Start-up : l'entrepreneuriat passe aussi par les quartiers
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Start-up : l'entrepreneuriat passe aussi par les quartiers

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L’écosystème français des start-up tarde à illustrer la diversité présente dans la société. Les freins d’ordre financier et relationnel s’ajoutent au sentiment d’exclusion des publics issus des quartiers dits « prioritaires », rendant plus délicate l’émergence de start-up. Des initiatives se multiplient pour révéler l’esprit entrepreneurial qui anime ces territoires.

— Photo : Dagency / Diversidays

L’écosystème start-up favorise-t-il l’entre-soi ? Pour l'ex-secrétaire d’État au Numérique, Mounir Mahjoubi, « le visage de la French Tech ne ressemble pas à celui de la France », déplorait-il, début février, à Lyon, lors de Diversidays. Cet événement récompense, depuis 2017, l’inclusion par le numérique. « La diversité est une chance pour le numérique », appuyait-il alors.

Alors que le phénomène start-up essaime partout dans les grands centres urbains, les habitants des quartiers prioritaires paraissent sur la touche. « Si la révolution numérique n'intègre pas la diversité dans l’entrepreneuriat, elle sera forcément déceptive », alerte Anthony Babkine, le cofondateur de Diversidays, qui plaide pour l'émergence de rôle-modèle dans les banlieues.

Autocensure et discriminations

Car en banlieue, la volonté d'entreprendre est forte. Des initiatives comme Les Déterminés, Startup Banlieue, l’école Simplon ou Entrepreneurs dans la Ville, s’attellent notamment à rapprocher les jeunes de quartiers de l’entrepreneuriat, notamment dans le numérique. « Il y a une multitude d’outils qui existent, avance Mikael Kemeny, directeur Auvergne Rhône-Alpes de Sport dans la ville, qui mène, avec l’EM Lyon, le programme Entrepreneurs dans la Ville. Les jeunes issus de ce qu’on appelle les quartiers manquent en revanche de visibilité et ne sont pas certains de pouvoir y prétendre. »

« L’accès à l’entrepreneuriat est plus compliqué pour ce public, en raison de préjugés liés à leur origine ou à l’étiquette banlieue. »

Une autocensure qui s’ajoute aussi parfois aux discriminations. « L’accès à l’entrepreneuriat est plus compliqué pour ce public, en raison de préjugés liés à leur origine ou à l’étiquette banlieue. Les banques sont plus frileuses et leur demandent d’avoir fait leurs preuves avant d’accorder un prêt », complète-t-il.

Pourtant, une étude Bpifrance/Terranova de 2016 dresse le panorama d’un écosystème entrepreneurial français diversifié et performant dans les quartiers prioritaires de la ville, mais pointe du doigt les difficultés de ces entrepreneurs à se développer et à changer d’échelle.

Lever les freins à l'entrepreneuriat

Des difficultés qui s’expliquent à la fois par un manque de ressources financières mais également d’accompagnement. « L’absence de réseau peut être un frein. Mais tout le monde en dispose, même d’un minime, pour aller taper à une porte », veut croire Abdel Belmokadem, fondateur de Nes & Cité, à Vaux-en-Velin, qui agit pour guider les habitants de banlieues vers l’emploi.

Le financement est aussi un obstacle. 46 % des entrepreneurs de quartiers ont rencontré des barrières pour se lancer, selon l’Association pour le droit à l’initiative économique (Adie) Rhône, qui propose des microcrédits accompagnés. En 2018, elle a financé 224 entrepreneurs habitant en quartiers classés « politique de la ville » (QPV, ex-ZUS…).

Eric Pierrel, président de la French Tech in the Alps, à Grenoble, plaide pour développer les initiatives entre la French Tech et les quartiers. « Il faut donner goût à l’entrepreneuriat et se mettre en relation avec des structures d’inclusion pour brasser l’écosystème et promouvoir la mixité. » Le lancement de French Tech Tremplin, un nouveau dispositif pour les quartiers lancé en février et doté de 15 M€ de budget au niveau national, doit notamment y contribuer.

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