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La plateforme 5.0 de l’Icam fait entrer l’industrie du futur dans le Grand Est
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La plateforme 5.0 de l’Icam fait entrer l’industrie du futur dans le Grand Est

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Après deux ans de travail, les équipes de l’Institut catholique d’arts et métiers (Icam) ont inauguré, sur le campus Strasbourg-Europe de cette école d’ingénieur, la première plateforme 5.0 du Grand Est. Présentée comme "l’usine du futur", elle est un outil de formation pour les élèves de l’école mais aussi pour les industriels afin d’évoluer vers l’industrie de demain.

Richard Komurian, chef du projet de la plateforme 5.0 de l’Icam (à gauche), continue de prodiguer des conseils aux étudiants même lors de la démonstration inaugurale — Photo : Dorian Mao

L’ère de l’industrie 5.0 s’ouvre dans le Grand Est. Le campus Strasbourg-Europe de l’Institut catholique d’arts et métiers (Icam) a inauguré une plateforme innovante, relevant de "l’industrie du futur", le 19 octobre. Ce projet doit permettre à l’école et aux industriels de la région de se projeter dans l’industrie de demain. "Le numérique ne doit pas être le taylorisme du XXIe siècle, il doit être au service de l’humain", énonce avec vigueur Jacques Serve, président de l’Icam Strasbourg-Europe, pour permettre à l’auditoire de 150 personnes de mesurer l’impact de l’arrivée de cette innovation au sein de l’école d’ingénieur. Et Nicolas Juhel, directeur général de l’Icam Strasbourg-Europe, de compléter : "De l’humain, il y en a sur la chaîne de production 5.0".

L’industrie 5.0 : l’humain au centre, entouré de technologies

Le projet de création de cette plateforme du futur est né en 2021 et a nécessité la participation de plus d’une dizaine d’industriels pour sa conception. C’est une ligne de production en forme de U, composée de sept postes de travail. Entièrement digitalisée, elle est équipée de nombreuses technologies : réalité virtuelle, impression 3D, robot mobile autonome (AMR), internet des objets, puce RFID pour la traçabilité de chaque pièce, capteurs connectés, Intelligence artificielle, utilisée en fin de chaîne pour assurer le contrôle de chaque élément produit, ou encore un système de pick to light pour guider les salariés. "Toute la chaîne de production est pensée dans un seul et unique but : mettre la technologie au service des collaborateurs", détaille Richard Komurian, directeur développement entreprise et innovation au sein de l’Icam Strasbourg-Europe et chef de projet sur la création de la plateforme 5.0.

L’objectif de cette nouvelle ligne est simple : gérer une grande variabilité de produits en assurant une production synchronisée entre une ligne en amont et une ligne d’assemblage. La plateforme 5.0 mise au point à l’Icam permet d’assembler plus de 40 variantes d’un produit en même temps, contre 9 seulement sur une plateforme classique. "Nous avons décidé de nous concentrer sur ces 40 variantes dans le cadre de notre projet, mais au maximum, c’est 2 668 variantes d’un même produit qui pourraient être produites, soit 300 fois plus que sur une chaîne classique", précise Richard Komurian.

Des formations pour les professionnels

Si elle a été développée à l’Icam, la plateforme 5.0 a pour vocation d’être un outil de formation à la fois pour les étudiants ingénieurs, mais aussi pour les industriels de la région. "L’Icam propose des journées de formation pour les professionnels afin de les faire réfléchir, se questionner et pourquoi pas leur permettre de faire évoluer leur organisation et leur outil de production", explique Philippe Klein, cofondateur d’EasyLean +, société spécialisée dans la création de concept innovant d’organisation et en conseil aux entreprises, et qui a mené le projet de création de la plateforme 5.0 aux côtés de Richard Komurian.

Il poursuit : "Il est question de présenter aux industriels les écueils à éviter pour réaliser la transition vers l’industrie 5.0. Il faut les comprendre pour ne pas reproduire les mêmes erreurs que la 4.0. Mais ce dont il faut vraiment prendre conscience, c’est que l’entreprise de demain doit se construire avec les salariés d’aujourd’hui".

Un projet financé de moitié par la Région

Développer l’industrie du futur à un prix, et la Région Grand Est l’a compris. La création de cette plateforme 5.0 a nécessité un investissement de 488 000 €, dont la moitié a été financée par la Région dans le cadre de son programme “Pacte compétences Grand Est 2021-2023”. "C’est un outil industriel de pointe qui va permettre d’appréhender les enjeux de sobriété énergétique d’aujourd’hui et de demain", affirme Irène Weiss, conseillère régionale et vice-présidente de la Commission Enseignement supérieur, recherche et innovation de la région Grand Est.

Une usine 5.0 qui s’inscrit dans la transition écologique

L’industrie 5.0 a été mise en avant dans un rapport de janvier 2021 produit par le groupe d’experts européens ESIR (Economic and Societal Impact of Research and innovation) à destination de la Commission européenne. "Cette nouvelle révolution industrielle a pour vocation de faire évoluer le concept de l’industrie 4.0, qui a oublié l’humain au cœur du système, persuadée que la technologie peut régler tous les problèmes. Elle s’articule autour de trois axes principaux : l’entreprise innovante, l’entreprise agile et résiliente et l’entreprise apprenante", affirme Philippe Klein, avant d’insister sur un point : "L’un des enjeux essentiels de la 5.0, c’est la transition verte pour garantir une industrie durable".

Une mission réussie dans ce projet selon Richard Komurian : "Avec cette plateforme, on est dans le juste à temps, le juste nécessaire. Il n’y a pas de stock, donc pas de gaspillage et l’IA permet d’éviter le rebut. Et puis, pouvoir réaliser des dizaines de variantes sur une même ligne de production permet à l’industriel d’investir seulement sur une plateforme, au lieu d’en avoir quatre ou cinq". Sur la question de la consommation énergétique d’une telle machine, pas de mesure précise, mais Richard Komurian est catégorique : "Il n’y a qu’un seul outil pour toute la production ! Donc, forcément moins de consommation, même s’il y a beaucoup plus de technologies sur cette plateforme".

Du côté des étudiants aussi, l’arrivée de cette machine est synonyme d’une avancée : "J’ai l’impression d’être au cœur de ce qui se joue actuellement au niveau industriel. C’est essentiel de se questionner sur le monde dans lequel on travaille. Si on étudie l’industrie du futur, c’est qu’on est conscient des enjeux", détaille Adam, 24 ans, étudiant dans la formation Système numérique et industriel 4.0 à l’Icam. La formation des élèves ingénieurs sera d’ailleurs enrichie dès septembre 2024 avec le développement de projets concrets sur cette plateforme 5.0.

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