Cela fait plus de dix ans que les Recycleurs Bretons se sont attaqués pour la première fois à la déconstruction d’un navire. C’était en 2011, quand l’entreprise dirigée par Pierre Rolland a été missionnée pour assurer le démantèlement du TK Bremen, un cargo qui s’était échoué sur la plage d’Erdeven, dans les Côtes-d’Armor. "Ce chantier nous a non seulement mis le pied à l’étrier des activités de déconstruction navale, mais il est surtout à l’origine de la création de notre filiale Navaleo, lancée en 2019 et qui emploie aujourd’hui 40 personnes à Brest", retrace Pierre Rolland, le dirigeant des Recycleurs Bretons (175 salariés, 38 M€ de CA en 2021).
340 bateaux de plaisance traités en 2021
Car après ce chantier de taille, les Recycleurs Bretons se sont ensuite attaqués à la déconstruction d’autres navires ventouses comme le Captain Tsarev, ou encore plus récemment de trois sous-marins diesel de la classe Agosta pour le compte de la Marine Nationale. Entre-temps, également, ils ont créé Navaléo, leur filiale de déconstruction de navires de plaisance, faisant de Brest l’un des quatre chantiers de déconstruction navale français. "Nous avons traité plus de 340 bateaux de plaisance en 2021, qui ont tous été recyclés ou valorisés à 70 %", souligne Pierre Rolland, qui a profité du One Ocean Summit qui se tient cette semaine à Brest pour militer pour un renforcement de la filière en organisant une conférence réunissant plusieurs spécialistes du sujet.
Les mêmes règles pour tous
"Brest a des atouts indéniables en la matière, que ce soit en termes de positionnement géographique aussi bien qu’en termes de moyens techniques, d’équipements, de personnels et de savoir-faire. L’une de nos missions est de toujours mieux comprendre les besoins des armateurs pour leur proposer des solutions innovantes et augmenter notre productivité en toute sécurité. Mais cela ne sera possible que si les normes en vigueur sont respectées", estime-t-il, faisant allusion à des chantiers bien moins regardants en matière de respect des travailleurs et de l’environnement, notamment en Turquie et en Asie. "Comment réduire nos écarts de compétitivité si nous ne jouons pas tous avec les mêmes règles ?", alerte-t-il.
Recrutements, développement durable et économie circulaire
Autre défi : le recrutement. "Nous croyons beaucoup à la formation interne et à la robotisation pour gagner en productivité tout en améliorant la qualité, mais les besoins en recrutement restent un défi primordial", explique celui qui prévoit d’embaucher 10 à 15 personnes supplémentaires par an sur les cinq prochaines années. "Il ne faut pas non plus oublier que la demande d’acier recyclé explose, et qu’au final, notre filière participe aussi à la réduction des émissions de CO2. L’histoire de la déconstruction navale française et européenne reste à écrire. Et pour ce faire, il faut que le monde maritime considère la déconstruction sous le prisme de l’économie circulaire, et que le monde industriel puisse continuer à monter en puissance tout en montant en qualité et en fiabilité".
