Pourquoi les écoles de commerce d'Auvergne-Rhône-Alpes s'emparent du statut de société à mission
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Pourquoi les écoles de commerce d'Auvergne-Rhône-Alpes s'emparent du statut de société à mission

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Après les entreprises, les écoles de commerce d'Auvergne-Rhône-Alpes s’emparent à leur tour du statut de "société à mission". Une façon de donner une visibilité à leur politique RSE et d’adopter un positionnement affirmé dans un environnement international de plus en plus concurrentiel.

L'école de commerce EMLyon devrait finaliser sa transition en tant que "société à mission" en juillet 2021 — Photo : EM Lyon

Depuis la création du statut de "société à mission" par la loi Pacte en 2019, une centaine d’entreprises françaises, telles que la Maif, la Macif, Yves Rocher ou Danone ont franchi le pas. Au sein des écoles de commerce, la tendance s’accélère. Pour l’heure, GEM (ex-Grenoble Ecole de Management, 65 M€ de chiffre d’affaires, 500 salariés), TBS Education (regroupement de Toulouse Business School et Groupe ESC Toulouse) et l’école parisienne spécialisée en intelligence artificielle et data science Aivancity (créée par l'ancien dirigeant de l'EM Lyon Tawhid Chtioui) ont fait le choix d’adopter le statut de société à mission. L’EM Lyon (CA 2020 : 110 M€ / 550 salariés) devrait finaliser sa transition en juillet.

Pour devenir société à mission, les établissements ont d’abord dû définir, au sein de leurs statuts, leur "raison d’être", déclinée en grands objectifs stratégiques. GEM s’est par exemple fixé pour raison d’être d’apporter "des réponses, par la formation et la recherche, aux grands défis de la transition écologique, sociétale et économique, et contribuer à un monde plus résilient, plus juste, plus pacifique, plus responsable". Les engagements des entreprises sont ensuite monitorés en interne, par un comité de mission, qui publie un rapport annuel. À GEM, il est composé à 80 % de personnalités externes et présidé par Olivier Blum, directeur général stratégie et développement durable du groupe industriel Schneider Electric. Tous les deux ans, les établissements sont également audités par un organisme tiers indépendant.

Quel coût pour les écoles ?

Si cette transition nécessite une importante mobilisation en interne, elle ne génère, en tant que telle, pas de coût supplémentaire et n’a pas d’incidence sur les frais de scolarité demandés aux étudiants. Par contre, elle s’intègre bien souvent dans une démarche plus large de la part des établissements, qui ont tendance à prendre ce virage au moment du lancement de leur plan stratégique. À GEM, il s’est concrétisé avec le lancement du plan GEM 2025, qui prévoit un investissement de 32 millions d’euros sur cinq ans, dont 7,5 millions d’euros consacrés au financement d’actions liées à la transition en société à mission. Parmi elles, la création d’un fonds de solidarité par la fondation de l’établissement (budget de 810 000 euros collectés en 2019 et 2020), le lancement d’un certificat "pour un leadership responsable" ou encore la création de nouvelles formations sur les transitions écologique et sociale.

Isabelle Huault présidente d’EM Lyon — Photo : EM Lyon

Pour l’EM Lyon, l’adoption du statut de société à mission se fait de concert avec le lancement du plan "Confluences 2025", qui prévoit 9 millions d'euros d'investissements par an. "Nous allons refondre nos programmes à l’aune des 17 objectifs de développement durable des Nations Unies", cite par exemple Isabelle Huault, directrice générale de l’école lyonnaise. L’EM Lyon prévoit aussi la création d’un label, le sustainable development goals inside (SDGI), qui permettra d’attribuer pour chaque cours un niveau d’engagement dans une démarche de développement durable.

Se positionner face à la concurrence internationale

Avec ce statut, les écoles veulent mobiliser les équipes autour d’un projet. "Cela nous permet de pérenniser toutes les actions entreprises depuis des années sur l’engagement RSE à travers un cadre formel", explique Loïk Roche, directeur général de GEM. Julie Perrin-Halot, directrice qualité, stratégie et international, complète : "En réalité, nous n’avons pas besoin d’avoir le statut de société à mission pour être une école engagée. Mais il nous permet de formaliser et rendre cohérente une démarche et de créer de la visibilité autour de notre engagement."

Loïk Roche, directeur général de GEM (Grenoble Ecole de Management) — Photo : GE

Pour Elisabeth Laville, fondatrice d’Utopies, cabinet de conseil en développement durable pour les entreprises, l’adoption du statut de société à mission est un phénomène à relier à un contexte plus large et international. Les grandes écoles internationales sont de plus en plus nombreuses à plébisciter le statut de benefit corporations, équivalent américain des sociétés à mission. "À cette tendance vient s’ajouter celle de l’internationalisation croissante des campus, poursuit Elisabeth Laville. Devenir une société à mission, pour les écoles françaises, c’est aussi se distinguer en tant que campus. C’est du marketing international."

Le risque de green washing

Les écoles n’hésitent pas à mettre en avant l’aspect contraignant de ce nouveau statut. "L'inscrire dans nos statuts nous contraint à respecter nos engagements", défend Isabelle Huault. Elisabeth Laville se montre plus nuancée sur l’impact réel de la démarche. "On s’engage à mettre en place une gouvernance spécifique et à se fixer des objectifs, reconnaît-elle. Mais au fond, on ne sait pas ce que donnera cette transformation dans le temps." Selon elle, il faut environ dix ans pour qu’une entreprise peu engagée fasse une telle transition. Entre-temps, "il y a un risque de green washing."

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