ses locaux de Tourcoing (Nord), ce démonstrateur est constitué d'un ensemble de machines qui recyclent mécaniquement toutes les fibres issues de vêtements usagés et de chutes de production industrielle, en particulier le coton. Une matière qui reste prisée, et représente un véritable enjeu écologique du fait d'une production et d'une transformation reconnues comme polluantes.

Un investissement de 2 millions d'euros

Fruit d'un investissement de 2 millions d'euros, cet outil constitue "une avant-première européenne", selon Pascal Denizart, directeur général du CETI, qui compte une vingtaine de salariés. A terme, il doit permettre de "bâtir une industrie de recyclage du textile en région comme en France, avec des filières comme l'effilochage, les filatures, la confection, etc., qui existaient dans le Nord il y a quelques années...", complète-t-il.

Le démonstrateur permet par exemple de réaliser un fil 100 % coton, à partir de 70 % de fibres recyclées et de 30 % de fibres vierges (coton bio ou éthique). Un taux largement supérieur à ceux des produits actuellement commercialisés en Europe, selon le directeur du CETI.

Quatre entreprises partenaires

Depuis 2017, quatre entreprises sont partenaires de ce projet : Okaïdi, Decathlon, TDV Industries et le constructeur de machines Laroche. De premiers projets sont en cours et le contexte réglementaire, à savoir l'interdiction de détruire les invendus du secteur textile à partir de 2021, devrait accélérer les choses. D'autant que le coton représente, d'après le CETI, 30 % de la consommation mondiale de matière, que la population mondiale augmente tandis que la part des terres arables diminue.

En attendant, Okaïdi travaille avec le CETI sur une première collection de vêtements pour enfants en coton recyclé, qui doit voir le jour à l'horizon 2020. De son côté Decathlon projette, sur la même période, la commercialisation d'un pantalon de chasse et de chaussettes en coton recyclé.

Une filière tri à structurer

En France, le potentiel est réel pour une industrie de recyclage du textile, avec 300 000 tonnes de déchets textiles qui vont être générés sur l'année 2019. Dans l'état actuel des choses, 55 % de ces déchets vont être réutilisés (revente dans les pays émergents), 12 % feront l'objet d'un effilochage pour récupérer certaines matières, 8 % serviront à fabriquer du papier, 15 % deviendront des produits d'essuyage et enfin, 10 % seront incinérés. Mais pour que ce potentiel s'exprime pleinement, il faut que la filière se structure, depuis la collecte et le tri, jusqu'à la distribution, en passant par l'effilochage, la filature et la confection. Une organisation qui est encore loin d'être en place, en particulier en amont. "Cela implique le changement du business model des collecteurs/trieurs, dont la vocation première de nos jours est plutôt la revente", reconnaît Pascal Denizart.

Pour que ce changement s'opère, il faudrait selon lui des incitations fortes de la part de l'Etat. "Certains pays comme la Hollande ont déjà mis en place des machines automatiques de tri du textile, en fonction des matières qui le composent. Cela représente un investissement de 400 000 € par machine", souligne-t-il. Un point de vue légèrement différent de celui du dirigeant du Relais, une scop nordiste spécialisée dans la collecte et le tri textile. Lors d'une précédente interview, Pierre Duponchel évoquait plutôt une dizaine d'années de travail et des investissements lourds en R&D, pour "développer une solution industrielle, capable de trier avec précision les tissus, par couleur et par nature de fibre".

# Textile # Innovation # Investissement