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Le groupe de BTP Rabot Dutilleul investit pour accélérer sa transition écologique
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Le groupe de BTP Rabot Dutilleul investit pour accélérer sa transition écologique

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Le groupe de BTP nordiste Rabot Dutilleul a souscrit un emprunt obligataire de 6 millions d’euros auprès de fonds régionaux pour accélérer la transition écologique de ses activités. S'il revendique un engagement de longue date, il l'amplifie avec de nouveaux matériaux et de nouvelles méthodes de travail.

Rabot Dutilleul s’est vu confier la construction du nouveau siège de l'enseigne d'habillement nordiste Kiabi, à Lezennes — Photo : Fabien Cocatrix

Alors que le BTP est l’un des secteurs économiques dont l’empreinte carbone est la plus désastreuse, les grands acteurs s’emparent du sujet. C’est le cas du constructeur nordiste Rabot Dutilleul (900 collaborateurs, 300 M€ de chiffre d'affaires en 2021), basé à Marcq-en-Barœul, qui a souscrit en juin 2022 un prêt obligataire de 6 millions d’euros pour renforcer ses fonds propres, en vue des transformations qui l’attendent.

L’opération a été menée auprès d’un consortium d’investisseurs régionaux composé de Rev3 Capital (Nord Capital Partenaires), Reboost (Siparex), Finorpa et Nord Croissance (IRD). Remboursable d’ici cinq à sept ans, cette somme va permettre à Rabot Dutilleul d’accélérer sur plusieurs sujets stratégiques. "Nous souscrivons entièrement à la démarche Rev3. En tant qu’entreprise régionale familiale, centenaire, nous avons contribué à construire le territoire, et nous comptons l’accompagner dans sa transition écologique", martèle François Dutilleul, le PDG de l'entreprise fondée en 1920, dont les activités se répartissent aujourd'hui entre le résidentiel (36 % du chiffre d'affaires), l'immobilier d'entreprise (24 %), et les bâtiments publics d'enseignement, de santé ou fonctionnels (44 %).

Reprise de l’investissement

Pour Rabot Dutilleul, c'est une reprise de l’investissement, après la période délicate du Covid. Soumis à de fortes turbulences, le groupe a dû se résoudre en 2020 à se séparer de l’un de ses fleurons, sa filiale Nacarat (288 M€ de CA 2021, 212 collaborateurs), spécialisée dans la promotion immobilière. Si la cession au groupe Tisserin a permis de renflouer la trésorerie de la maison-mère, cette dernière a vu son périmètre fortement réduit par l’opération. En 2019, le groupe réalisait 575 millions d'euros de chiffre d'affaires, pour 1 500 collaborateurs. Ramené à 300 millions d’euros en 2021, il devrait atteindre les 350 millions d’euros cette année, pour 900 collaborateurs.

Pour François Dutilleul, le retour à la croissance sera porté par la nouvelle stratégie du groupe comme par le fort rebond de l’activité post-Covid. "La période est marquée par la relance de la commande publique, mais aussi privée, financée par le plan de relance national. Beaucoup de clients industriels recommencent à investir, dans de nouvelles usines par exemple. Nous avons une excellente visibilité sur notre plan de charge, pour les deux à trois ans qui viennent", se félicite le dirigeant.

Inventer de nouveaux matériaux…

Pour nourrir sa croissance, Rabot Dutilleul mise sur le développement durable et la sobriété énergétique. Le groupe revendique un engagement de longue date, pour l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments, en neuf comme en rénovation, et la réduction de l’empreinte carbone de l’entreprise. Un intérêt bien compris pour le constructeur, dont le dirigeant ne cache pas que sa démarche a aussi un impact économique. "Nous le constatons déjà, la mise en œuvre de techniques et de matériaux bas carbone nous amène beaucoup d’opportunités d’affaires. Dans les appels d’offres, c’est désormais un point que les investisseurs et les clients regardent de près, puisque nos constructions peuvent avoir un effet favorable sur leur propre bilan carbone. Et ce n’est encore que le début, ce mouvement va forcément s’accélérer."

Pour être prêt, Rabot Dutilleul repense sa manière de travailler. Et d’abord, en utilisant de nouveaux matériaux, incluant davantage de matières recyclées, comme des granulats parfois revalorisés directement sur site du chantier. Ou en misant sur la R & D, pour mettre au point différents types de béton bas-carbone. Ainsi, Rabot Dutilleul va utiliser pour la première fois du béton de chanvre, pour la construction d’un lycée en Île-de-France.

"Ce sont des parpaings de format classique, dans lesquels sont incorporés des composants végétaux, détaille François Dutilleul. Les caractéristiques techniques sont intéressantes pour certains usages, et le matériau est plus léger, comparé à du béton traditionnel. Le bilan carbone en est bien meilleur. Nous réfléchissons à développer d’autres produits de ce type, notamment avec des anas de lin, disponibles localement dans les Hauts-de-France." Menée en interne comme avec des partenaires industriels ou universitaires, cette recherche sur les matériaux de demain va être accélérée par le groupe. "Nous fléchons une bonne part de nos investissements sur ces sujets, et nous allons accélérer. Nous revendiquons un rôle de leader dans ce domaine", pose le PDG.

… Et de nouvelles méthodes de travail

Rabot Dutilleul se réinvente aussi, en modifiant sa façon de travailler. De plus en plus, le constructeur se positionne en amont de la filière, pour intervenir sur les projets dès la conception. "C’est notre stratégie depuis plusieurs années. Sur les douze derniers mois, les trois quarts de nos projets nous arrivent dès la conception. Il y a cinq ans, c’était 25 %. Nous allons continuer à monter en volume sur ce type de dossiers, c’est un élément différenciant pour nous", pointe François Dutilleul.

En interne, cela se traduit par la formation de collaborateurs et par des recrutements, pour renforcer les capacités d’ingénierie du groupe. Une rupture avec le modèle traditionnel du BTP, dans lequel les acteurs interviennent tour à tour, de la conception jusqu’à la production. "De notre point de vue, ce n’est pas assez efficace. Il faut faire travailler les acteurs ensemble, dès le démarrage. Nous nous inspirons des bonnes pratiques qui ont fait le succès des grandes industries, souvent en internalisant un maximum de compétences et d’étapes de production. Travailler de manière intégrée, c’est la clé pour monter en puissance", analyse François Dutilleul.

Rabot Dutilleul a ainsi recours à des outils comme le Scan 3D, pour concevoir des modules préfabriqués en usine, pour la rénovation en série de façades ou de sanitaires dans des grands ensembles. Une méthode qui permet également de réduire l’empreinte carbone du chantier, tout en maîtrisant les coûts.

Rabot Dutilleul est ainsi partenaire de l'entreprise sociale pour l'habitat lilloise Vilogia sur les premiers chantiers "EnergieSprong" de France, à Wattrelos (Nord). Cette méthode de "saut énergétique", importée des Pays-Bas, permet de transformer des passoires énergétiques en bâtiments neutres, en quelques semaines de travaux seulement. Une façade isolante, préfabriquée en usine d’après un scan 3D du bâtiment, est la pièce maîtresse de l’opération. Une méthode imparable pour traiter de grands volumes identiques, et pour laquelle le marché devrait bientôt s’étendre. D’ici cinq ans, la loi obligera à la rénovation énergétique de tous les logements destinés à la location. Rabot Dutilleul, dont 36 % du chiffre d’affaires provient du résidentiel, travaille à développer une offre adaptée pour tous les types d’immeubles.

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