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Olivier Vérot, fondateur d'UF1 : « Comment j'ai été débarqué de mon entreprise »
Témoignage Loire # Mécanique

Olivier Vérot, fondateur d'UF1 : « Comment j'ai été débarqué de mon entreprise »

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Fondateur de l'expert stéphanois de l'usinage UF1, Olivier Vérot a ouvert en juin 2016 son capital à un groupe industriel chinois pour financer son développement. Mais l'aventure a tourné court aboutissant même à son licenciement en juin 2019.

— Photo : Gilles Cayuela

« J’ai créé UF1 en 1999 avec pour objectif d’apporter une réponse aux besoins des entreprises en matière d’usinage à grande vitesse avec un axe R & D et une partie industrialisation pour accompagner nos clients. L’entreprise a connu une croissance régulière entrecoupée de crises mais nous avons su nous relever et entamer en 2012 une phase importante de croissance. Pour la mener à bien, je devais investir dans le renouvellement de notre parc machines. J’avais besoin d’augmenter les fonds propres et les capitaux de la société et lorsque notre client chinois Achteck (groupe ZI) m’a proposé d’entrer au capital, j’ai entamé les discussions.

En juin 2016, après trois ans passés à définir une stratégie commune qui assure la pérennité d’UF1, les Chinois sont entrés au capital à hauteur de 80 %. De mon côté, j’ai conservé 20 % et la direction générale de l’entreprise, qui pesait alors un millions d'euros de chiffre d'affaires et employait 12 salariés. ZI, qui était à l’origine un groupe industriel spécialisé dans l’extraction de tungstène, avait fait le choix de la diversification verticale en allant avec Achteck jusqu’aux outils coupants. Ils avaient besoin de nos compétences en usinage pour développer des outils innovants. Le business plan que nous avions établi prévoyait donc qu’UF1 mette les moyens pour répondre aux besoins du groupe. Et en contrepartie, les Chinois finançaient nos investissements et s’engageaient à assurer 70 % de notre chiffre d’affaires qui devait atteindre 3 M€ en 2020.

Réorientation soudaine

Assez vite, je me suis rendu compte qu’ouvrir son capital aux Chinois, c’est compliqué ! Ils ne travaillent pas de la même manière que nous et n'ont pas la même relation aux banques. Notre actionnaire ne comprenait pas pourquoi la trésorerie devait rester stable et positive. Il gardait des factures sous le coude pendant six mois avant de les régler. Tant et si bien que notre trésorerie subissait de grandes variations. Certaines banques nous ont d’ailleurs lâchés avant de revenir plus tard vers nous.

Et puis, du jour au lendemain, ils ont décidé de réorienter leur production sur de la copie d’outils. On ne me l’a pas dit comme ça, on m’a simplement dit que nos objectifs de 70 % de CA allait être revu à la baisse. Sur le deuxième trimestre 2018, j’ai donc fait l’effort de faire progresser le chiffre d’affaires hors groupe de 25 % mais les commandes d’Achteck se sont quasiment arrêtées. J’ai alerté mon actionnaire sur la situation financière mais je n’ai reçu aucune réponse. J’ai simplement appris début mai 2019 que le PDG d’UF1 basé en Chine était débarqué.

Cet événement et la situation de la trésorerie ont conduit le commissaire aux comptes à déclencher une procédure d’alerte qui s’est arrêtée le 27 mai au matin suite à un virement de 200 000 €. Et puis, 8 jours avant notre assemblée générale du 4 juin, j’ai découvert que ma révocation était à l’ordre du jour. Ils m’ont reproché la non-application de la stratégie du groupe, mon soi-disant manque de communication et ma rémunération trop importante au regard du chiffre d’affaires. Rémunération qu’ils avaient pourtant validée lors de la rédaction du pacte d’associés et que je n’avais pas touché depuis… Bref, je me suis fait virer violemment de l’entreprise que j’ai fondée. Je possède toujours 20 % des parts mais je n’ai plus aucun pouvoir ».

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