"Il existe un outil pour étaler le remboursement du PGE"
Interview # Capital

Hassiba Kaabêche directrice régionale Pays de la Loire de la Banque de France "Il existe un outil pour étaler le remboursement du PGE"

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La procédure n’est pas toujours connue des chefs d’entreprise. Ceux qui ne parviennent pas à rembourser leur PGE peuvent frapper à la porte de la Médiation du crédit ou du Conseiller départemental à la sortie de crise. Explication de Hassiba Kaabêche, de la Banque de France.

Hassiba Kaabêche, directrice régionale Pays de la Loire de la Banque de France : "La procédure peut aller très vite" — Photo : DR

De nombreux chefs d’entreprise disent ne pas connaître la procédure de Médiation du crédit. Dans quelles conditions peuvent-ils y recourir en cas de difficulté à rembourser le PGE ?

Un accord de place sur la restructuration des petits PGE dans le cadre de la Médiation du crédit aux petites entreprises a été signé le 19 janvier 2022. Il offre aux TPE, PME et indépendants ayant bénéficié d’un PGE de moins de 50 000 euros un nouvel outil pour en étaler le remboursement. Ces entreprises doivent attester, via leur expert-comptable, qu’elles connaissent des difficultés de gestion avérées, sans être cependant en cessation de paiement et avoir des capacités de rebond. Il leur faut pour cela faire établir une attestation de non-cessation de paiement par leur expert-comptable et faire le point avec leurs banques sur leurs capacités de remboursement du PGE et de tous leurs crédits en cours. Selon sa situation, l’entreprise peut ensuite saisir le Médiateur du crédit, afin de trouver un accord amiable pour restructurer l’ensemble de ses dettes. Pour les entreprises dont le PGE dépasse 50 000 euros, la procédure est la même mais passe, non pas par la Médiation du crédit, mais par le Conseiller départemental à la sortie de crise.

Comment cela se passe-t-il ensuite ?

Dès lors que l’entreprise est éligible et que son dossier est complet, la procédure peut aller très vite. Nous informons l’ensemble des créanciers, leur demandons leur position et organisons la médiation. Si nous restructurons le remboursement du PGE, nous restructurons l’ensemble de la dette. Il peut arriver que nous orientions l’entreprise vers les acteurs les plus à même de l’accompagner, comme le Tribunal de commerce… Les enjeux dans ce type de situation ne portent pas tant sur la notation par la Banque de France, qui ne concerne que les entreprises réalisant plus de 750 000 euros de chiffre d’affaires, que sur la continuité d’exploitation et la pérennité de l’entreprise. Dans les Pays de Loire, la médiation trouve une issue positive dans plus d’un cas sur deux.

Certaines organisations professionnelles craignent que les banques "regardent de travers" les entreprises faisant appel à la médiation du crédit. Que leur répondez-vous ?

Comme je le disais, l’enjeu n’est pas là. Dans l’absolu, j’invite les entreprises à soigner les relations avec leurs banques. Il est toujours préférable d’évoquer les difficultés que traverse l’entreprise avec son banquier en amont d’une procédure de médiation. Il est toujours préférable que le banquier ne les découvre pas à l’occasion de la médiation. Ensuite, la période du "quoiqu’il en coûte" est terminée. Les banques ont joué leur rôle de soutien à l’économie française et éviter le "mur de faillites" que certains redoutaient. Aujourd’hui, il n’est pas anormal que les banquiers regardent le profil financier et la solvabilité de leurs clients. Et on n’observe pas, à ce stade, de contraction du crédit.

Les demandes de restructuration de PGE ont été peu nombreuses jusqu’à présent. Pensez-vous que cela puisse évoluer dans les mois à venir, si le contexte macroéconomique continue à se dégrader ?

La courbe est jusque-là plutôt plate depuis le début de l’année. Les chefs d’entreprise français sont entrés dans cette seconde crise économique dans une meilleure situation financière qu’avant le Covid. Si on analyse les bilans sociaux au 31 décembre 2021 au niveau national, il en ressort que, tous secteurs confondus, 61 % des entreprises ont un chiffre d’affaires supérieur à celui de 2019. Plus remarquable encore, 61 % des entreprises ont un résultat net supérieur à ce qu’il était en 2019. Il faut y voir l’efficacité des mesures mises en place par l’État pour soutenir les entreprises. Toutefois, dans nos dernières notes de conjoncture, nous constatons que les incertitudes progressent chez les chefs d’entreprise. Dans les mois à venir, cette prudence pourrait se traduire par le report ou le décalage de projets d’investissement. Nous sommes également très vigilants sur le niveau de trésorerie qui, depuis deux mois, s’érode tout en restant toujours à un niveau élevé.

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