Conseils d'administration : Jouent-ils le jeu de la parité ?
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Conseils d'administration : Jouent-ils le jeu de la parité ?

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La loi Copé-Zimmerman veut instaurer 20 % de femmes en 2014 dans les conseils d'administration et 40 % en 2017. Une application laborieuse en région.

— Photo : Le Journal des Entreprises

« Dans les entreprises cotées ou les grandes entreprises en Midi-Pyrénées, nous sommes dans la moyenne française. Aujourd'hui, le CAC 40 est à un peu plus de 30 % de féminisation dans les conseils d'administration », observe Laurent Germain, délégué régional de l'Institut français des administrateurs (IFA) et responsable d'un groupe de recherche en économie et finance à Toulouse Business School. Mais qui connaît vraiment, parmi les chefs d'entreprise, la loi Copé-Zimmerman de 2011 ?

Cette loi vise à instaurer 20 % de femmes en 2014 et 40 % en 2017 dans les conseils d'administration, dans les sociétés cotées et dans celles qui depuis trois ans emploient au moins 500 salariés et présentent un montant net de CA ou un total de bilan d'au moins 50 millions d'euros. Les sanctions, méconnues, sont pourtant importantes : la nullité des nominations non conformes à l'objectif de parité, et la suspension de la rémunération des jetons de présence.

« Dans les PME, on est loin de la parité »

Au sein des petites entreprises régionales, non soumises à la loi, « on sent un mouvement de féminisation du conseil d'administration mais on est loin de la parité », concède Laurent Germain. Et parmi les entreprises plus importantes, certaines échappent aussi à la loi. Eurogiciel, avec ses 1.000 collaborateurs et ses 75 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2014, n'est pas concerné pour le moment. « Seules les SA sont soumises à cette loi, pas les SAS comme Eurogiciel », explique Daniel Benchimol, président du groupe. Lequel a un avis bien personnel sur la question. « Cette loi n'a pas de sens car elle nous oblige à faire des choix. Ce n'est pas pertinent. C'est bien d'inciter à ne pas faire de discrimination mais de là à imposer, c'est une grosse bêtise. » D'ailleurs, les comités stratégiques, d'organisation et de rémunération gravitant au sein d'Eurogiciel sont aujourd'hui dans une « période qui s'est masculinisée par l'histoire des recrutements ».

Pour Daniel Benchimol, il y a moins de femmes qu'avant dans les métiers d'ingénierie et d'industrie. « Cette loi est compliquée : cet avis est partagé par nombre d'acteurs », assure le patron d'Eurogiciel qui fut un temps administrateur au Syntec Numérique.

Les femmes auraient un rôle bénéfique

Pourtant, des efforts sur la parité dans les CA seraient à terme avantageux. D'après Laurent Germain, « des études ont prouvé le rôle bénéfique des femmes dans le CA : plus il y a de femmes, plus les hommes sont présents; elles sont plus enclines que les hommes à lancer des projets risqués et elles alignent davantage la rémunération des dirigeants avec leur performance. » Cela peut être aussi l'opportunité, pour les CA qui ne fonctionnent pas bien, de se séparer de membres moins compétents, juge le délégué de l'IFA en Midi-Pyrénées qui estime que les cas de misogynie sont « très rares ».

Un vivier de femmes administratrices trop réduit

Alors certes, il peut être plus difficile de trouver un vivier de femmes administratrices en région. L'une des solutions est de se rapprocher de l'IFA qui développé un programme de certification Administrateur de sociétés - dans lequel, d'ailleurs, la parité prévaut. « Cette année, avec cinq promotions en cours, une soixantaine de femmes sortira avec le certificat en poche, annonce Clémence Decortiat, responsable communication à l'IFA. À ce jour, 298 personnes ont été certifiées, dont 167 femmes». Ironie, Toulouse Business School avait essayé de lancer cette formation il y a quelques années mais les entreprises n'étaient pas mûres. « Mon objectif est que TBS puisse délivrer cette certification dès 2015. Cela permettra d'alimenter nos entreprises régionales », avance Laurent Germain.

Parole d'administrateur

Véronique Védrine est directrice de réseau chez BPIFrance, présidente de l'IFA Midi-Pyrénées et administratrice chez Actia, la Dépêche du Midi et BPIFrance Garantie Régions. Elle reconnaît que la « mise en oeuvre de cette loi n'est pas évidente : pas facile de trouver la bonne personne au bon endroit. » Qui plus est en province, où « il y a moins de femmes à des postes importants qu'en région parisienne ». Autre point, « les femmes ne se font pas assez connaître », estime Véronique Védrine qui prône, « avant la parité, la compétence comme critère de sélection. Pour les femmes comme pour les hommes. »

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