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La coopérative bio Probiolor triple ses capacités de stockage à Vézelise
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La coopérative bio Probiolor triple ses capacités de stockage à Vézelise

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Pour accompagner une croissance sans précédent, la coopérative bio Probiolor basée à Vézelise (Meurthe-et-Moselle) investit 5,2 millions d’euros dans l’extension de son silo à céréales et la modernisation de ses infrastructures.

La coopérative bio Probiolor a réalisé 14,8 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2021, soit 15 % de plus qu'en 2020 — Photo : Lyselle Saint-Paul

Démarré en juin dernier, le chantier doit se terminer en juin prochain. La coopérative agricole bio Probiolor basée à Vézelise (Meurthe-et-Moselle), désormais présidée par Guillaume Millot, mobilise 5,2 millions d’euros pour tripler ses capacités de stockage. Il est ainsi prévu d’installer, avant le début de la récolte 2022, une vingtaine de cellules supplémentaires de 90 à 970 tonnes. Au final, la capacité du silo lorrain sera portée de 4 500 à 12 000 tonnes. La coopérative prévoit d’y ajouter une ventilation réfrigérée, cinq nouveaux boisseaux d’inertage étanches et un groupe concentrateur d’azote pour éviter l’arrivée d’insectes éventuels. Les infrastructures actuelles seront également rénovées et modernisées avec la création, entre autres, d’un laboratoire appelé échantillothèque.

Aides publiques

Sur les 5,2 millions d’euros d’investissement, le tiers est financé par la Région Grand Est via son dispositif de soutien aux industries agroalimentaires (185 000 euros), les fonds européens Feader (542 000 euros), l’Agence Bio (660 000 euros) et l’Agence de l’Eau Rhin-Meuse (301 000 euros). De son côté, Probiolor débloque 360 000 euros de fonds propres avec le soutien de l’une de ses coopératives partenaires Cocebi et le fonds de codéveloppement commerce équitable. Pour les 3,1 millions d’euros restant, la structure lorraine a contracté trois emprunts auprès du Crédit Agricole et du Crédit Coopératif pour des durées de 10 à 15 ans.

Cette extension intervient trois ans après l’acquisition d’un silo conventionnel de la Coopérative agricole lorraine (CAL) d’une capacité de 4 500 tonnes. À l’époque, près de 4 millions d’euros avaient été investis pour sa dépollution et son reconditionnement. Une tour de tri avait également été installée. "Car l’approche biologique nécessite de planter des espèces en association, explique le codirecteur de Probiolor Frédéric Mony. Par exemple, on mélange souvent les céréales avec les légumineuses. Mais une fois récolté, il faut les séparer."

Chiffre "fous"

Désormais, c’est une deuxième phase de développement qui s’engage avec ce nouvel investissement de taille répondant à une croissance sans précédent. "Nous avons affaire à une vague de conversion au bio qui n’en finit pas, confie Frédéric Mony. La coopérative a 30 ans et nous avons passé les 25 premières années à nous plaindre que rien n’était fait au niveau des pouvoirs publics pour convertir les paysans au bio. Et là, tout s’est déclenché depuis cinq ou six ans. Les surfaces et les tonnages bio sont en progression exponentielle." Pour preuve, la coopérative qui récoltait 6 000 tonnes de céréales et de graines protéoléagineuses en 2016 en a recueilli 27 000 tonnes en 2021 (contre 24 000 en 2020). La dynamique est telle qu’en moins de quatre ans, Probiolor est passé de 8 à 21 salariés et son nombre d’adhérents a presque doublé pour atteindre 286 cette année. "Nous sommes sur des chiffres un peu fous, admet le codirecteur. Sur les quatre dernières années, nous avons atteint des niveaux de croissance entre 35 et 50 %." Avec ce nouveau silo, la coopérative lorraine se fixe un objectif clair : engranger 15 % de chiffre d’affaires supplémentaire chaque année, comme ce fut le cas sur l’exercice précédent à 14,8 millions d’euros.

Mutualisation commerciale

Pour récolter encore davantage - majoritairement du blé (13 000 tonnes en 2021), de l’avoine (2 300 tonnes) et de l’orge (1 300 tonnes) - Probiolor ne centralise pas l’ensemble de ses produits sur Vézelise mais compte aussi sur sept fermes relais éparpillées aux quatre coins de la grande région : en Lorraine, en Alsace et dans le nord de la Champagne-Ardenne. "Ce sont des adhérents qui ont des capacités de stockage dépassant leurs besoins et qui les mettent à disposition de la coopérative, détaille Frédéric Mony. Nous passons des contrats avec eux, cela nous permet d’être raisonnables en termes de coûts et surtout, cela implique nos adhérents qui peuvent rentabiliser leurs installations." Une tendance à la coopération jusque dans la mutualisation des moyens de commercialisation. En effet, Probiolor travaille avec deux autres coopératives : Cocebi à Nitry (Yonne) et Biocer au Plessis-Grohan (Eure). "Nous commercialisons ensemble pour ne former qu’un seul offreur sur le marché, assure le codirecteur. À nous trois, nous maillons l’ensemble du territoire français. Nous faisons un peu d’export vers le Bénélux, l’Allemagne et l’Italie mais nous n’avons pas d’objectifs précis à l’international à ce stade. Nous restons une coopérative de proximité avec des circuits logistiques simples. C’est très bien pour notre bilan carbone."

Roulette russe

Celle qui fournit, en partie, l’orge des bières 1664 bio de Kronenbourg ou encore le blé des farines Francine bio des Grands Moulins de Paris (groupe Vivescia), aurait pu récolter encore plus de céréales en 2021. Mais l’objectif des 31 000 tonnes a été manqué, faute de conditions météorologiques favorables. La faute aussi à la rupture d'un contrat qui liait Probiolor à une autre coopérative, conventionnelle, cette fois. Selon son rapport d’activité 2021, "celle-ci avait fourni en début d’année une estimation de volumes de 3 000 tonnes qu’elle n’a pas honorée." Ce type de partenariat permet habituellement aux coopératives conventionnelles de collecter les céréales de ses adhérents récemment convertis au bio. "Mais la donne a changé, prévient Frédéric Mony. Car le marché augmente et cela donne envie à certaines coopératives de reprendre la main sur leurs volumes bio. En tout cas, nous faisons tout pour garder ces partenariats car nous pensons que c’est une démarche beaucoup plus cohérente. Cela évite de se concurrencer sur les marchés."

Mais selon le codirecteur de Probiolor, la tendance se confirme et de nouveaux acteurs se jettent chaque année sur ce marché du bio en pleine croissance : "Auparavant, nous étions les seuls opérateurs. Maintenant, tout le monde s’y met et malheureusement, ils n’ont pas tous les considérations militantes que nous avons toujours eues. Ils viennent avec leurs manières de faire issues de l’agriculture conventionnelle et ne font pas attention aux besoins réels du marché. Nous, nous demandons à nos clients quels sont leurs besoins sur trois ans et nous mettons ensuite en production. C’est notre technique pour maintenir de bons prix à l’achat pour les paysans. Mais tout le monde doit le faire ! Si certains ne pensent qu’aux volumes et non aux besoins réels, de grosses tensions sont à prévoir. Il ne faut surtout pas jouer à la roulette russe de la surproduction."

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