Pas-de-Calais
Coronavirus - Durisotti : « Fermer les sites de production est une décision difficile à prendre »
Interview Pas-de-Calais # Industrie

François Loor directeur général de Durisotti Coronavirus - Durisotti : « Fermer les sites de production est une décision difficile à prendre »

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Dans le cadre de la crise sanitaire liée au coronavirus Covid-19, le constructeur-carrossier Durisotti a fermé temporairement ses trois sites de production à Sallaumines (Pas-de-Calais), où se trouve son siège, ainsi qu’à Metz et Agen. Une décision difficile mais nécessaire. Son directeur général, François Loor, témoigne.

Le constructeur et carrossier automobile Durisotti appartient depuis mars 2019 au groupe britannique Liberty — Photo : Elodie Soury-Lavergne, le Journal des entreprises

Les trois sites de production de Durisotti (CA : 46 M€, 210 salariés) sont temporairement fermés, pour faire face à la crise sanitaire actuelle. Comment se prend ce genre de décision ?

François Loor : Nous avons décidé de fermer nos trois sites de production le 17 mars. Trois raisons ont motivé cette décision. D’abord, l’inquiétude des salariés vis-à-vis de cette pandémie, d’autant que nous avons eu quatre cas suspects à Sallaumines, parmi nos collaborateurs et un prestataire de services qui travaillait sur place. Après la fermeture, nous avons donc procédé à la désinfection de l’ensemble du site. Ensuite, notre matière première allait se tarir, puisqu’il s’agit des véhicules que nous transformons et qui nous sont livrés par les constructeurs. Or ces derniers sont nombreux à avoir fermé temporairement leurs usines. Enfin, des fournisseurs nous ont aussi alertés sur des difficultés d’approvisionnement, avec des différés dans les mises à disposition… Les salariés en production ont donc été mis en chômage partiel, et une partie de nos fonctions support poursuit en télétravail. Fermer les ateliers est une décision difficile à prendre car nous avions une production en cours, mais c’est une question de respect vis-à-vis des collaborateurs. La sécurité et la santé des salariés ne sont pas un don qu’on leur fait, mais une dette qu’on leur doit.

La rapidité de cette décision a-t-elle eu des conséquences ?

F.L. : Tout s’est déroulé avec sérénité. Cette décision a rassuré les collaborateurs, qui étaient inquiets et pour certains confrontés à des gardes d’enfants. Nous restons en contact avec ceux qui sont au chômage partiel, pour les informer mais aussi pour prendre des nouvelles des uns et des autres. L’esprit de groupe se renforce dans ce genre de situation. Par respect par rapport aux transporteurs, nous avons mis en place une équipe de quatre personnes, sur la base du volontariat, pour décharger les camions du mardi 17 jusqu’au vendredi suivant. Enfin, je reste joignable en permanence pour répondre aux sollicitations de clients ou de constructeurs. Je suis moi-même en télétravail et je me rends une à deux fois par semaine à Sallaumines, où se trouve la majorité de mes dossiers.

Comment envisagez-vous la reprise ?

F.L : J’espère que l’État et les grands donneurs d’ordres vont mettre en place un plan de relance. La suspension temporaire de l’activité économique, ce n’est pas comme une voiture en panne, il ne suffit pas de mettre de l’essence pour que ça redémarre. Il y aura une période d’inertie, la crise de 2008 nous l’a montré. Nous allons recommencer à produire, mais cette production ne sera pas facturable tout de suite. Pendant un moment, il y aura donc plus de décaissements que d’encaissements. Nous avons travaillé sur les solutions mises en place par le gouvernement, comme le report des charges. Mais reporter ne veut pas dire annuler. C’est quelque chose qu’il faut prévoir, même si nous pouvons compter sur l’appui du groupe Liberty (consortium britannique qui a racheté Durisotti en mars 2019, NDLR). Il y aura aussi et surtout la gestion de l’humain lors de cette reprise : les salariés auront été confrontés à la maladie, eux-mêmes ou dans leur entourage, et le confinement laissera des traces. Nous travaillons avec le comité de direction sur un plan après Covid-19, pour que la sortie de cette situation ait le moins d'impact pour nous et nos clients. En tant que dirigeant, dans ce genre de situation, on a plus de questions que de réponses, notamment sur la date de sortie de ce confinement. Le mot solidarité semble prendre tout son sens pendant cette crise sanitaire. Il en faudra aussi après.

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