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Cruard Charpente et Constructions Bois fabrique désormais sols et façades en usine
Mayenne # Matériaux de construction # Investissement industriel

Cruard Charpente et Constructions Bois fabrique désormais sols et façades en usine

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Spécialisée dans la charpente et l’ossature bois, Cruard Charpente et Constructions Bois lance des panneaux bois-béton. La PME mayennaise compte ainsi gagner du temps sur les chantiers de construction, en préparant sols et façades en usine.

Florian et Aurélien Lefèvre, les deux frères à la tête de Cruard Charpente, Cruard Menuiserie, Godard Construction bois et Fast Métal — Photo : Frédéric Gérard

Basée dans le sud de la Mayenne, Cruard Charpente et Constructions Bois est spécialisée dans la rénovation du patrimoine et des monuments historiques mais surtout, en volume, dans la construction bois. Le marché des maisons individuelles a été abandonné en 2016 pour privilégier les marchés publics : Cruard construit à 70 % des écoles, des salles des fêtes, des Ehpad, des complexes sportifs, des bureaux, etc. "Cela nous donne une visibilité dans notre carnet de commandes à dix-huit mois", indiquent Aurélien et Florian Lefèvre, les deux frères à la tête du groupe.

Cruard Charpente opère dans un rayon de 400 kilomètres. Sa spécificité est de concevoir et de fabriquer dans ses locaux les bâtiments commandés, qui seront transportés en kit avant d’être remontés sur le lieu de commande. Ce qui permet de gagner en confort de travail et de raccourcir les délais de chantiers. Pour aller encore plus vite, une innovation permet désormais de préparer les sols et les façades en panneaux bois-béton. "L’idée est de gagner toute la phase de chantier où on coule le béton, on compte le temps de séchage et de débardage", précisent les deux directeurs généraux. L’Ademe y voit "une alternative légère et bas-carbone comparée aux systèmes constructifs actuels sur le marché".

Deux marques à deux brevets à développer à partir de 2024

Dans un nouvel atelier de 3 000 m2, sont fabriqués les modules Hybridal, une marque déposée. Un caisson abrite une machine conçue spécifiquement pour maîtriser la température et le taux d’humidité indispensables à la tenue de la colle mise au point pour la production de ces nouveaux panneaux bois-béton, avec deux brevets déposés.

Sur sept centimètres d’épaisseur, le béton est coulé sur un support bois de 2,40 mètres de large pouvant mesurer de six mètres à quinze mètres de long. Des passages de gaines sont anticipés. Sous une seconde marque, Hybrimur, des faux bardages imitation bois sont proposés en plusieurs coloris, des leds peuvent être incrustées. Ces façades sont fabriquées chez le partenaire de conception, Jousselin, une entreprise du Maine-et-Loire située à 30 kilomètres.

Ces deux marques devraient être un moteur de croissance pour Cruard, à partir de janvier. L’entreprise a la capacité de préparer des modules qui seront ensuite montés en étages. "On peut par exemple équiper totalement la chambre d’un Ehpad. On crée la structure, un caisson d’environ la taille d’un mobile-home, et on fait venir l’électricien, le plombier, le carreleur, le peintre, le tapissier, etc. Tout est disposé pour ensuite être emboîté sur le chantier", présente Florian Lefèvre.

La gestion des flux industriels appliquée au bois

Au total, à Simplé, Cruard dispose désormais de 15 000 m2 de bâtiments, organisés en quatre ateliers : la fabrication des panneaux et ossatures prêts à être assemblés sur chantier, la charpente, la conception 3D et le module Hybridal.

Les commandes sont souvent spécifiques, voire atypiques. "On fait des prototypes à chaque fois, on monte des moutons à cinq pattes, avec des matériaux qui ne sont pas faits pour l’industrialisation des process. Par exemple, des bottes de paille pour l’isolation des ossatures pour des groupes scolaires ou des salles des fêtes", illustre Aurélien Lefèvre.

Le concept Hybridal, marque déposée par Cruard, est un panneau mixte bois-béton avec une résine inventée dans les ateliers pour améliorer l’accroche et le temps de séchage — Photo : Frédéric Gérard

Pour anticiper au mieux les chantiers, un bureau d’études emploie trente personnes qui se répartissent les différents projets. "C’est sans doute le plus important de France pour une entreprise de charpente", glisse Florian. Un bâtiment peut accueillir des maquettes grandeur nature. "Il nous arrive de faire rentrer des charpentes de 400 ans. On est alors dans les meilleures conditions pour étudier tout ce qu’on peut faire pour les rénover…"

Chaque pièce découpée est numérotée et peut être tracée comme dans une usine. Plus impressionnant encore : "Tout le flux est intégré en 3D pour suivre du bois brut à la coupe jusqu’aux ateliers de montage. Si on détecte une problématique, on évite de passer à la coupe après…" Une anticipation qui répond à des objectifs : gagner du temps, valoriser au mieux la matière et réduire les déchets au maximum.

Dans les ateliers de Cruard Charpente, les pièces découpées sont numérotées et tracées sur tout le site, après que le flux ait été intégré en 3D — Photo : Frédéric Gérard

Dans la même veine, le bâtiment historique de l’entreprise sert désormais d’entrepôt. " On dispose d’environ 4 300 m2 d’espaces de stockage (extérieur compris). Avant, les stocks restaient chez les fournisseurs. Mais on préfère que le bois s’acclimate quelques semaines. On coupe entre 15 % et 18 % d’humidité, et tout au long de la fabrication, le bois ne bouge plus ; ne se dilate plus ni ne se rétracte. On évite ainsi les écarts de cote au millimètre, explique Florian. C’est du bois brut, qu’on traite tout sur place, une fois coupé. On a deux unités de traitement et un bassin de trempage. Cela offre une protection plus efficace jusque dans les moindres aspérités."

De quarante salariés à 150 en vingt ans

Salarié à partir de 1981, c’est André Lefèvre, le père d’Aurélien et de Florian, qui a repris Cruard Charpente, il y a trente ans. "En 1992, il y avait 19 salariés, rembobine Aurélien Lefèvre. En 2002, quarante salariés, en 2012, une petite centaine… " Aujourd’hui, Cruard Charpente et constructions bois emploie 150 salariés et va clôturer son exercice 2023 avec 35 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Des chantiers de prestige et des filiales

La famille Lefèvre possède Cruard Charpente et Constructions Bois ainsi que trois filiales. Godard Construction bois (5,5 M€ de CA, 35 salariés), une entreprise de Loire-Atlantique rachetée en 2004 pour la pose dans toute la France qui a permis, dans un premier temps, de viser le marché nantais très dynamique. À Château-Gontier, Fast Métal (17 salariés) a été créée il y a une dizaine d’années. "On voulait produire nos propres ferrures pour sécuriser l’approvisionnement de nos étapes de montage. Aujourd’hui, on réalise 75 % de notre chiffre d’affaires auprès de clients."

Enfin, Cruard Menuiserie (Bichot menuiserie, rachetée en 2018) emploie une vingtaine de personnes pour la rénovation des bâtiments anciens et de monuments historiques. En 2017, elle a obtenu le label Entreprise du Patrimoine vivant.

Cruard Menuiserie, filiale de Cruard Charpente spécialisée dans la rénovation de patrimoine, s’est vu confier la restauration des armoires sculptées de la bibliothèque Aveline d’Alençon, dans une ancienne église Jésuite du début du XVIIIe siècle — Photo : Cruard Menuiserie - CU Alençon

Cruard peut ainsi mener des projets prestigieux tels la charpente de Notre-Dame-de-Paris, des châteaux ou actuellement la médiathèque Alevine du XVIIIe siècle à Alençon. Dans le moderne, le futur centre d’entraînement du Stade Rennais, pour 8 millions d’euros, est en cours.

Mayenne # Matériaux de construction # Bâtiment # Investissement industriel # PME # Innovation