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Homéopathie : Boiron dans l'incertitude
Lyon # Santé # Politique économique

Homéopathie : Boiron dans l'incertitude

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Alors que la Haute autorité de Santé s'apprête à communiquer au groupe lyonnais Boiron, ainsi qu'à Lehning et Weleda, son projet d'avis concernant l'éventualité du déremboursement des médicaments homéopathiques, sa directrice générale Valérie Poinsot, en poste depuis moins de six mois, fait face à l'une des plus importantes crises de l'histoire de Boiron.

— Photo : Boiron

La commission de la transparence de la Haute Autorité de Santé (HAS) est en passe d’achever son évaluation des médicaments homéopathiques, demandée en septembre 2018 par le ministère de la Santé. Si l’autorité publique indépendante doit rendre son avis définitif en juin, elle doit faire parvenir son projet d’avis aux trois entreprises françaises concernées par l’éventuel déremboursement des petits granules blanches : le lyonnais Boiron, la filiale alsacienne du suisse Weleda et le lorrain Lehning. Celles-ci disposeront alors de 10 jours pour formuler des observations écrites et/ou demander à être entendues par la HAS.

Tempête « systémique et non-structurelle »

À Messimy, dans le Rhône, siège du groupe Boiron, leader mondial des médicaments homéopathiques, les regards se tournent vers Valérie Poinsot-Lorentz, directrice générale déléguée de l’ETI depuis sept ans et successeur de Christian Boiron comme directrice générale depuis le 1er janvier 2019. « Vous ne transmettez pas la clé à quelqu’un qui vous ressemble, vous la transmettez à celui ou celle qui vous paraît être le plus compétent(e) », confiait Christian Boiron au Journal des Entreprises en mars 2017.

Celui qui est entré dans l’entreprise fondée par son père et son oncle avait, lui aussi, dû affronter, en 2003, un déremboursement partiel de l’homéopathie. Mais cette fois, l’éventualité d’un déremboursement total fait peser un risque majeur à l’entreprise. « Environ 60 % du chiffre d’affaires réalisé en France repose sur les produits remboursés. Ce sont quelque 1 000 salariés sur les 2 600 en France (3 600 au total) dont l’emploi serait fragilisé », fait savoir un porte-parole du groupe coté.

Érosion continue des ventes en France

Alors que l’entreprise a investi 100 M€ dans le doublement de sa production et l’ouverture d’un site logistique de 24 000 m² aux Olmes (Rhône), les médicaments homéopathiques font face, depuis un an, à des « attaques » sans précédent. Une première salve était partie le 19 mars 2018 avec une tribune signée par 124 professionnels de santé demandant l’arrêt du remboursement de cette pratique jugée « non-scientifique ». Le 24 mai 2018, la ministre de la Santé Agnès Buzyn déclarait au micro de France Inter : «Si [l’homéopathie] est utile, elle restera remboursée. Si elle est inutile, elle arrêtera de l’être. » Le 19 juin 2018, l’Ordre des médecins déclarait, lui, l’homéopathie « pratique non-éprouvée ».

Pour toute riposte de la part des acteurs de la filière « homéopathie » : des affiches placardées sur les devantures des pharmacies, des spots de publicité télévisuelle ou encore la pétition en ligne « MonHomeoMonChoix », qui récoltait, ce 16 mai, 423 000 signatures contre le déremboursement des médicaments homéopathiques.

Conséquence, malgré tout : une érosion continue des ventes en France. Déjà en baisse de 1,5 % au premier semestre 2018 (280,5 M€), les résultats ne se sont pas relevés par la suite. Le chiffre d’affaires 2018 s’établit à 604 M€ contre 617 M€ en 2017 soit une dégradation de 2,2 %. Et, au premier trimestre 2019, le niveau d’activité s’affiche à -10,8 % (-9,3 % en France). Alors que l’action atteignait 92,70 euros le 12 mai 2017, elle a chuté à 43,25 euros le 16 mai. En fin de journée, les laboratoires Boiron annonçaient suspendre la cotation du titre, remettant en cause la « régularité de la procédure d’évaluation en cours ».

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