Innovation : comment les PME peuvent aller chercher les milliards d'euros du programme Horizon Europe
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Innovation : comment les PME peuvent aller chercher les milliards d'euros du programme Horizon Europe

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Horizon Europe, le tout nouveau programme-cadre de l’Union européenne, est sur les rails. Ce programme, largement axé sur recherche et l’innovation, peut constituer une précieuse source de financement pour les entreprises.

Le nouveau programme-cadre européen Horizon Europe est doté de 95 milliards d’euros. C’est 30 % de plus que le programme précédent — Photo : weyo

En matière de recherche et d’innovation, le menu proposé par le nouveau programme-cadre européen "Horizon Europe", qui s’étale sur la période allant de 2021 à 2027, ne comporte pas de changement notable par rapport au programme précédent. À une exception près : son budget. D’un montant de 95,5 milliards d’euros, il est en augmentation de 30 % par rapport au programme antérieur.

Moins de formalités administratives

Grâce à ce budget, Horizon Europe entend renforcer les bases scientifiques et technologiques de l’Union européenne et stimuler sa compétitivité, en particulier celle de son industrie. Mais ce programme a aussi d’autres ambitions. "Avant, c’était un peu la recherche pour la recherche. Ce qui change aujourd’hui, c’est que ce programme-cadre s’inscrit dans la recherche de solutions pour résoudre des enjeux environnementaux et sociétaux. C’est une véritable inversion de modèle", remarque Alexandre Colomb, directeur de l’Agence régionale d’information stratégique et technologique (Arist), une structure qui aide les PME à innover pour accéder à des marchés internationaux.

Ce programme européen porte aussi une autre promesse : faciliter les formalités administratives. Une manière de rassurer les chefs d’entreprise, à qui l’Europe fait parfois peur. "La simplification, c’est le maître-mot, explique Frédéric Collignon, dirigeant d’ABF Décisions, une société de conseil et d’ingénierie en financements publics. On le vérifie au quotidien. Horizon Europe est plus simple que les programmes précédents, on le sent bien."

Des dispositifs taillés pour les PME

Ce programme-cadre est composé de quatre piliers, dont deux s’adressent particulièrement aux entreprises. Le pilier 2, "problématiques mondiales et compétitivité industrielle européenne", ambitionne de soutenir des projets liés aux problématiques sociétales, comme la santé, l’industrie, ou encore l’alimentation. Pour y répondre, il est nécessaire de s’allier avec une autre entreprise ou un laboratoire de recherche. "Ce pilier est surtout à destination des entreprises qui ont une bonne capacité en R & D, et sont habituées à travailler à l’international, note Alexandre Colomb. Il faut parler anglais, il faut savoir négocier des droits de propriété intellectuelle et mettre au point des méthodes de travail. Cela écarte de fait certaines entreprises qui n’ont pas forcément cette culture du collaboratif."

Le pilier 3, "Europe plus innovante", est en revanche conçu à destination des PME. Il prévoit la création du Conseil européen de l’innovation (EIC en anglais) et est destiné à soutenir des projets novateurs, en vue de leur mise sur le marché. "C’est presque un programme à part entière pour les PME ! Il vise notamment à financer des start-up et des projets disruptifs. Il y a des facilités pour les participants : ils peuvent soumettre des pré-dossiers et proposer des projets en deux étapes", souligne Nicolas Bonnet, directeur du pôle Europe chez ABF Décisions. C’est d’ailleurs le seul pilier dans lequel les entreprises peuvent se permettre de répondre aux appels à projets en solo. Le Conseil européen de l’innovation propose d’ailleurs un panel de financements complémentaires au travers des programmes "EIC Pathfinder" (exploration d’idées radicalement nouvelles), "EIC Transition activities" (transformation des résultats de la recherche en innovation) et "EIC Accelerator" (déploiement de l’innovation sur le marché).

Des projets très sélectifs

Une chose est sûre : pour candidater, il faut donc se montrer résolument innovant et ambitieux. "Un projet à 100 000 € n’a rien à faire dans Horizon Europe ! prévient Nicolas Bonnet. Ce sont des projets à 1 ou 2 millions d’euros sur deux ou trois ans, lancés à plusieurs."

Les taux de sélectivité sont d’ailleurs très serrés : de 6 % à 7 % pour le Conseil européen de l’innovation. "Même la phase de pré-sélection est très exigeante, rappelle Frédéric Collignon. Il faut préparer un pitch vidéo. Seuls les projets "bankables", qui ont une chance de rencontrer un vrai succès commercial, sont retenus."

Mais pour ceux qui y parviennent, l’opération peut se révéler un jackpot. Accompagnée par ABF Décisions, la société Airsea, qui a mis au point un kitesurf tracteur de cargo, a déposé un dossier en février dernier et devrait obtenir un financement de 2,5 millions d’euros. Il ne faut donc pas hésiter à se lancer. " Certaines entreprises doivent être convaincues d’y aller, rappelle Alexandre Colomb. Car, même si elles ne gagnent pas, cela leur a permis d’élargir leur réseau, d’avoir acquis une dimension européenne et donc une certaine notoriété. D’ailleurs, l’EIC Accelerator a conçu le label "Seal of excellence" pour celles qui avaient échoué malgré de bonnes évaluations".

Des réseaux pour aider à remporter la mise

Avant de se lancer tête baissée, mieux vaut d’abord amorcer une réflexion en interne. Il convient de définir la nature du projet que l’on souhaite faire financer et de se poser les bonnes questions : suis-je prêt à collaborer avec d’autres entreprises ou laboratoires ? Un autre financement européen (Feder, Interreg) serait-il plus adapté ?

Si l’entreprise souhaite se positionner sur un appel à projets d’Horizon Europe, elle peut entrer en contact avec les conseillers Europe, au sein des CCI ou des technopôles. Un réseau de structures, comme Enterprise Europe Network ou le réseau Noé, existe afin de renforcer la présence des entreprises dans des projets européens. Concernant la rédaction du dossier, qui nécessite souvent un temps très long, il est parfois judicieux de s’adresser à des consultants privés. "De plus, il est souvent avantageux d’avoir un regard extérieur, il permet de justifier le projet, de préciser à quels objectifs il répond. Et si le projet est en short-list, il faut souvent préparer un oral", rappelle Alexandre Colomb. Bpifrance peut d’ailleurs proposer une aide financière à la rédaction de ce type de dossiers. Si le projet est retenu, il ne faut pas négliger le temps dédié à la gestion de projet, les étapes du reporting, notamment à la fin du programme, qui implique un reporting final pour obtenir le solde du financement. Enfin, un point de vigilance à ne pas négliger pour le dirigeant : si le projet est réalisé avec d’autres structures, il n’est pas prudent, si c’est une première fois, d’endosser le rôle de coordinateur.

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