Selon l’ONU, un milliard d’hectares de forêt doit être replanté d’ici 2030, mais au rythme actuel, seuls 5 % de cet objectif seront atteints. Face à cet enjeu, la start-up Morfo (35 salariés) a développé une solution pour restaurer les écosystèmes forestiers tropicaux, utilisant un système de largage de semences à grande échelle par drones. Créée en 2021 et arrivée au bout d’un cycle de deux ans d’incubation à Paris, elle déménage à Montpellier pour amplifier ses capacités d’action.
Une approche environnementale systémique
Le process développé par Morfo repose d’abord sur le diagnostic des zones dégradées et la production des billes qui encapsulent les semences amenées à être larguées. Grâce à une collaboration entamée dès 2021 avec l’Institut de recherche pour le développement (IRD), situé à Montpellier, le laboratoire de la start-up étudie plus de 200 essences végétales à ce jour. C’est la densité scientifique locale qui a poussé Morfo à s’enraciner dans la Métropole héraultaise. Elle projette de recruter six chercheurs et ingénieurs en 2024, afin de renforcer ce pôle R & D. "Le volet scientifique est primordial car notre approche est systémique avant d’être technologique. Elle consiste d’abord à connaître les essences, les étudier dans des scenarii de dérèglement climatique et déterminer des schémas de plantation en fonction des sols. Ensuite, nous étudions les données de terrains pour suivre la croissance, comprendre ce qui pousse, comment, et avec quel taux de capture du carbone", résume Pascal Asselin, cofondateur de Morfo.
Des machines plus puissantes pour ensemencer
Sur le plan industriel, Morfo a développé des machines produisant les capsules de semences. De formes réduites, elles sont facilement transportables vers les zones géographiques ciblées par la climatech, telles que le Gabon, la Guyane et surtout le Brésil, où elle compte une équipe de 15 personnes. Les recrutements en cours permettront aussi de concentrer cette activité de conception et fabrication à Montpellier, tout en faisant évoluer les machines. "Selon la taille des projets que nous serons amenés à gérer, nous allons rester sur le mode actuel ou bien nous créerons des hubs dans chacun de ces pays, où nous installerons des machines de plus grande capacité. Tous les prototypes à venir seront conçus à Montpellier", annonce Pascal Asselin, qui chiffre à trois millions d’euros en deux ans l’investissement sur la stratégie globale de croissance.
Reboiser un million d’hectares en 10 ans
Avec la R & D en cours, Morfo a déjà réussi à améliorer le système de largage par drone (triplant sa capacité de plantation) et la vitesse d’encapsulation (de 2 000 à 3 000 capsules par heure, et non par jour). Armée de cette technologie, la start-up a déjà "reforesté" 600 hectares, auxquels s’ajouteront 200 hectares en 2024. Elle gère 19 projets de plantation à ce jour, auprès d’industriels ayant une contrainte réglementaire de restaurer les milieux qu’ils ont dégradés, ou bien de collectivités et d’ONG à qui elle propose l’ingénierie pour des opérations de grande envergure.
Son objectif est d’atteindre un million d’hectares reboisés en 10 ans, "un challenge industriel que le transfert à Montpellier doit nous aider à relever", glisse Pascal Asselin. Puis elle vise, avec le renfort de partenaires internationaux, le cap très ambitieux des 100 millions d’hectares en 2050… soit une superficie aussi grande que l’Allemagne et l’Espagne réunies.
