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Le défi industriel de l’éolien flottant au large de Groix et Belle-Île
Morbihan # Production et distribution d'énergie # Infrastructures

Le défi industriel de l’éolien flottant au large de Groix et Belle-Île

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Mener la transition énergétique en haute mer grâce à l’éolien flottant nécessite des efforts colossaux d’adaptation que devra relever le futur lauréat de l’appel à projet pour saisir l’opportunité d’un eldorado annoncé. À quel prix ?

Malgré les retours concluants du démonstrateur Floatgen, en service au large du Croisic depuis 2018, le pari industriel de l’éolien flottant reste audacieux — Photo : Idéol

D’ici 2030, l’un des premiers parcs commerciaux au monde exploitant des éoliennes flottantes devrait émerger au large de Groix et Belle-Île, à au moins 15 kilomètres des côtes. Au terme d’un débat public sur le projet et en réponse à l’appel d’offres qui a suivi, 10 candidatures ont été retenues en septembre 2021. Parmi les différents consortiums associant les principaux acteurs du secteur de l’énergie (EDF, Total, Shell, Engie, Iberdrola…), un seul lauréat sera désigné début 2023. Initialement prévue en juillet, la date limite du dépôt définitif de leurs dossiers a été repoussée de trois mois.

Impliquer les acteurs locaux

En attendant, au terme d’une concertation menée par RTE, une zone d’atterrage pour le câble en provenance du futur parc commercial a été choisie en mars dernier à travers un fuseau passant à l’est de Groix entre Erdeven et Plouharnel. Durant cette phase d’étude et de consultation ouverte se profile cependant l’enjeu fondamental de la faisabilité d’une telle entreprise et ses implications concrètes sur l’écosystème local.

Environ 300 PME entendent relever le défi selon le cluster industriel Bretagne Pôle Naval (BPN) qui vient de porter à sa présidence Jean-François Daviau, fondateur de Sabella, spécialiste finistérien des hydroliennes (25 salariés ; 5 M€ de CA) et pionnier des énergies marines renouvelables (EMR). Défendu depuis plusieurs mois par BPN, le label Breizh Content que s’évertue d’obtenir une majorité de candidats doit permettre d’impliquer ces acteurs locaux lors des différentes phases du projet, la construction du parc puis sa maintenance en exploitation sur une vingtaine d’années ainsi que son démantèlement. L’offre est d’autant plus séduisante qu’à côté du premier parc d’une capacité d’environ 250 MégaWatts (MW), sera ouvert à partir de 2024 un second parc d’environ 500 MW.

Des investissements gigantesques

D'ici la fin de la décennie, avec un diamètre des rotors en croissance de 200 à 250 mètres, la capacité nominale des turbines devrait passer de 12 MW aujourd'hui à plus de 15 MW,. Bien loin des 2 MW du démonstrateur FloatGen installé en 2018 au large du Croisic. Dans de telles conditions, il convient d'envisager pour chaque flotteur des bases en triangle d'au moins 80 mètres de côté et 25 mètres de haut, mobilisant entre 3 000 et 5 000 tonnes d'acier. "Nous sommes devant un chantier pharaonique", souffle un acteur aguerri du secteur maritime. Pour accueillir de tels monstres, les quais comme les terres pleins actuels ne sont pas adaptés, les moyens de levage et d'ancrage restent à inventer et à fiabiliser. "Il y a un effort gigantesque à entreprendre afin de mettre à niveau nos infrastructures portuaires", confirme l'un des porteurs de projet. Enjeu de souveraineté énergétique, de savoir-faire technologique et de développement industriel, le futur de l'éolien flottant en Bretagne passe donc par des investissements considérables. Au risque de plomber l'essor d'une filière navale qui ronge son frein depuis déjà plus d'une décennie ? Symbole de ce difficile avènement, la mise en service de la ferme pilote de 3 turbines de 10 MW a été repoussée de deux ans, à l'horizon 2025, après les vicissitudes rencontrées par Eolfi, le porteur du projet, racheté en 2019 par Shell.

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