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Jordan Malka, artisan habilleur : le pari de l'exigence
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Jordan Malka, artisan habilleur : le pari de l'exigence

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Jordan Malka, artisan habilleur, est à la tête de quatre boutiques à Lyon, Grenoble et Paris. S’il a réussi, en dix ans, à se faire une place dans l’univers de la mode et du prêt-à-porter, il ne compte pas pour autant s’arrêter là.

— Photo : DR

À 36 ans, il qualifie son parcours de « logique ». « Mon père est fabricant et grossiste en prêt-à-porter masculin. J’ai passé trois ans à découvrir tous les rouages du métier avec lui, mais sans concessions de sa part », se souvient Jordan Malka. Tailleur pour homme, il est à la tête de la marque qui porte son nom depuis 2009.

Dynamique, il a l’aisance de la parole et la force de conviction, même auprès des professionnels. Et habille aussi bien les équipes de la Brasserie Georges que celles du chef Christian Têtedoie (Lyon), mais travaille aussi pour les pompes funèbres. « Il faut de tout pour avoir une entreprise saine », estime-t-il.

De Lyon à la Turquie, il découvre la mode, apprend les codes, rencontre les intermédiaires, visite les usines. Surtout, il « apprend l’humilité et le respect du produit ». « J’ai vu ce qu’était le travail à l’usine, les cadences, le bruit. J’ai aussi le devoir de transmettre ça au client », précise-t-il. Un leitmotiv qui l’anime lorsqu’il n’hésite pas à regretter les attitudes de certains clients, parfois trop définitifs sur leur choix ou critiques envers les prix. « Le client est roi mais il faut lui faire comprendre que derrière les produits, il y a du travail et des gens ». Un credo qui l’empêche d’ailleurs de céder à la tentation des soldes : « Le prix juste, c’est toute l’année », confie-t-il, alors que 70 % de son CA se fait sur le prêt-à-porter.

Pas d’intermédiaire

Pour rester compétitif dans un univers très concurrentiel et peu ouvert, il se passe d’intermédiaires, négocie lui-même le tissu, échange en direct avec les façonneurs turcs ou portugais et se démène pour livrer lui-même sa boutique parisienne dans les 24 heures en venant de Lyon. « Si le client est prêt à mettre le prix dans un costume, je ferai tout pour lui apporter le meilleur service », dit-il.

Une question de respect mais aussi de travail. En 2009, il ouvre sa première boutique à Lyon. La connaissance du milieu et de ses règles sera un prérequis. Il devine l’exigence des fournisseurs qui exigent le paiement à la commande, quand bien même lui ne travaille qu’en petite série sur seulement deux collections par an.

Suivra quatre ans plus tard, un point de vente à Grenoble, puis de nouveau à Lyon en 2014. En 2017, il décide à tenter sa chance à Paris. Un pari risqué alors que le secteur est déjà bien occupé par les tailleurs de renom. « Je suis arrivé en challenger à Paris, ça n’a pas été simple », note-t-il. Un point de vente déjà rentable qui permet à l’entreprise de réaliser 1,4 M€ de CA au total en 2018, en croissance de 15 % sur un an.

Aventure familiale

L’exigence qu’il se fixe l’empêche de déléguer. Seule sa famille semble digne de confiance. Si sa mère gère l’autre boutique lyonnaise, il convainc sa sœur de rejoindre l’aventure à Paris. À Grenoble, c’est Josiane, « une perle », présente à ses côtés depuis 2010. Lui est parfois à Lyon, parfois partout.

Avec quatre salariés, la structure se veut agile et légère. S’il refuse le modèle de la franchise – « la marge n’est pas suffisante », – il ne s’empêchera pas d’ouvrir de nouveaux points de vente à l’avenir. La condition ? « Trouver des gens de confiance ».

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