Redonner un nouveau souffle aux petites exploitations forestières, détenues par des particuliers qui ne s’en occupent pas. C’est tout l’enjeu de la société nantaise Neosylva, fondée en 2018. Après cinq ans d’existence, la société peut se targuer d’avoir noué des contrats avec des particuliers propriétaires de petits terrains forestiers, pour un total de 1 000 hectares. "Nos clients, en majeure partie présents dans le grand Ouest, n’ont rien à débourser. Nous nous occupons de la gestion forestière du terrain, et partageons ensuite les recettes issues de la vente du bois", explique Jean-Guénolé Cornet, ingénieur forestier et fondateur de l’entreprise. Mais ce modèle économique, qui induit un flux de trésorerie déficitaire pour les 15 prochaines années, nécessite des fonds pour amorcer les travaux forestiers. La société de dix salariés vient donc de lever cinq millions d’euros, apportés à 90 % par ses actionnaires historiques La Banque des Territoires, Everwood (société spécialisée dans la gestion d'actifs forestiers), et des entrepreneurs du grand Ouest liés à la transformation du bois et dans la transition écologique. La Banque des territoire et Everwood détiennent dorénavant un tiers du capital, le reste étant réparti parmi les entrepreneurs. "La levée de fonds a seulement été ouverte à deux personnes entrantes, spécialisées dans l'exploitation forestière, et l'autre dans l'économie du bois et de la construction", ajoute Jean-Guénolé Cornet.
Une logique patrimoniale
Neosylva cible seulement les petits terrains, entre 1 et 25 hectares. "Actuellement, 40 % des forêts françaises sont en danger face au changement climatique. Les grandes parcelles forestières sont généralement bien préservées, et exploitées. À l’inverse, les particuliers qui possèdent de petites surfaces, soit un français sur vingt, n’ont pas envie d’y investir eux-mêmes pour l’entretien. Or, ils restent souvent attachés à leur parcelle familiale et ne veulent pas vendre. C’est parfois la patate chaude de l’héritage", témoigne Jean-Guénolé Cornet. De plus, la population est de plus en plus urbaine, et donc éloignée de leur parcelle dont il devient difficile de s’occuper. "L’idée pour ces propriétaires reste de transmettre un bien qui a de la valeur. Dans cette logique patrimoniale, nous leur proposons de nouer ensemble un contrat notarial qui perdure au-delà du propriétaire. Nous investissons auprès d’un gestionnaire forestier, puis dans la réalisation des travaux décidés en concertation". En moyenne, un tiers des surfaces en bon état est gardé sur pied, et les deux autres tiers, souvent à l’abandon depuis longtemps, sont coupés pour établir de nouvelles essences : pins, résineux, chênes, peupliers, etc. "Nous avons déjà planté 250 000 arbres", ajoute le dirigeant. La société s’occupe ensuite de l’entretien et de la revente du bois issu de ces terrains.
Un retour sur investissement à 40 ans
Avec cette nouvelle levée de fonds, l’entreprise envisage de passer à 3 000 hectares en 2025, puis 100 000 hectares d’ici une quinzaine d’années. "Tous ces hectares ne sont pas exploités pour la production de bois. Certains sont gardés pour leur valeur environnementale. Cela se discute avec le gestionnaire forestier, indépendant de Neosylva. Aujourd’hui, nos premiers clients satisfaits commencent à en parler autour d’eux et nous voyons le début d’une croissance liée aux bouches à oreilles", remarque le dirigeant. Néanmoins, les actionnaires devront patienter pour décrocher les fruits de leurs investissements. "Le temps de pouvoir exploiter les arbres plantés, le retour sur les investissements actuels ne se fera pas avant 30, voire 40 ans".