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Ultra Premium Direct attaque le marché de la croquette sans intermédiaire
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Ultra Premium Direct attaque le marché de la croquette sans intermédiaire

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La marque d’aliments pour chiens et chats Ultra Premium Direct, vendue en direct de son usine aux consommateurs, poursuit sa croissance aux côtés de la société d’investissement française Eurazeo. Depuis Agen dans le Lot-et-Garonne, l’entreprise créée en 2014 par Matthieu et Sophie Wincker, prépare son déploiement à l’étranger et l’ouverture de ses magasins en propres en France.

Matthieu et Sophie Wincker, créateurs et dirigeants d’Ultra Premium Direct, spécialiste de la petfood, basé à Agen — Photo : Anne Cesbron

Matthieu Wincker a eu du flair. Le marché de l’alimentation premium pour animaux n’est plus une niche, au contraire. Le secteur se porte bien, avec une croissance de l’ordre de 4 % par an en France. Une tendance d’autant plus forte pour l’agenais Natura Plus Ultra Pet Food, et sa marque Ultra Premium Direct, qui évolue sur le segment du premium accessible. "Personne ne s’est lancé sur notre modèle en direct consommateur en tant que fabricant. Nous sommes positionnés sur un canal de distribution qui pèse déjà un tiers du secteur de l'alimentation pour animaux de compagnie - ou petfood - premium sur internet, qui progresse beaucoup plus vite que le reste du marché, soit de 15 à 20 % par an", indique le dirigeant selon qui, dans 4 à 5 ans, la moitié des ventes de ce segment s’effectuera en ligne.

Selon ces prévisions, la marque agenaise pourrait dès 2025 mordre les mollets du géant américain Mars en se hissant derrière sa filiale, le numéro un de la croquette Royal Canin France, basé à Aimargues dans le Gard.

Le succès sans céréales

Ces quatre dernières années, Ultra Premium Direct a vu son chiffre d’affaires passer de 5 millions d'euros à 46 millions d’euros en 2022 (31 en 2021). Hébergée initialement dans la pépinière de l’agropole d’Agen à Estillac, l’entreprise désormais installée à quelques foulées de là dispose d’une usine de 8 000 m2 dédiés à la transformation, du mélange à l’enrobage en passant par l’ensachage des croquettes. Les effectifs s’établissent à 112 collaborateurs et 50 recrutements sont prévus en 2022.

Cette accélération, saluée par l’obtention en 2021 et 2022 du label et du programme French Tech 120, est celle du succès des recettes de la marque, basées notamment sur des formulations sans céréales. "En voulant être un des pionniers du sans céréales, au moins du low grain (faible en céréales, NDLR), il s’agissait de proposer une qualité qui corresponde au régime alimentaire naturel des chiens et des chats", assure ce passionné des petits compagnons à quatre pattes, qui rappelle s’être tourné vers des produits d’importation nord-américains pour l’un de ses chiens développant une allergie alimentaire.

De cette expérience est née l’entreprise Natura Plus Ultra Pet Food, qui entend bien continuer à innover, à l’image du lancement en cours de nouvelles croquettes "protein boost" qui intègrent des morceaux de poulet ou de truite crus et séchés à froid. Douze nouvelles références sont annoncées en 2022.

Commercialement, la PME lot-et-garonnaise s’enorgueillit également d’être précurseur sur les formules d’abonnement pour l’alimentation des animaux de compagnie, ainsi qu’en matière de livraison à domicile ou au bureau. La moitié des ventes sont réalisées sur abonnement. "Ces formules ont été inventées dès 2014 et ont connu un succès immédiat. Nous sommes le deuxième site en alimentation animale en termes de chiffre d’affaires, en France, quand le premier distribue environ 160 marques. Nous ne distribuons que notre marque, et nous considérons qu’Ultra Premium Direct est la première marque vendue sur internet en France", se félicite le dirigeant désormais engagé sur les fronts de l’international et de l’ouverture de points de vente intégrés.

L’entrée d’Eurazeo pour accélérer

Ces ambitions ont amené la scale-up à un premier tour de table en avril 2018 ; Ultra Premium Direct confiait alors une minorité du capital à Eutopia, fonds de capital-risque en phase de démarrage, contre 7 millions d’euros. "Nous avions commencé par travailler sur nos fonds propres. L’idée initiale était bien de créer une société pérenne, profitable, capable de gérer ses investissements, qui ne dépende pas de levée de fonds. Cependant, c’est très difficile quand vous devez investir à la fois dans les moyens de production, dans les recrutements, dans la publicité. Il faut faire des arbitrages. D’autant plus qu’il faut montrer une profitabilité aux banques, qui ne prêtent pas facilement en France aux jeunes entreprises", rappelle le président.

En 2021 une levée de 68 millions d’euros fait basculer l’actionnariat. Les époux Matthieu et Sophie Wincker cèdent alors le contrôle au nouvel actionnaire majoritaire, la société d’investissement française Eurazeo. Les cofondateurs conservent plus d’un tiers du capital. Parmi les objectifs de ce partenariat, il s’agit de doubler la capacité de production de l’usine agenaise pour dépasser les 100 millions d’euros de chiffre d’affaires. "En termes de gouvernance cela ne change rien. C’est un choix qui donne plus de moyens pour la marque. Ce qui nous intéresse le plus c’est son développement, son implantation à Agen et sa pérennité dans cette région. Cet investisseur va nous apporter du support, nous aider et nous challenger aussi", assure Matthieu Wincker.

Dix magasins par an

L’accompagnement d’Eurazeo doit aussi soutenir l’extension du parc de boutiques physiques sur le modèle des deux premiers points de ventes ouverts à Montauban et Pau Lescar. "À partir de 2023, nous projetons d’ouvrir une dizaine de magasins en propre par an en France. Nos boutiques pilotes de Montauban et Pau nous permettent de tester deux emplacements : l’un sur un retail parc, le deuxième qui correspond à un lieu mixte avec une entrée sur un parking et une entrée dans la galerie du centre commercial. Quel que soit l’emplacement choisi, nous ne nous appuierons jamais sur des revendeurs ni des franchises ", insiste le dirigeant. "Nous souhaitons garder le contrôle et la maîtrise de l’ensemble de notre chaîne de distribution. Cette proximité avec le client permet de lui apporter le conseil le plus abouti, le plus personnalisé par des collaborateurs que nous formons à la nutrition et que nous recrutons pour leur passion pour l’animal", poursuit-il.

Des coûts de revient qui bondissent

Poser une patte à l’international, Ultra Premium Direct l’assure : le projet est déjà lancé en Italie depuis une base logistique proche de Milan. "Ce premier déploiement doit démarrer de façon très significative, plus rapidement que ce qu’on a pu faire en France en 2014", prévient Matthieu Wincker. Une équipe de quatre personnes a été créée, un service client en italien, en appui. Une entité allemande pourrait voir le jour en 2023.

S’il y a un os, c’est bien la menace que fait peser l’inflation. "Tout le monde fait un effort sur les marges pour proposer un produit qui sorte à un prix encore acceptable. Avec le démarrage de la guerre en Ukraine, l’ensemble des matières premières a pris entre 30 et 60 % d’augmentation, sans parler des carburants. Nous avons essayé de contenir cette hausse à 10 %, mais aujourd’hui produire une croquette coûte de 30 à 35 % de plus qu’il y a 12 mois", témoigne le dirigeant qui a revu la structure des prix en avril.

À quelque chose malheur est bon, dit le proverbe. Ce contexte conforterait le modèle des époux Wincker, bien décidés à s’affranchir des réseaux de distribution classiques.

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