CoopVenture : "Proposer un investissement durable et coopératif aux entreprises du numérique"
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Laurence Ruffin PDG d'Alma et présidente de CoopVenture "Proposer un investissement durable et coopératif aux entreprises du numérique"

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PDG de la Scop iséroise Alma, spécialisée dans les services numériques pour la santé et l’industrie, Laurence Ruffin prend la tête de CoopVenture, un nouveau fonds d’investissement initié par le Mouvement Scop et l'association French Tech in the Alps. Doté de 4,5 millions d’euros, il entend financer des entreprises du numérique régionales souhaitant se développer sur le territoire.

Laurence Ruffin, PDG d'Alma, préside le nouveau fonds CoopVenture qui vise à accompagner des entreprises du numérique dans leur développement à travers un financement durable — Photo : Edyta Tolwinska

Qu’est-ce que le fonds CoopVenture lancé par le Mouvement Scop, French Tech in the Alps et la Scop Alma, que vous présidez ?

Laurence Ruffin : Nous avons imaginé un fonds dit "patient", dans lequel l’apport financier sert un investissement durable et coopératif aux entreprises du numérique. Le principe est de laisser trois à quatre ans aux sociétés financées pour se développer afin qu’elles réinvestissent par la suite dans le fonds au rythme de leur croissance, sur sept ou huit ans. Nous sommes sur une notion de réinvestissement et non de remboursement puisque les sociétés accompagnées deviennent actionnaires du fonds. C’est un fonds "evergreen", qui s’autoalimente sur le principe de la solidarité.

À quelles entreprises s’adresse-t-il ? Pour quels tickets ?

L.R. : Nous partons sur des tickets de 300 000 euros maximum afin de permettre aux entreprises du numérique d’aller chercher, en plus de ces fonds propres, d’autres financements comme de l’emprunt bancaire par exemple. Nous pouvons intervenir aussi bien dans des entreprises coopératives que des entreprises classiques. Le mouvement coopératif se positionne comme le fer de lance d’une réflexion sur une économie nouvelle, plus large que les coopératives elles-mêmes. En revanche, ces entreprises doivent avoir une identité se rapprochant des Scop, comme le besoin d’associer les salariés, et ayant vocation à durer sur leur territoire.

Vous évoquez un "temps long" d’intervention du fonds. Est-il indispensable au maintien des entreprises sur les territoires ?

L.R. : Nous sommes sur un accompagnement global de 10 à 12 ans avec une évolution majeure puisque nous ne demandons pas à l’entreprise de rembourser mais de réinvestir. Ce système n’est pas contraignant dans la mesure où si une entreprise devait être revendue pour se développer, nous ne l’empêcherions pas. En revanche, il n’y a pas cette obligation de revente que l’on a dans le capital-risque.

Le financement en capital-risque n’était pas adapté ?

L.R. : Aujourd’hui, il n’existe pas de fonds dédiés aux entreprises du numérique qui souhaitent se développer durablement sur leur territoire, sans passer par une revente de leur société. Le modèle des fonds de capital-risque est fondé sur la revente des entreprises en bonne forme afin de couvrir leur taux d’échec. Pour pallier ce manque, nous proposons une solution dédiée aux entrepreneurs en quête de sens, tout en permettant de maintenir un savoir-faire sur les territoires. Aujourd’hui un certain nombre d’entreprises sont revendues avec le risque que les savoir-faire partent à l’étranger. Il y a une prise de conscience et une volonté d’inverser la tendance de la part des entrepreneurs mais aussi des collectivités, comme Grenoble Alpes-Métropole et la communauté de communes du Grésivaudan.

Cet objectif est-il un moyen de ramener des entreprises vers le mouvement coopératif ?

L.R. : Si nous n’adressions que les Scop, ce fonds serait excluant. Cela peut être vu comme une première étape vers les valeurs du mouvement coopératif. Le fonds CoopVenture se rapproche de ce que le mouvement coopératif a lancé il y a une dizaine d’années avec le fonds Transméa, dédié à la transmission d’entreprises aux salariés.

Ce mélange entre mouvement coopératif et French tech est-il relativement atypique ?

L.R. : Effectivement, nous sommes à la rencontre de deux mondes, celui du modèle coopératif et celui de la French Tech. L’idée a d’abord été testée auprès d’entrepreneurs. Une trentaine de candidatures nous sont déjà parvenues. Ensuite, on s’est interrogé sur la manière de rendre viable un fonds sans inciter à la revente et sans recourir à des subventions. Enfin, la troisième étape a été d’aller chercher des investisseurs, notamment des collectivités mais aussi des acteurs privés comme la holding financière des Scop Socoden, le Crédit Coopératif et les Scop Alma (Laurence Ruffin en est la PDG depuis 2009, NDLR), Groupe Up ou le groupe nazairien Idea.

De combien sera doté le fonds ?

L.R. : Nous démarrons avec 4,5 millions d'euros afin d’accompagner de manière expérimentale pendant dix-huit mois des sociétés de Grenoble et de la région Auvergne Rhône-Alpes. Nous commençons également à travailler sur le déploiement au niveau national en cherchant des structures d’accompagnement. Localement, nous nous appuyons sur le réseau de l'Union régionale des Scop et la French Tech in the Alps pour accompagner les sociétés financées. Notre objectif est de parvenir à lever 16 millions d’euros à l’échelle nationale en 2022.

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