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Tripapyrus met le cap sur le démantèlement de bateaux de plaisance
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Tripapyrus met le cap sur le démantèlement de bateaux de plaisance

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Le centre de recyclage de déchets Tripapyrus, Scop de 30 salariés basée à l’Aiguillon-sur-Vie, en Vendée, cherche régulièrement à s’engouffrer dans de nouveaux marchés. Le dernier en date, celui de la destruction de bateaux de plaisance, en fait la seule entreprise vendéenne agréée pour cette activité.

Paul Clément, président de Tripapyrus : "Nous ressortirons toutes les pièces du bateau qui pourront être réemployées et recyclées" — Photo : Cyril Raineau JDE

Quand il entend le mot « compliqué », Paul Clément lève la main. Voici, résumé en peu de mots, comment Tripapyrus Environnement, le centre de recyclage de déchets industriels qu’il préside, en est arrivé à se voir confier le démantèlement de bateaux de plaisance en fin de vie. Autrement dit, à démonter puis recycler ou revaloriser ce qui peut l’être des épaves.

Cette Scop située à l’Aiguillon-sur-Vie est la seule entreprise agréée par l’éco-organisme Aper (Association pour une plaisance eco-responsable) pour une telle activité sur le département de la Vendée. Et la deuxième seulement des Pays de la Loire, la première ayant obtenu le sésame étant Romy Recyclage, à Montoir-de-Bretagne.

Objectif : déconstruire de 100 à 200 bateaux chaque année

Ce marché constitue une niche pour cette Scop aux 2 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019, « autour de 5 % de l’activité », pronostique le responsable commercial Franck Elaudais. Pour Paul Clément, « le projet de Tripapyrus est de vivre sur la côte vendéenne, et développer la déconstruction de bateaux est dans cette optique une très belle corde à notre harpe ». D’autant qu’à quelques kilomètres, se situe le groupe Beneteau, le mastodonte de la construction de bateaux et plus gros employeur du Pays de Saint-Gilles-Croix-de-Vie.

Sur le département, où 20 500 bateaux de plaisance sont immatriculés, 9 500 sont considérés comme inutilisés et 3 500 hors d’usage, la plupart étant abandonnés dans les ports, les bases nautiques ou chez des particuliers. Tripapurys lorgnait depuis des années ce marché. Il lui a fallu attendre que la législation évolue et l’appel d’offres de l’Aper avant de décrocher le pompon. Objectif aujourd’hui pour la Scop, démanteler de 100 à 200 bateaux par an, d’une longueur maximale de 24 mètres.

La déconstruction consistera à les dépolluer, puis à en extraire les parties réutilisables. « Tout ce qui peut être recyclé le sera », résume Paul Clément. Le reste sera déchiqueté pour être traité. Les trois composantes principales des bateaux sont le métal et le bois (recyclables), et le polyester (ou composite). Pour cette dernière matière, « il n’existe pas encore de filière de recyclage, fait savoir Guillaume Arnauld des Lions, délégué général adjoint de la Fédération des industries nautiques. Pour 650 bateaux démontés dans les centres agréés en France, environ 60 % des composites ont pu être revalorisés pour produire de l’énergie. Les 40 autres % ont dû être enfouis. »

« Il faut faire tous les métiers du déchet pour se développer »

Revalorisation, recyclage, « pour se développer, il faut faire tous les métiers du déchet, pas uniquement du carton, résume Paul Clément, et il faut réagir vite et être innovant. » À cet égard, le centre de gestion des déchets de l'Aiguillon-sur-Vie dispose d’un poste dédié à la recherche et développement. La rentabilité est du reste le fruit d’une réorientation d’activité « vers les déchets des entreprises et les contrats privés, et via le pôle recherche et développement qui a permis de se tourner vers des secteurs spécialisés : tri innovant de plastiques, déconstruction de mobil-homes, démantèlement des huisseries… », se souvient le président de la Scop aux 25 années d’existence. La gestion de la fin de vie des mobil-homes est une grosse « corde de l’harpe » de Tripapyrus, pour reprendre le terme de Paul Clément : le département de la Vendée en est l’un des plus gros constructeurs et donc utilisateurs. Une autre rentrée financière pour la Scop.

Plus globalement, la Scop de l’ouest vendéen qui emploie 30 salariés dont 13 en insertion, traite 15 000 tonnes de déchets par an et dispose également de deux filiales : une d’affinage de plastique pour le recyclage et une recyclerie à destination des particuliers. Et toujours dans une optique d’encrage sur son territoire, la Scop s’occupe même de l’huile de friture des multiples campings alentour. Compliqué ? Paul Clément avait déjà, à l’époque, levé la main pour manifester son intérêt.


Nouvelle réglementation pour la fin de vie des bateaux

Jusqu’à un changement de législation en date du 1er janvier 2019, la déconstruction des bateaux était à la charge du plaisancier. Le coût du démontage (autour de 100 euros pour un petit dériveur, jusqu’à 3 000 euros pour les plus imposants) associé à celui du transport vers un centre de démantèlement les incitait davantage à les laisser à l’abandon qu’à songer à leur destruction.

« Depuis janvier 2019, une nouvelle réglementation est entrée en vigueur, résume Guillaume Arnauld des Lions, délégué général adjoint de la Fédération des industries nautiques et à ce titre représentant de l’Aper qui délivre les agréments. Les propriétaires n’ont plus rien à payer. La déconstruction est en grande partie payée par une éco-contribution versée par les constructeurs de bateau, alimentant ainsi un fonds. » C'est cette éco-contribution qui financera la destruction et in fine l'activité de Tripapyrus. Sur les 24 centres certifiés en France, un peu plus de 650 bateaux ont été détruits depuis septembre 2019. Et pour inciter les propriétaires à les envoyer à la casse, le Département de Vendée est la première collectivité de France à financer 80 % du coût de transport de l’épave de son lieu de stationnement à Tripapyrus.

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