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Après être parvenue à faire changer la réglementation, Viaco veut imposer son panneau de chantier connecté
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Après être parvenue à faire changer la réglementation, Viaco veut imposer son panneau de chantier connecté

Des obstacles juridiques entravent parfois la commercialisation d’une innovation. Voici comment Viaco, qui a inventé un système d’actualisation des panneaux de chantier par QR Code, a réussi à faire modifier la réglementation du Code du travail pour imposer son dispositif.

Saena Guillon, fondatrice de Viaco, a réussi à faire évoluer le Code du Travail pour donner une chance à son innovation de trouver son public. — Photo : Bruno Levy /LE MONITEUR

Start-up du groupe Once For All (170 salariés en France), qui anime et finance un réseau de jeunes pousses innovantes dans le secteur du BTP, la société lyonnaise Viaco (12 salariés) a inventé un système permettant de moderniser les traditionnels panneaux de chantier. La liste des différents intervenants (maître d’œuvre, maître d’ouvrage, entreprises du bâtiment, etc.) devient accessible via un simple QR Code apposé sur la pancarte. Sa solution web Totem autorise une mise à jour à distance de cette liste en perpétuelle évolution lors de la construction d’un bâtiment…

Rapidement, Viaco s’est néanmoins retrouvé face à un obstacle réglementaire de taille : le QR code n’est pas reconnu comme canal d’information par le Code du travail. Lisible par un simple scan, le petit carré noir et blanc a pourtant tout pour plaire sur le papier. "Le Code du travail impose des mises à jour qui peuvent concerner jusqu’à 50 intervenants sur la durée d’un chantier. C’était très archaïque et potentiellement dangereux de gérer physiquement ces panneaux : il faut monter une structure porteuse et positionner des autocollants parfois à 5 mètres de hauteur", résume Saena Guillon, directrice du développement d’OFA et fondatrice de Viaco en 2018.

Faire bouger la réglementation

Mise au point en 2019, l’idée du QR code simplifie le processus des multiples mises à jour en permettant de les réaliser à distance, sans manipulations. "Les maîtres d’œuvre peuvent diviser par deux le coût de la gestion des panneaux", ajoute-t-elle. Il présente second intérêt, celui de diviser par 3 ou 4 la taille des panneaux de chantier (20 000 par an) et donc de réduire les déchets en fin de construction. Enfin, en facilitant l’actualisation, il permet d’afficher des informations fiables, de lutter contre le travail dissimulé et d’éviter d’éventuelles verbalisations.

Alors pour donner une chance à sa solution de toucher son marché, la jeune pousse dépose, en 2019, un dossier en ligne auprès de France Expérimentation, un programme interministériel de soutien à l’innovation, qui accompagne des porteurs de projet en butte à des obstacles juridiques. L’idée est séduisante mais ne débouche pas toujours sur une happy end puisque seulement un dossier sur deux réussit à convaincre les instances ministérielles. "Dans un cas sur deux, nous apportons une solution pour lever les blocages des projets que nous accompagnons, soit en permettant le déroulement d’une expérimentation, soit en apportant une solution juridique. À ce jour, nous avons d’ores et déjà accompagné plus de 150 projets", déclarent Sébastien Malangeau et Olivier Hébrard, directeurs du programme France Expérimentation.

Lourdeurs administratives

"J’ai déposé un dossier en ligne en indiquant que je souhaitais une modification réglementaire. J’ai attendu pour avoir un premier rendez-vous avec le ministère du Travail. Au terme de plusieurs rencontres, j’ai finalement obtenu l’autorisation de mener des expérimentations dans le but d’obtenir des retours terrain positifs de notre innovation sans savoir si au bout du compte la loi serait modifiée", raconte Saena Guillon. Mais cette longue phase d’expérimentation ne permet pas de générer des revenus pour l’entreprise. En parallèle, la jeune dirigeante doit consentir à un "sacrifice" en se mettant au chômage pendant deux ans, une parenthèse qu’elle utilise pour développer une plateforme SaaS d’évaluation en ligne de la politique RSE des entreprises du BTP. De quoi financer la très longue procédure…

In fine, le dispositif lui permet de tester avec succès plus de 100 panneaux. "Nous avons dû nous armer de patience. Il a fallu près de 4 ans - dont un an d’immobilité lié à la crise sanitaire - pour que le QR code soit accepté comme outil d’actualisation des panneaux", raconte Saena Guillon. Le décret du 9 juin 2023 autorise enfin le remplacement des panneaux de chantier traditionnels par des pancartes connectées !

Bénéficier d’un écosystème de 130 000 entreprises du BTP

Sur la période 2019-2022, Viaco a "tenu" en réalisant une levée de fonds de 800 000 euros sous forme de capital et de prêts Bpifrance innovation. Depuis l’année dernière, Viaco a rejoint le groupe Once For All (Haute-Vienne), spécialiste des solutions de gestion des fournisseurs et de la conformité pour le secteur du BTP notamment grâce à la dématérialisation. Pour grandir, la jeune pousse peut compter sur l’écosystème de ce groupe, un réseau de 130 000 entreprises du bâtiment.

La société, qui veut se développer en France et à l’international, prévoit d’apposer son système de QR code sur environ 1 000 panneaux chantiers d’ici 2025. Déjà, Pierres et Territoires, Demathieu Bard et Lidl testent sa solution connectée.

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