Mayenne
Malgré les coups durs, Cofidur EMS se connecte sur la croissance
Mayenne # Industrie # International

Malgré les coups durs, Cofidur EMS se connecte sur la croissance

S'abonner

À Laval, Cofidur EMS vient d’obtenir un contrat avec Alcatel-Lucent Entreprise, qui relocalise l’assemblage de ses centraux téléphoniques. Le sous-traitant électronique mayennais mise sur des marchés porteurs pour poursuivre sa croissance. Pour le site, cela apparaît comme une belle histoire après les périodes plus sombres de désindustrialisation.

Les cartes électroniques fabriquées par Cofidur EMS équipent notamment des bornes de jeux (en l'occurrence ici, pour le PMU) — Photo : Rémi Hagel

Le 26 mars 2023 à Laval (Mayenne), l’usine Cofidur EMS a pris feu. L’incendie a détruit 500 m2 de bâtiments, avec du stock et du matériel. D’autres machines à proximité ont été souillées. Les salariés du site lavallois (240 salariés en CDI et 40 intérimaires) ont été mis en chômage partiel pendant trois jours, le temps de s’assurer du respect de la sécurité et des conditions de travail des personnes. L’usine s’étend sur 30 000 m2 de locaux et seuls 500 m2 du bâtiment annexe (et non le bâtiment principal) ont été détruits. L’activité concernée était dédiée à un unique client. Elle va pouvoir redémarrer fin avril, sur d’autres machines. Quant au bâtiment et au matériel endommagés, leur remise en route "demandera des mois", souffle Gilles Delaunay, DRH et dirigeant associé du groupe. Les pertes sont estimées en millions d’euros, "mais il est trop tôt pour l’évaluer précisément".

Des recrutements attendus

Quoique grave, cet incident "ne freinera pas nos projets", assure Laurent Dupoiron, président de Cofidur. Le groupe, qui compte également une usine à Périgueux avec 150 salariés, a réalisé un chiffre d’affaires de 55,8 millions d’euros en 2022 et porte l’ambition d’atteindre 80 millions d’euros en 2025. Dès 2023, l’industriel espère recruter au moins 30 CDI, dont une partie issue de son vivier d’intérimaires.

Jean-François Paressant, directeur du site lavallois, Gilles Delaunay, directeur des ressources humaines, et Laurent Dupoiron, PDG de Cofidur, ont repris le groupe avec quatre autres cadres, en 2021 — Photo : Rémi Hagel

Pour réaliser cette croissance, Cofidur EMS va s’appuyer sur de nouveaux marchés et le développement de marchés existants. La société fabrique des cartes électroniques pour des usages professionnels (c’est-à-dire autres que pour des produits de grande consommation) : on les trouve dans des avions, de l’éclairage public, des parcmètres, des terminaux de jeux de hasard, etc. Les débouchés dits "industriels" représentent les deux tiers de l’activité ; le ferroviaire, l’armement et l’aéronautique en représentent un quart, l’éclairage (lighting) 14 %. Quelque 1,8 million de cartes électroniques sont produites chaque année.

L’entreprise fournit le secteur ferroviaire, pour lequel elle envisage un développement avec de nouveaux clients ou des clients existants. "Nous y travaillons, notamment en obtenant des certifications. La dernière en date est l’Iris (International Railway Industry Standard)", précise Gilles Delaunay. "D’autres sujets peuvent arriver prochainement, en particulier dans le domaine de l’armement, ajoute Laurent Dupoiron. Des budgets (pour les armées, NDLR) ont été votés récemment". Cofidur EMS étant déjà fournisseur de la Défense, le dirigeant espère profiter de ce vent porteur.

Le retour d’Alcatel

Avant ces promesses, un marché plus concret a été décroché officiellement le 10 mars 2023 avec Alcatel-Lucent Enterprise (ALE) : Cofidur EMS se voit confier l’assemblage et l’intégration de l’ensemble des centraux téléphoniques pour le monde d’ALE, jusqu’à présent sous-traités à l’américain Flextronics en Roumanie. L’entreprise prévoit d’en produire environ 20 000 par an. Ces centraux téléphoniques, dits PABX, permettant la gestion centralisée des communications d’une entreprise, sont fabriqués à la commande, puisque configurés en fonction des besoins du client. Les télécoms ne représentent aujourd’hui que 5 % de l’activité de Cofidur EMS. Cette relocalisation va permettre de gonfler ce segment.

"Notre collaboration avec Alcatel-Lucent Entreprise illustre cette capacité de fabriquer en France", commentait Laurent Dupoiron, lors de la signature du contrat. ALE se targue d'être le seul fournisseur européen à développer et délivrer des solutions de télécommunication d'entreprises. Propriété du fonds d'investissement chinois Huaxin, mais basé en région parisienne, ALE compte 2 000 employés, dont 1 000 en France. Cofidur EMS va recruter quinze à vingt personnes à Laval spécialement pour répondre à cette nouvelle activité. Son démarrage prochain demande au préalable quelques nouveaux investissements en logiciels et postes de travail. "Moi qui ai commencé ma carrière dans une usine de centraux téléphoniques chez Thomson, je vais en refaire 35 ans après", sourit Laurent Dupoiron.

La diversification restera modeste, mais va apporter sa pierre à la croissance, et apparaît surtout pour les Mayennais comme une revanche symbolique sur le passé chamboulé du site. Celui-ci était à l'origine une usine d'Alcatel, de 1995 à 2001. "À l'époque, il y avait 1 500 personnes ici, pour fabriquer des téléphones portables", raconte Laurent Dupoiron. L'usine a connu ensuite de nombreux soubresauts. Elle a été revendue à l'américain Flextronics, qui a fini par délocaliser en Asie et fermer le site le 31 décembre 2005. C'est alors que Cofidur EMS, qui était installé dans d'anciens locaux de Thomson à l'autre bout de la ville, l'a racheté, reprenant 95 personnes (sur environ 500).

Ces 95 salariés sont restés sur place, et les 300 de Cofidur EMS les ont alors rejoints, ainsi que 25 collaborateurs d'EMS Thalès (issus de Thomson). Le groupe Cofidur a été créé en 1991 en région parisienne par Christian Durat, s'appuyant sur sa première entreprise, Cirelec née à la fin des années soixante et fabriquait des circuits imprimés. En 2021, les dirigeants historiques de Cofidur, d'anciens cadres qui avait gardé la main après le décès de Christian Durat, sont partis en retraite. "Ils souhaitaient transmettre, et non vendre". C'est ainsi que s'est opéré un changement de gouvernance : les sept cadres dirigeants opérationnels du groupe, dont Laurent Dupoiron et Gilles Delaunay, l'ont racheté. Ils détiennent 49,8 % des parts, l'entreprise étant cotée en Bourse depuis 1996. "On garde le contrôle, malgré tout", précisent-ils.

Un million d’euros investis chaque année

Dans le projet Ambitions 2025 de la nouvelle équipe, la croissance externe à moyen terme "fait partie de la stratégie", confirme Laurent Dupoiron, sans en dévoiler plus à ce stade.

Pour son activité, le groupe s’appuie sur Cofitel, un partenaire qui emploie 85 personnes en Tunisie. Pour autant, Cofidur EMS ne porte pas d’objectifs particuliers de développement à l’international. "Nous avons quelques clients en Suisse, en Allemagne et en Belgique, mais nos clients sont essentiellement Français. Cela dit, ces clients livrent partout dans le monde".

Cartes électroniques produites par Cofidur EMS — Photo : Rémi Hagel

Le groupe maintient un investissement régulier de plus d’un million d’euros par an dans ses sites. "Nous suivons trois axes, décrit le président. Nous renouvelons nos équipements, pour assurer un niveau de production. Ensuite, nous déployons la digitalisation des process, l’industrie 4.0. Enfin, nous modernisons les infrastructures. Nous avons des projets de rénovation des bâtiments, à Périgueux à court terme et à Laval à moyen terme. Nous allons aussi installer des ombrières photovoltaïques, pour de l’autoconsommation. L’électricité solaire produite couvrira environ 20 % de nos besoins. Les travaux ont démarré à Périgueux et devraient commencer à la fin 2023-début 2024 ici", expose Laurent Dupoiron.

Mayenne # Industrie # Électronique # Télécoms # International
Fiche entreprise
Retrouvez toutes les informations sur l’entreprise COFIDUR EMS