Comment la Cooperl fait du rail un atout compétitif
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Comment la Cooperl fait du rail un atout compétitif

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L’avenir du transport de marchandises passe aussi par le train. Et l’État pousse à cela pour répondre aux enjeux de transition écologique. En Bretagne, la Cooperl, leader français de la production porcine, privilégie déjà le fret ferroviaire pour l’approvisionnement de ses matières premières agricoles. Son intention est d’accélérer.

La Cooperl achemine 45 % de ses matières premières agricoles par le rail. Elles seront utilisées pour la fabrication d'aliments du bétail — Photo : © Baptiste Coupin

Chaque semaine, trois à quatre trains emplis de céréales et de co-produits destinés aux animaux trouvent leur terminus à Montreuil-sous-Pérouse, dans la campagne de Vitré (Ille-et-Vilaine), lieu d’implantation de l’usine principale de la Cooperl. Et plus grosse manufacture française de fabrication d’aliments du bétail. La nutrition animale est l’un des métiers piliers du géant breton de la production porcine (2,3 milliards d’euros de CA, 7 000 salariés, 2 700 éleveurs adhérents), leader français sur ce secteur. Pour permettre à ses nutritionnistes d’élaborer des recettes adaptées aux animaux qu’il nourrit (des porcs essentiellement, mais aussi des bovins et des volailles), Cooperl Nutrition, l’un des sept pôles d’activité du groupe, s’approvisionne en blé, maïs ou orge, en provenance de la Beauce, principalement. 45 % des matières premières nécessaires à la fabrication de ses formules sont acheminées par train jusqu’à ses usines bretonnes. C’est le cas pour son site bretillien, situé en bordure de voie, grâce à un embranchement ferroviaire dont il a l’usage exclusif depuis 2001. Mais aussi à Plestan et Plounéran, dans les Côtes-d’Armor, les deux autres sites de son pôle nutrition, établis à proximité directe de l’axe TGV Paris-Brest. Au global, la coopérative réceptionne 600 000 tonnes de denrées alimentaires grâce au rail. Le reste par camions.

Amélioration du réseau SNCF

Mais c’est bien vers le train que le groupe affiche sa préférence.

Photo : © Baptiste Coupin

Ainsi, 82 trains de marchandises sont arrivés à Montreuil-sous-Pérouse au premier semestre 2020. Contre 73 pour l’ensemble de l’année 2019. Ce n’est qu’un début. « Avec l’amélioration du réseau SNCF (un temps freiné par les travaux grande ligne et les grèves, NDLR), nous souhaitons faire en sorte que 60 % de nos matières premières soient réceptionnées par ce mode de transport », annonce Denis Olivry, directeur de Cooperl Nutrition (330 salariés sur les trois sites). L’entreprise, qui a investi 12 millions d’euros dans des embranchements ferroviaires dédiés et des cellules de stockage pour ses sites de Plestan et Vitré, en 1998 et 2001, a fait ses comptes. « Au global, le trafic ferroviaire est moins coûteux que la route, car on arrive à charger de gros volumes et on se retrouve avec une seule facture de marchandises au bout », indique son responsable nutrition.

L’entretien des 7 km de voie ferrée entre Vitré et Gérard qui desservent son usine de Montreuil-sous-Pérouse est donc primordial. Et l’heure est précisément à leur rénovation ! Les travaux de remise en état de la ligne ont débuté en août 2020. Ils s’achèveront à l’automne 2021. L’opération consiste principalement en des travaux de voie, de renforcement de la plateforme ainsi que certains ouvrages hydrauliques. « On s’est coordonnés pour ne pas gêner l’acheminement des trains de la Cooperl », relève Christophe Huau, directeur territorial SNCF Réseau Bretagne - Pays de la Loire. Le groupe ne connaîtra donc pas de rupture d’approvisionnement le temps de la rénovation.

Un pacte de partenaires au bénéfice de la Cooperl

Les travaux de la ligne Vitré-Gérard nécessitent un investissement de 1 million d’euros, que la coopérative ne finance qu’à hauteur de 5 %. C’est l’État et la Région Bretagne, à hauteur de 40 % chacun, qui en subventionnent la plus grosse partie. « Il n’est pas spontané et naturel que nous mettions de l’argent pour une infrastructure dédiée à une entreprise, reconnaît Gérard Lahellec, vice-président transports et mobilités au Conseil régional de Bretagne. Si nous le faisons, c’est parce que nous sommes attachés au développement durable d’une agriculture de production en Bretagne et le redéploiement pérenne du fret ferroviaire est une composante essentielle de l’optimisation économique et de la performance de nos économies agricoles et agroalimentaires. » « Le fret ferroviaire, tout le monde y est favorable, mais ce n’est pas si simple que ça. C’est de l’infrastructure, de l’énergie et des moyens. On souhaite soutenir le développement économique, surtout par les temps qui courent, et ces 7 km de ligne sont donc primordiaux », le rejoint Isabelle Le Callennec, maire de Vitré. Vitré Communauté finance elle aussi une partie de l’opération à hauteur de 10 %.

Grâce à ce pacte de partenaires, attachés pêle-mêle à l’emploi, l’économie régionale et aux enjeux de transition écologique, la coopérative bretonne bénéficiera donc prochainement, à moindres frais, d’une ligne rénovée pour lui permettre de poursuivre et d’intensifier son activité nutritionnelle. L’impact environnemental est également non négligeable. En privilégiant le rail, la Cooperl fait l’économie, pour ses trois sites, de 385 camions par jour sur les routes.

Un exemple à suivre ?

À travers la loi Mobilités promulguée à la fin 2019, l’État s’est engagé dans la compétitivité du fret ferroviaire face aux autres modes de transport. D’autres entreprises bretonnes pourraient donc être tentées de suivre le chemin de la Cooperl. En région rennaise, le constructeur automobile PSA Rennes et le transporteur Lahaye Global Logistics, qui achemine des conteneurs par le rail, sont déjà rompus, eux aussi, au transport ferroviaire de marchandises.

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