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Euronat : le plus vaste camping naturiste d’Europe profite des vents porteurs
Gironde # Hôtellerie # Conjoncture

Euronat : le plus vaste camping naturiste d’Europe profite des vents porteurs

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Installé à Grayan-et-l’Hôpital depuis 1975, le village naturiste Euronat est en pleine santé. Il affichait en 2023 un chiffre d’affaires record et annonce un taux de réservation en forte hausse pour 2024. Le dirigeant dit regarder l’avenir sereinement et poursuivre ses investissements, après des mois de farouche opposition avec l’ancienne équipe municipale.

Après une année record en termes de chiffre d’affaires, Euronat enregistre une progression des réservations de plus de 30 % cette année — Photo : Céline Hamelin

Les vêtus l’ignorent souvent : la France est la première destination touristique des tout-nus dans le monde, devant l’Espagne et la Croatie (4,5 millions de touristes en 2020 selon la Fédération française de naturisme). Et dans le pays, la Gironde se distingue par la concentration d’établissements. "Les quatre du département pèsent 20 % du marché national", estime Jean-Michel Lorefice, le PDG d’Euronat. Sa structure familiale est le plus vaste camping naturiste d’Europe.

Une petite ville à lui tout seul

Il s’étend sur 334 hectares, compte 40 km de route, plus de 1 000 bungalows, 1 400 emplacements de camping (mobile-homes, cabanes, tentes…). C’est une petite ville à lui tout seul, avec une place centrale, 28 commerces indépendants qui emploient 200 salariés, en plus des 40 collaborateurs de l’entreprise qui travaillent à l’année, renforcés par 150 saisonniers d’avril à octobre.

Euronat est le plus vaste camping d’Europe. Il s’étend sur 330 hectares avec un accès direct à la plage — Photo : Euronat

Il abrite une salle polyvalente, des terrains de tennis, un complexe sportif, un complexe aquatique, quatre mini-clubs et même un centre de thalassothérapie de 1 500 m2. "C’était le premier de la côte girondine en 1988", raconte le dirigeant. Aujourd’hui, il attire autant de touristes du camping que de clientèle extérieure et représente entre 8 et 10 % du chiffre d’affaires.

Au plus fort de la saison, Euronat accueille 9 000 personnes, quand le village médocain dans lequel il est implanté, Grayan-et-l’Hôpital, compte environ 1 500 âmes.

Parmi les types d’hébergements proposés, Euronat abrite plus de 1 000 chalets, dont certains sont occupés à l’année — Photo : M.Pechaubes

+32 % de réservation au camping

"Tous les voyants sont au vert pour ce début de saison 2024. Avec + 32 % de réservations de camping comparées à la même date en 2023, et au global + 10 % pour tous les types de logement, c’est presque étonnant", se réjouit Jean-Michel Lorefice, gendre du fondateur Hubert Lacroix. "Étonnant" mais explicable. Le tourisme naturiste bénéficie déjà de l’engouement général pour l’hôtellerie de plein air. "Nous sommes en développement particulièrement depuis une dizaine d’années. Il y a eu un phénomène d’accélération post-Covid avec un fort besoin de nature. Par ailleurs, la côte Atlantique profite aussi d’un regain d’intérêt par rapport au bassin méditerranéen en raison des fortes canicules." A cette conjonction de facteurs s’ajoute, selon le PDG, une palette d’hébergements récemment élargie, avec des cabanes sous les arbres et des tentes meublées.

"Tous les voyants sont au vert pour ce début de saison 2024'', estime Jean-Michel Lorefice, PDG Euronat — Photo : Caroline Ansart

Les logements plus anciens sont progressivement rénovés. C’est prévu dans les prochains investissements, ainsi que l’achèvement de la modernisation du centre de thalasso, après la refonte de l’espace aquatique en 2022.

"Nous ne sommes pas le Cap d’Agde"

Enfin, Jean-Michel Lorefice espère que la publicité paie. "Pendant des années, nous avons beaucoup investi dans des campagnes de communication pour expliquer que nous ne sommes pas le Cap d’Agde. Notre clientèle est essentiellement familiale avec une tolérance 0 sur les problèmes de mœurs", insiste le dirigeant. La clientèle (55 % de Français, 45 % d’Européens notamment Allemands) rajeunit. "Nos presque 50 ans d’existence nous permettent de voir quatre générations, avec de plus en plus de trentenaires."

Gestion locative et promotion

Le camping quatre étoiles génère l’essentiel (60 %) du chiffre d’affaires, qui a franchi pour la première fois les 10 millions d’euros en 2023. Le reste est issu de la gestion locative des bungalows, dont la majeure partie est détenue par des propriétaires. "300 familles habitent même à l’année. C’est un phénomène qui est apparu il y a une quinzaine d’années. Elles bénéficient des services techniques maintenus même si la structure est fermée au public l’hiver."

Le centre de thalassothérapie, premier construit sur la côte girondine en 1988, est l’aménagement phare du camping. Il génère entre 8 et 10 % du chiffre d’affaires — Photo : Caroline Ansart

Euronat tire aussi ses revenus de la promotion immobilière, même si la part se marginalise. "La société est liée à la mairie, propriétaire du terrain, par un bail à construction de 99 ans. C’est peu courant. Il établit un certain nombre de constructions qui, à terme, sont censées revenir à la commune", explique Jean-Michel Lorefice. "Nous arrivons en queue de programme. Là où nous construisions 40 chalets par an dans les années 80 et 90, il doit nous en rester moins d’une dizaine à bâtir."

Querelle avec la mairie

C’est ce contrat ce qui a été remis en cause par l’ancienne municipalité l’an dernier, estimant le quota de construction outrepassé et le loyer versé (640 000 euros par an selon le PDG) insuffisant. Suite à des démissions en cascades au sein du conseil municipal, un scrutin a élu en début d’année un nouveau maire et semble avoir apaisé les tensions, même si l’affaire demeure aux mains de la justice.

Maintenir les prestations d’un indépendant face aux géants

Euronat est aussi singulier par son statut de société familiale indépendante, là où la tendance est davantage aux rachats par de grands groupes ou de gestion par des fonds d’investissement. "Aujourd’hui, nous sommes parvenus à un niveau de développement mature. L’enjeu consiste à nous maintenir face à des concurrents à l’assise financière bien plus large. Ce n’est pas facile d’être indépendant et familial, mais nous souhaitons le rester."

Le challenge est d’autant plus grand que le niveau d’exigence ne cesse de croître. "Quand Euronat a ouvert, les clients ne voulaient qu’un emplacement, ils voulaient déconnecter, sans électricité. Aujourd’hui, quel camping n’a pas de piscine ? Les jeunes veulent du wifi… Nous essayons d’anticiper les prochaines attentes."

Euronat existe depuis 1975 — Photo : Noé Bugnot

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