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Avec l’humain pour boussole, Clinitex accélère son développement
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Avec l’humain pour boussole, Clinitex accélère son développement

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Le groupe de propreté lillois Clinitex vient d’ouvrir une nouvelle agence à Orléans, juste après le confinement. Le signe d'une accélération de sa stratégie de maillage du territoire national, à un rythme calé sur les valeurs de l’entreprise, qui place l’humain au cœur de tout son modèle.

Clinitex revendique des méthodes de management à contre-courant de celles d'autres acteurs du secteur. Avec pour but premier, d'assurer le bonheur au travail de l'ensemble de ses collaborateurs. — Photo : Alexis Delespierre

Après dix ans passés à faire ses classes à tous les échelons de Clinitex, Édouard Pick est depuis trois ans officiellement seul aux commandes de l’entreprise de propreté créée par son père, Henri Pick, en 1980. Un groupe qui compte aujourd’hui 3 500 collaborateurs, réalise 50 millions d’euros de chiffre d’affaires, et compte une douzaine d’agences, principalement dans les Hauts-de-France et au nord-ouest de Paris. Basé à Lezennes près de Lille, Clinitex travaille pour 5 000 clients, « de l’aciérie au bloc opératoire », pointe Édouard Pick, parmi lesquels des entreprises, des groupes scolaires, ou encore, des syndics.

Pour un « Human Plan »

Succédant à un père très médiatique, Édouard Pick s’est glissé avec discrétion derrière la barre de ce qu’il répugne à qualifier de « gros bateau ». « Plus que comme un capitaine de navire, je me vois comme un chef d’orchestre. Si tout le monde joue sa partie, il n’a pas besoin de maîtriser un instrument à la perfection pour interpréter une belle partition, » tempère le dirigeant. Le collectif, c’est bien une des valeurs cardinales de Clinitex, qui place l’humain au cœur de sa stratégie de développement. « Je n’ai pas de Business Plan pour Clinitex, en revanche, j’ai un « Human Plan », sourit Édouard Pick, qui de fait, se base sur les aspirations de ses salariés pour imaginer l’avenir de son entreprise. « Les envies de nos collaborateurs guident nos choix d’implantation. Par exemple, nous avons un directeur d’agence qui devait nous quitter, en 2018, pour le sud, pour des raisons personnelles. Nous lui avons proposé de racheter pour lui deux agences entre Nice et Marseille. Nous les avons fusionnées et il en a pris la tête. Nous avons environ 200 salariés sur la zone aujourd’hui. » La même logique a prévalu en juin, pour l’une des rares ouvertures en propre de Clinitex, à Orléans, qui compte pour le moment une trentaine de salariés. « Une manageuse de la région lilloise nous avait fait savoir qu’elle avait envie de prendre la direction d’une agence. Quand nous avons décroché un gros contrat à Orléans, une région où nous n’étions pas du tout présents, nous avons choisi d’ouvrir une antenne et de lui en proposer la direction, qu’elle a acceptée. Si nous n’avions pas eu cette candidate prête à partir, nous n’y serions pas allés », assure Édouard Pick.

Dix ouvertures dans les trois ans

Alors que Clinitex affiche des ambitions d’expansion, l’entreprise a ainsi identifié dans ses rangs une dizaine de profils, prêts à monter en grade dès que l’occasion se présentera. « À mes yeux, c’est la bonne façon de procéder, plutôt que d’ouvrir des postes à gauche et à droite et de les proposer ensuite en interne. Il est beaucoup plus efficace, à terme, de savoir pour qui on procède à une ouverture, et d’imaginer un projet durable avec cette personne », expose Édouard Pick. « C’est aussi une manière de garder les bons collaborateurs, en créant de l’aventure pour eux. Nous les conservons au sein de Clinitex, tout en faisant perdurer un projet collectif. »

Et les candidats à l’aventure ne devraient pas ronger leur frein trop longtemps. Après avoir maintenu le rythme d’une opération de croissance externe par an depuis 2015, Clinitex entend bien multiplier les ouvertures dans les prochaines années, en rachetant ou en ouvrant des agences un peu partout en France. « Nous ne savons pas encore si notre prochaine ouverture sera à Lyon, à Bordeaux ou à Toulouse, cela dépend complètement des opportunités et des projets de nos collaborateurs. Mais d’ici trois ans, nous voulons ouvrir des antennes dans une dizaine de métropoles ou grandes villes, » détaille le dirigeant. Des plans que le confinement ne semble pas avoir trop contrariés : si Clinitex estime avoir perdu environ deux millions d’euros sur la période, la croissance devrait comme prévu s’afficher à deux chiffres pendant les trois prochaines années. Pour pouvoir accélérer la cadence, le groupe prépare d’ailleurs la création d’une « académie » pour accompagner en interne les candidats désireux de monter en compétences et d’évoluer au sein de l’entreprise.

Un management « Montessori »

Pur produit de la pédagogie Montessori, Édouard Pick revendique de mettre en œuvre dans son entreprise plusieurs des préceptes de cette pédagogue, prônant l’apprentissage par l’expérience pratique. En particulier, l’idée selon laquelle il faut donner à chacun le temps et la confiance d’apprendre, et de progresser à son rythme. « Chez nous, toute l’information est transparente et accessible, y compris les salaires. Libre à chacun d’explorer le fonctionnement de l’entreprise, selon là où sa curiosité le mène. De toute façon pour s’épanouir chez Clinitex, on ne peut pas ne pas être curieux. En parallèle, je ne demande pas à mes équipes de sur-performer, avec des objectifs toujours plus élevés. Je n’attends d’eux que le nécessaire pour la survie et le développement de l’entreprise », poursuit Édouard Pick. Le dirigeant cite volontiers Pierre Rabhi et son concept de sobriété heureuse, à l’inverse de la « prédation permanente » encouragée par le capitalisme, pointe-t-il.

Ce management par la confiance règne à tous les niveaux de l’entreprise, y compris à celui des agents sur le terrain. Ils travaillent en autonomie, « sans petit chef sur le dos ni pointeuse », et avec le temps et le matériel nécessaires pour assurer leur mission dans de bonnes conditions, souligne Édouard Pick, dont le numéro de téléphone personnel apparaît chaque mois dans la gazette interne de l’entreprise. « Tout le monde chez nous connaît ma photo, mon téléphone et mon mail. Cette décision n’a pas fait l’unanimité chez mes proches collaborateurs, qui me voyaient déjà harcelé nuit et jour. Mais en deux ans, je n’ai reçu que trois coups de fil, à chaque fois pour des demandes de promotion interne », s’amuse Édouard Pick. La preuve, selon lui, que ses recettes fonctionnent. « Notre devise, c’est un salarié heureux pour un client satisfait. Nos méthodes n’apportent pas un résultat supérieur pour le client, et ne nous rendent pas plus rentables, mais elles rendent nos salariés heureux. Nous faisons réaliser un audit chaque année, et 98 % de nos salariés se disent heureux ou très heureux de travailler pour nous, c’est le double de la moyenne nationale. Ce sont ces valeurs que nous cherchons à cultiver, davantage que le surprofit. Elles nous permettent de conserver nos meilleurs agents, et de connaître moins de turn-over qu’ailleurs. Mais nous ne sommes pas non plus chez les Bisounours, nous avons comme tout le monde des points de frottement, et recours à des procédures de licenciement quand nous n’arrivons pas à travailler avec certains. »

Vers un label B-Corp

Fort de ses valeurs humaines, le groupe met également en avant ses valeurs environnementales et sociétales. Depuis un peu plus d’un an, il s’est structuré pour être à même de recevoir, à l’automne, l’exigeant label américain B-Corp, qui identifie les entreprises dont l’objectif « n’est pas d’être les meilleures du monde, mais les meilleures pour le monde ». Une ambition à laquelle Édouard Pick souscrit totalement. Devenue entreprise à mission, Clinitex a supprimé 100 % des produits chimiques du matériel de ses agents. Son dirigeant a également mené une grande refonte de la gouvernance de l’entreprise, en se penchant sur la qualité de ses fournisseurs, et en alimentant l’ensemble de ses locaux à l’énergie verte. Outre des ruches, Clinitex entretient également une forêt, dans le Pas-de-Calais, où depuis plusieurs années, un arbre est planté pour chaque client et collaborateur. « Je n’aurais pas été capable de faire ce que mon père a réalisé. Mais il n’aurait pas été capable de réaliser ce que je vais faire, » promet le jeune dirigeant.

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