La start-up lavalloise Bluemooov veut créer une filière de vélos 100 % made in France. Pour atteindre ses ambitions, le fabricant de vélos-cargos et vélos électriques réalise une nouvelle levée de fonds. Elle s’élève à 1,5 million d’euros. "Le dernier volet sera clôturé en juin prochain. On a déjà sécurisé plus d’un million d’euros" indique le dirigeant et fondateur Emmanuel Paris.
Un consortium d’une vingtaine de partenaires
Si le fabricant mayennais porte la levée de fonds, il n’en sera pas le seul bénéficiaire. Le dirigeant de Bluemooov a en effet voulu créer un consortium réunissant une vingtaine d’acteurs différents, dont cinq autres fabricants de cycles, le pôle de compétitivité ID4Mobility ou encore Actia pour les batteries. "Nous sommes 5 personnes en équivalent temps plein chez Bluemooov (CA non communiqué, NDLR), et nous avons constaté depuis 2018 que nous ne pouvions pas créer une filière seuls", relate Emmanuel Paris.
Baptisé Mobee’blue, ce groupement d’entreprises est né du constat des limites de la résistance des vélos électriques. Or, le projet est de proposer des vélos-cargos lourds : si les casses sont récurrentes, le marché ne prendra pas, a conclu le dirigeant.
"Lorsqu’on observe les fourgons des livreurs en ville, on voit plus de chocs sur leur carrosserie et leurs équipements que sur les autres véhicules en général. C’est lié à l’utilisation des chauffeurs qui doivent passer partout pour pouvoir travailler. C’est la même chose pour les vélos-cargos qui sont soumis à une intensité d’utilisation plus élevée que d’autres vélos, pour laquelle les équipements de cycles ne sont jusqu’ici pas conçus", expose Emmanuel Paris.
Selon une étude menée par Bluemooov auprès de transporteurs équipés en mobilités douces, "45 % de leur parc vélos est immobilisé pour des besoins de réparation", indique Emmanuel Paris.
Standardiser la chaîne pour sortir 9000 unités en 2028
Bluemooov s’est donc alliée à des équipementiers automobiles pour renforcer les pièces de vélos. "On va avoir des composants automobiles allégés en poids et en fonctionnalité. On aura une chaîne pour le support de base, à l’instar de Stellantis qui équipe les mêmes châssis avec des carrosseries et des tableaux de bord différents", illustre Emmanuel Paris. Une industrialisation qui permettra de monter en productivité et de réduire les coûts.
Dans un premier temps, les cadres de vélos seront produits sur un site d’Arcelor dans l’Oise. "On estime que la plateforme pourra sortir une centaine d’unités par mois. Quand on atteindra les mille unités, sans doute au bout de dix-huit mois, on ramènera la production à Laval. On prévoit un millier d’unités la première année, puis on triple tous les ans pour sortir 9 000 unités en 2028", se projette Emmanuel Paris.
Cadres, roues, freinage assisté, capteurs, dérailleurs, application de gestion de flottes, sièges… Les partenaires du consortium participent en effet à la création d’une future plateforme mayennaise de montage de vélos-cargos, issus d’une filière 100 % française. Et que financera aussi la levée de fonds. Propriétaire de cette plateforme modulable, Bluemooov se rémunérera auprès des utilisateurs. Soit via un droit d’accès, soit un échange d’ingénierie ou encore via des royalties sur des équipements assemblés sur place.
L’approche française pour assurer qualité et RSE
Qu’importe selon Emmanuel Paris que des concurrents intègrent le consortium : "Cela augmentera les volumes à produire, donc réduira les coûts pour tous. Chacun se distinguera ensuite sur le marché en fonction de ses spécificités. Il y a la place : les dix grands acteurs français de la logistique représentent un marché d’environ 20 000 vélos par an", argue Emmanuel Paris.
Convaincu, le dirigeant de Bluemooov veut produire "local" pour réduire les coûts de transport et donc également le bilan carbone. En termes de RSE, le Made in France assure en outre de respecter des normes sociales inexistantes dans d’autres pays.
Un repositionnement depuis deux ans
Cette plateforme collective marque aussi un repositionnement commercial de Bluemooov en direction des transporteurs dits du "dernier kilomètre". "On veut d’abord développer l’activité en BtoB", indique désormais Emmanuel Paris.
La marque n’a en fait pas réussi à percée sur le marché des particuliers. La première levée de fonds réalisée par la start-up en 2022 a été un échec. "Nous visions un million d’euros, nous avons récolté 200 000 euros. Cela nous a quand même permis de ramener en France la production de la gamme actuelle" alors en Tunisie, retrace le fondateur de Bluemooov. Le site d’assemblage est désormais à Laval. Les objectifs tablaient sur le millier de ventes en 2024. "On sera plutôt autour des 200", confie le dirigeant. Et le modèle Cocoon, un vélo électrique avec habitacle lancé par le passé pour les particuliers notamment, laisse pour le moment la place aux vélos cargos.