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Cartesiam veut devenir leader mondial de l'intelligence artificielle embarquée
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Cartesiam veut devenir leader mondial de l'intelligence artificielle embarquée

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En dévoilant au monde son nouveau logiciel NanoEdgeAI Studio, la start-up toulonnaise Cartesiam entend révolutionner l'univers de l'intelligence artificielle embarquée. Cette solution permet aux industriels d'intégrer facilement, rapidement et à moindre coût des capacités d'apprentissage automatique dans tous les objets du quotidien et de les rendre ainsi conscients de leur état.

François de Rochebouët, Michel et Joël Rubino et Marc Dupaquier, les quatre associés de Cartesiam. — Photo : Cartesiam

« Un jour, beaucoup de monde en parlera et vous pourrez alors dire que vous y étiez. » C’est la promesse de Michel Rubino, l’un des quatre dirigeants fondateurs de la start-up toulonnaise Cartesiam. Une promesse faite en préambule d’une annonce qu’il considère comme « révolutionnaire pour l’intelligence artificielle embarquée. » Le 25 février, Michel Rubino et son équipe ont ainsi dévoilé NanoEdge AI Studio, une solution logicielle, disponible en version d’essai ou en licences complètes, qui permet aux entreprises d’intégrer facilement, rapidement et à moindre coût des capacités de Machine Learning (apprentissage autonome, NDLR) complètes dans tous les objets du quotidien. « Il s’agit du tout premier environnement de développement permettant de rendre les objets conscients de leur état, grâce à une intelligence artificielle économe en énergie. »

L’annonce a été faite en simultané à Toulon, la ville de cœur de Cartesiam, à New York, où la start-up a ouvert sa première filiale en 2019 et au Salon Embedded World à Nuremberg en Allemagne, le salon mondial de l’électronique embarquée. Elle est le résultat de trois années de R & D et d’une première industrialisation réussie, d’un pari un peu fou de quatre entrepreneurs (Michel et Joël Rubino, François de Rochebouët et Marc Dupaquier), qui veulent hisser leur entreprise, Cartesiam, au rang de leader mondial de l’intelligence artificielle embarquée dans les objets…

Un pas de géant

Alors que les GAFA sont les maîtres de nos données personnelles, Cartesiam entend devenir le leader d’une nouvelle bataille, celle des données industrielles. « Aujourd’hui, les industriels n’ont pas envie d’envoyer leurs données sensibles dans le cloud, ils n’ont pas non plus la capacité de collecter des terra octets de données, ni de se payer les services d’un expert des mégadonnées (data scientist) pour analyser ces données et tout ceci sans aucune garantie de résultat. D’ailleurs, selon une étude, 74 % des projets d’objets connectés industriels n’aboutissent pas », précise Michel Rubino. Chez Cartesiam, l’équipe de R & D a donc décidé de se passer du cloud, de chercher les données au plus près des machines et de les analyser dans les microcontrôleurs, « le plus petit ordinateur qui existe, qui est présent partout, qui coûte un euro et qui se vend au rythme de 15 milliards par an, de 500 par seconde dans le monde. Et aujourd’hui, nous sommes les seuls à faire tourner notre moteur d’intelligence artificielle dans un microcontrôleur. » Ce logiciel, made in Toulon, permet à tout objet d’être conscient de son état, à l’image de l’aspirateur de la start-up que les ingénieurs ont équipé et qui aujourd’hui leur signale lorsque le sac est plein. Les applications sont innombrables : rien que dans nos voitures, il existe 100 à 500 microcontrôleurs.

L’internet des objets devient l’intelligence des objets

Cette innovation a notamment été financée par deux levées de fonds, en 2017 et 2018, d’un montant total cumulé de 3 millions d’euros et d’une preuve de concept, baptisée Bob, la première solution de maintenance prédictive pour l’industrie 4.0 que Cartesiam a mis au point avec Eolane (spécialiste des solutions électroniques et connectées, NDLR). Ce capteur, qui décèle les anomalies avant la panne, et l’arrêt de la production (souvent très coûteuse), a été « adopté par la plupart des entreprises industrielles du CAC 40, au premier rang desquelles Veolia et EDF, qui nous ont soutenues dès le départ. »

Le logiciel NanoEdge AI Studio, qui en découle, a déjà ses adeptes, notamment STMicroelectronics ou encore Naval Group venus témoigner leur intérêt. « Notre rapprochement avec Cartesiam nous a permis de développer les compétences de nos microcontrôleurs, notamment pour la détection d’anomalies et d’apporter ainsi une réponse aux besoins de nos clients », souligne Miguel Castro, directeur de l’IA chez STMicroelectronics. Pour Naval Group, l’innovation de Cartesiam « permet de capturer et d’analyser directement à la source les données générées par les équipements embarqués et de répondre aux nouveaux défis de la maintenance navale », ajoute Alain Beltrando, responsable digitalisation des Services chez Naval Group.

Concrètement, chaque industriel pourra sélectionner le type de signal (vibrations, courant électrique, champ magnétique, etc.), le type de microcontrôleur et le maximum d’espace mémoire alloué pour cette fonction de Machine Learning et NanoEdge AI Studio va alors automatiquement tester, optimiser et calculer la meilleure combinaison algorithmique parmi plus de 500 millions de combinaisons possibles pour fournir une librairie intégrable facilement dans le code de n’importe quel microcontrôleur.

2020, année de l’accélération

La technologie désormais dévoilée au monde, Cartesiam souhaite donner la possibilité à tous les industriels de réaliser rapidement leur propre « Bob ». « Nous avons mis deux ans et demi à créer Bob. Avec notre logiciel, nous pouvons sortir une librairie en quatre heures », se félicite Michel Rubino. De nombreux contacts ont été pris, des négociations commerciales sont déjà en cours et la start-up toulonnaise a déjà réussi le pari de faire parler d’elle : « Alors que de grands noms de l’industrie, comme Schneider Electric nous suivent dans cette aventure, l’annonce sur le salon Embedded World à Nuremberg a fait le buzz », confie Joël Rubino. De l’autre côté de l’Atlantique, Marc Dupaquier se réjouit de compter parmi « les start-up les plus innovantes de la planète, selon un certain nombre de médias ».

Pour soutenir cette nouvelle phase d’accélération, une filiale sera ouverte au cours du premier semestre 2020 en Allemagne et une nouvelle levée de fonds d’un montant de 7 millions d’euros pourrait être bouclée avant la fin de l’année. « Depuis notre création en 2016, nous doublons tous les ans notre activité. En termes d’effectifs, nous embauchons un ingénieur ou un docteur tous les trois mois et nous avons un plan d’embauche de 39 personnes pour 2020 : à Toulon pour la R & D mais aussi à Paris et New York pour la partie commerciale », détaille Michel Rubino.

La route semble donc toute tracée pour la start-up toulonnaise, qui a multiplié les récompenses en 2019. Le rapport annuel du cabinet américain d’analystes Gartner Group, « le guide Michelin du monde de l’électronique et de l’informatique, nous a classés parmi les trois entreprises les plus performantes au monde dans notre domaine, l’intelligence artificielle at the edge (embarquée, NDLR) ». Cartesiam a obtenu le prix de la technologie la plus innovante au congrès international des objets connectés de Barcelone. Elle a été la première start-up européenne à avoir été distinguée au Mems & Sensors executive Congress de San Diego, un salon de référence pour l’industrie mondiale des semi-conducteurs et a été nominée « Entreprise de l’année » dans la catégorie AI at the Edge par un cabinet de conseil américain, Front & Sullivan.

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