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Frédéric Bonfils (Loisirs Enchères) : « Nous sommes plus costauds avec le programme French Tech 120 »
Interview Bordeaux # E-commerce # Innovation

Frédéric Bonfils directeur général de Loisirs Enchères Frédéric Bonfils (Loisirs Enchères) : « Nous sommes plus costauds avec le programme French Tech 120 »

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L'entreprise bordelaise d’e-commerce Loisirs Enchères, éditeur d'un site web de ventes aux enchères sur des offres de loisirs, vient d’intégrer le nouveau programme public « French Tech 120 ». Il va lui permettre de bénéficier d’un accompagnement pour se développer. Son directeur, Frédéric Bonfils, évoque ce coup de projecteur, qui ne bouleverse pas pour autant les projets de l'entreprise.

Frédéric Bonfils, directeur général de Loisirs Enchères — Photo : Loisirs Enchères

Comment avez-vous vécu le fait que Loisirs Enchères ait été sélectionné pour faire partie de la première promotion du programme d'accompagnement public d'entreprises innovantes « French Tech 120 » ?

Frédéric Bonfils : J’étais fier pour les équipes. J’ai rejoint l’entreprise il y a deux ans. Mais la société, bordelaise depuis sa création, a déjà cinq ans. On a beaucoup de travail, d’autant que l’activité de l’entreprise ne cesse d’augmenter depuis deux ans. En fait, mon objectif était de préparer Loisirs Enchères à passer du statut de start-up à celui de « scale-up » (société en hyper-croissance). On a revu et automatisé bon nombre de nos process, les équipes ont énormément travaillé. Pour nous, c’est une belle récompense de faire partie de French Tech 120.

D’autre part, la French Tech nous apporte une visibilité extrêmement importante. Nous avons l’impression que tout est mis en place pour nous aider ou nous soutenir. Au-delà de l’aspect financier, cela nous permet de débloquer des situations dont nous ne maîtrisons pas les aspects légaux ou administratifs. Avec la French Tech, c’est un peu comme si c’était un tractopelle qui allait faire tomber les murs pour nous.

Cette visibilité ne bouleverse-t-elle pas votre feuille de route ?

Frédéric Bonfils : Non, pas forcément. Elle était déjà écrite. Disons plutôt que nous sommes plus costauds, parce qu’une structure va nous épauler et nous aider à atteindre nos objectifs (100 millions d’euros de chiffre d’affaires d’ici 2023).

Comment se positionne Loisirs Enchères face à des Amazon et autres Cdiscount qui font également du e-commerce pour les loisirs ?

Frédéric Bonfils : Dans notre secteur d’activité, depuis Vente-Privée.com (née en 2001, NLDR), il n’y a pas eu de nouveaux concepts pour les clients. Notre concept permet aux utilisateurs de faire des bonnes affaires en s’amusant. Dans mon ancien poste, chez Groupon (plateforme en ligne d’achats groupés, NDLR), je surveillais Loisirs Enchères au même titre que d’autres entreprises du secteur dans d’autres pays. J’ai découvert que les clients, lorsqu’ils renchérissent et achètent, n’utilisent pas le terme « acheter » mais « gagner ». Ça change complètement le paradigme : ils jouent et en plus ils contrôlent le prix qu’ils veulent payer.

Du côté des fournisseurs locaux, des restaurants notamment, c’est très positif. Quand des clients arrivent dans l’établissement, ils ont toujours en tête le fait d’avoir gagné. Du coup, ils achètent une bouteille en plus s’ils sont au restaurant, un soin s’ils sont à l’hôtel, etc. On amène des nouveaux clients à nos fournisseurs qui, en plus, dépensent chez eux.

Combien de fournisseurs comptez-vous ?

Frédéric Bonfils : Nous avons rentré 400 nouveaux partenaires cette année. Nous avons entre 1 100 et 1 200 fournisseurs à l’année pour une moyenne de 600 à 650 offres par jour.

Ce genre de concept n’échaude-t-il pas les fournisseurs potentiels ?

Frédéric Bonfils : Un fournisseur ne signera pas s’il ne gagne pas d’argent. Les réductions qui sont opérées pour les enchères se situent entre moins 30 et moins 70 %. Prenons l’exemple d’un restaurateur qui a trente couverts à fournir. Son objectif est de faire revenir les clients qu’on lui envoie. Localement, Loisirs Enchères est là pour apporter du trafic aux établissements. Ensuite, charge à eux de fidéliser leur clientèle.

Comment gérez-vous le fait d’avoir des retours négatifs sur certains produits vendus, comme les séjours hôteliers ?

Frédéric Bonfils : Je vais prendre l’exemple d’un hôtelier avec qui on travaille à Marrakech. Pour ce seul fournisseur, nous avons une dizaine de riads. Nos équipes s’y rendent tous les six mois. En quatre jours, elles doivent faire le tour de l’hôtel, mais aussi des clients. N’importe quel fournisseur ne vous montrera que ce qui est beau… Ce qui explique parfois la différence entre les images qu’il nous donne et la réalité. Pour les autres partenaires, le dispositif mis en place est très simple : il est exclusivement basé sur le retour client.

Nous travaillons avec des avis vérifiés. Toute personne qui consomme son enchère reçoit un email pour donner son avis dessus, qui s’ajoute au suivi du service client. Si nous recevons des avis négatifs sur une offre, elle est mise en pause. Elle n’apparaîtra plus sur le site le temps que nous l’ayons vérifiée et que nous soyons convaincus du service. Durant le mois de décembre, nous avons ainsi retiré sept offres.

Avez-vous des profils types de clients ?

Frédéric Bonfils : Nous avons identifié cinq comportements d’enchérisseurs : le timide, le flambeur, le warrior, le connecté et le sniper. Le sniper enchérit à la dernière seconde. C’est l’une des techniques les plus utilisées et celle qui marche le mieux la plupart du temps. D’autre part, 70 % de nos enchères sont remportées depuis l’application smartphone, ce qui influe vraiment sur le côté « jeu » de Loisirs Enchères.

Le mobile vous permet-il de cibler un public plus jeune ?

Frédéric Bonfils : Le profil de nos clients est simple : ce sont essentiellement des femmes ayant la quarantaine. Mais nous avons des utilisateurs de tous âges. Par exemple, notre plus grande enchérisseuse est une grand-mère. Elle a 65 ans et remporté 115 enchères.

Combien d’enchères ont été remportées cette année ?

Au total 210 000 (qui représenteraient un chiffre d’affaires de plusieurs dizaines de millions, NDLR).

Quelles sont vos orientations pour 2020 ?

Cette année, nous sommes en train de retravailler l’expérience client. Quelques petites nouveautés sont prévues pour les mois à venir. Aujourd’hui, quand vous enchérissez, vous êtes dans une démarche solitaire. Nous voulons rendre le concept plus dynamique, interactif, modulable et faire de notre plateforme un vrai lieu où le client va s’amuser. Notre objectif est qu’il se sente moins seul, qu’il puisse interagir et que nous puissions interagir avec lui. L’année 2020 va nous permettre de mettre l’accent sur l’expérience client pour nous démarquer de la concurrence.


French Tech 120, un accélérateur de croissance

Lancé en septembre 2019 par l’Élysée et Matignon, le programme French Tech 120 propose un accompagnement de l’État à 123 entreprises en fort développement sur tout le territoire. Les start-up bénéficient d’une assistance spécifiquement conçue pour les entreprises souhaitant devenir un acteur mondial incontournable de leur secteur. Entre autres avantages, les membres de French Tech 120 ont un accès illimité aux services de 45 organismes publics ou ministères. Les start-up ont été sélectionnées sur plusieurs critères : leur jeunesse (moins de 15 ans), les levées de fonds qu’elles ont réalisées et leur croissance. Au moins deux startups ont été sélectionnées dans chaque région. La deuxième startup néo-aquitaine à intégrer la promotion est également girondine, il s'agit de Tree Frog Therapeutics. Né sur le Campus, Tree Frog est la première usine de cellules souche au monde. La jeune entreprise a par ailleurs levé 7,1 millions d’euros en 2019.

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