Meurthe-et-Moselle
Novacarb et Solvay ont identifié une solution technique leur permettant de réduire leurs rejets salins
Meurthe-et-Moselle # Industries extractives # Innovation

Novacarb et Solvay ont identifié une solution technique leur permettant de réduire leurs rejets salins

S'abonner

Testée au sein du laboratoire Cetaqua de l’Université polytechnique de Catalogne, à Barcelone, une solution technique permettant déjà de réduire les rejets salins des soudières lorraines va être optimisée au cours de l’année 2024. Avec un objectif : déployer un système de traitement d’ici à 2027.

La solution par "filtration membranaire" permettrait déjà d’abaisser de 15 % les rejets salins des soudières lorraines — Photo : Jean-François Michel

C’est un petit pas sur un long chemin. Engagées avec l’État, la Région Grand Est et l’Agence de l’eau Rhin-Meuse dans un protocole d’accord visant à réduire leurs rejets salins dans la Meurthe, les soudières de Solvay, Dombasle, et de Novacarb, à Laneuveville-devant-Nancy, viennent d’identifier une solution prometteuse.

La piste de la "filtration membranaire"

Pendant six mois, en 2023, au sein du laboratoire Cetaqua de l’Université polytechnique de Catalogne, à Barcelone, une technologie par "filtration membranaire" a été testée. Résultat : une réduction des rejets de chlorures de l’ordre de 15 %. "Concrètement, la solution retenue consiste à pousser, grâce à des pompes, les saumures issues du procédé de fabrication à travers un filtre dont les trous font de l’ordre du milliardième de mètre", détaille Dominique Horbez, directeur de recherche chez Solvay.

Optimiser pour mieux filtrer et recycler

Derrière, deux résidus sont récupérés : des chlorures de sodium et des chlorures de calcium. "Actuellement, le modèle de laboratoire que nous avons fait tourner nous permet de récupérer entre 30 % et 60 % du chlorure de sodium, qu’il est ensuite possible de réinjecter dans le process de fabrication du carbonate", décrit Nicolas Van der Heyden, le directeur de Solvay, à Dombasle.

Deux soudières sur le bassin salifère

Depuis la fin de XIXe siècle, les sociétés Novacarb et Solvay exploitent des installations de production de carbonate de sodium et de bicarbonate, les soudières. Le site lorrain est stratégique pour les deux sociétés, puisque situé en plein bassin salifère : le procédé utilisé par les deux entreprises nécessite de la saumure, soit un mélange d’eau et de sel, et du calcaire, matière première venant de carrières exploitées dans la Meuse, à quelques dizaines de kilomètres. Reste que la synthèse du carbonate de calcium produit du chlorure de calcium, sous-produit non valorisable qui est rejeté dans la Meurthe. "Le cadre réglementaire est très bien défini, et nous le respectons", souligne Nicolas Van der Heyden.

Une eau impropre à la consommation humaine

Principale conséquence de la situation actuelle : l’eau de la Moselle, dans laquelle se jette la Meurthe, dépasse la concentration de 250 mg par litre de chlorure de sodium, la rendant impropre à la consommation humaine. La métropole de Metz va donc chercher son eau potable dans le bassin du Rupt-de-Mad. "Maintenant, au cours d’une nouvelle campagne de tests, pendant l’année 2024, nous voulons atteindre les 100 % de recyclage sur le chlorure de sodium, que nous pourrons réinjecter dans notre procédé, diminuant d’autant le besoin en sel venant du bassin", fixe Nicolas Van der Heyden.

Une nouvelle campagne de tests à 400 000 €

Lancée avec un budget de 400 000 €, réparti à parts égales entre les partenaires publics et les soudières, la première campagne de tests sera donc suivie d’une deuxième, qui va encore une fois nécessiter de mettre 400 000 € sur la table. "Ces nouveaux tests vont aussi nous permettre d’optimiser ce procédé, pour réduire encore nos rejets", souligne Marc Léonard, responsable du site de Novacarb.

"Chaque pas est décisif" vers la réduction des rejets

Car aussi prometteuse qu’elle soit, la solution technique identifiée n’est pas miraculeuse. Actuellement, les chlorures mesurés dans la nappe d’accompagnement de la Moselle, à Hauconcourt, peuvent atteindre des concentrations comprises entre 450 et 500 mg par litre. L’objectif, fixé en janvier 2022, est de redescendre à une concentration de 250 mg par litre. "Nous visons donc une réduction de 200 mg par litre", précise Nicolas Van der Heyden. "La solution déjà identifiée nous permet de descendre de 60 mg par litre." Un niveau de réduction qui semble modeste, mais qui est finalement très encourageant : "Chaque pas est décisif", insiste Marc Hoeltzel, directeur général de l’Agence de l’eau Rhin-Meuse. "L’enjeu, c’est bien la reconquête de la potabilité de l’eau. Et il est possible que 30 % de réduction des rejets permettent d’atteindre l’objectif." Tout juste sortie du laboratoire, pas encore au stade du pilote industriel, la solution par "filtration membranaire" n’a donc pas encore été projetée à la dimension industrielle : "Il est trop tôt", tranche Marc Léonard.

Meurthe-et-Moselle # Industries extractives # Innovation