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La bataille juridique autour d’Alpine Aluminium accélère
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La bataille juridique autour d’Alpine Aluminium accélère

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La vente d’Alpine Aluminium continue de faire des remous. Il y a une semaine, le tribunal de commerce d’Annecy a décidé d’annuler la cession de l’entreprise de métallurgie, au motif que les repreneurs n’avaient pas respecté leurs engagements. Mais l’avocat du principal repreneur a annoncé qu’il ferait appel.

Le site d’Alpine Aluminium à Cran Gevrier — Photo : Alpine Aluminum

C’est une décision rare prononcée par le Tribunal de commerce d’Annecy vendredi dernier : la reprise du site industriel d’Alpine Aluminium, à Cran-Gevrier en Haute-Savoie, par le groupe de Frank Supplisson, Industry, et par Alain Samson, de Samfi Invest, est annulée. Motif de cette annulation : les acquéreurs n’ont pas honoré leurs engagements concernant le maintien d’un certain nombre de salariés de l’entreprise. La vente d’Alpine Aluminium, alors en redressement judiciaire, avait pourtant été prononcée le 3 décembre 2019 par ce même tribunal de commerce d’Annecy. Les repreneurs, Samfi Invest et le groupe Industry s’étaient engagés à reprendre 49 des 85 salariés. Or, "le tribunal a constaté le maintien d’un seul salarié sur les 49 repris, et a considéré que l’engagement de création de 100 nouveaux emplois n’avait pas été tenu", note la procureure Line Bonnet dans un communiqué publié vendredi. "Les résolutions de plan de cession sont très rarement demandées, elles sanctionnent des manquements graves", souligne la procureure.

Autre engagement "balayé" par les repreneurs selon le parquet : la promesse de maintenir l’activité d’origine d’Alpine Aluminium. Un manquement à forte portée symbolique pour la région et ses habitants puisque l’entreprise de transformation de l’aluminium représentait le dernier grand site industriel historique en activité de l’agglomération d’Annecy, héritage direct des Forges de Crans, exploitées depuis le XVIIIe siècle. "Frank Supplisson a vendu tout le stock d’aluminium et les machines peu de temps après le rachat du site", explique pour sa part Thierry Billet, l’avocat des salariés, à l’origine de la plainte. Preuve selon lui que le repreneur d’entreprises en difficulté n’avait nullement l’intention de poursuivre l’activité du site industriel.

Une enquête au pénal visant Frank Supplisson est en cours

La bataille juridique ne fait que commencer : Samfi Invest a annoncé son intention de faire appel de la décision du tribunal de commerce d’Annecy. Selon l’avocat de Samfi Invest, Brice Lacoste, cité par France Bleu Savoie, "le groupe veut démontrer qu’il est capable de faire de ce lieu un site générateur d’emploi". Ce qui selon lui, passera forcément par la transformation de l’ancien site industriel et le développement d’activités annexes à l’aluminium, dont le secteur en France, est mal en point. Le projet de reconversion du site d’Alpine Aluminium serait également ralenti par un arrêté de la préfecture de Haute-Savoie, a sous-entendu Brice Lacoste. Cet arrêté est en vigueur depuis le mois de mai et interdit l’accès à certaines parties du site, considérées comme polluées. Il serait donc impossible de proposer ces parcelles à des entreprises qui voudraient venir s’installer, et ainsi de créer de l’emploi. La dépollution de la friche d’Alpine Aluminium est toujours en cours, une opération dans laquelle Samfi Invest aurait déjà dépensé près de huit millions d’euros, selon l’avocat du groupe, cité par France Bleu.

L’affaire n’a pas fini de faire parler d’elle. Au-delà de la décision d’annulation de tribunal de commerce le 30 septembre, une enquête au pénal pour escroquerie au jugement et abus de faiblesse visant Frank Supplisson est toujours en cours. Les investigations ont débuté à la fin de l’année 2020, suite à un signalement de l’avocat Thierry Billet. Ce dernier accuse Frank Supplisson d’avoir mis en place "un stratagème" pour se séparer de ses collaborateurs sans avoir "à payer l’amende prévue initialement et devoir en répondre devant le tribunal de commerce".

Des licenciements "négociés" dans un hôtel

Alors que 49 des 85 salariés d’Alpine Aluminium étaient repris en 2019, la justice avait fixé une pénalité de 12 500 euros pour chaque nouveau licenciement économique qui interviendrait dans les trois ans. Or selon l’avocat, ses clients ont été "convoqués par SMS un par un dans un hôtel d’Annecy pour essayer de les persuader " de toucher directement 12 500 euros tout en étant licenciés pour faute grave. Huit d’entre eux ont signé la transaction, deux autres ont refusé et font l’objet d’un licenciement économique sans que soient mises en œuvre" les mesures sociales prévues par la procédure", explique Thierry Billet. L’avocat des salariés attend désormais la décision du tribunal correctionnel. Frank Supplisson est également poursuivi depuis avril dernier, cette fois dans le cadre du rachat du groupe sidérurgique lorrain Ascométal en 2014.

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