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Vincent Belhandouz (Aniel) : « Nous voulons devenir la référence incontournable dans la carrosserie »
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Vincent Belhandouz président d'Aniel Vincent Belhandouz (Aniel) : « Nous voulons devenir la référence incontournable dans la carrosserie »

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Huit ans après avoir repris l’entreprise familiale Aniel basée à Toulon, Vincent Belhandouz a réussi à hisser l’entreprise parmi les leaders de la distribution de pièces de carrosserie en France. En lançant cette année sa marketplace, le grossiste varois ouvre une nouvelle voie, tout en menant de front de nouveaux projets, qui mènent tous à un même objectif : devenir une référence incontournable de la profession.

Vincent Belhandouz a repris l'entreprise toulonnaise Aniel en 2010, devenue numéro 1 de la distribution de pièces de carrosserie dans le Sud-Est avec 22 000 références, 5 000 clients professionnels et plus de 1 000 commandes par jour — Photo : Aniel

Le Journal des Entreprises : Depuis votre reprise de l’entreprise Aniel, comment avez-vous mené son changement de dimension ? Pour quels résultats ?

Vincent Belhandouz : À la reprise de l’entreprise en 2010, Aniel réalisait 5,5 M€ de chiffre d’affaires, avec une vingtaine de salariés. En 2018, la société a atteint 25 M€ de CA, elle emploie 70 personnes et compte 4 entrepôts, sur la zone industrielle de Toulon Est, représentant près de 16 000 m² de surface de stockage. Sur le marché français, nous ne sommes que trois acteurs de cette envergure : il y a, devant nous, Cora (filiale Autodistribution), avec 140 M€ de CA pour 70 000 références, et Alliance Automotive Group, ses 33 M€ de CA et 600 000 références.

Ce changement notable de dimension, nous le devons à un important virage stratégique. Il nous a incités à diminuer au maximum le nombre d’intermédiaires, en augmentant notre pénétration du marché des réparateurs et en anticipant ainsi la baisse de la demande des grossistes. Ces derniers sont en train de perdre pied sur le secteur de la pièce de carrosserie, marché de plus en plus complexe, avec des pièces volumineuses, qui se comptent en millions et dont la durée de vie raccourcit d’année en année.

Depuis deux ans, Aniel a investi le monde du web. Pouvez-vous nous en dire plus ?

V. B. : Notre site web génère l’intégralité de notre chiffre d’affaires. Néanmoins, avec 22 000 références, Aniel couvre seulement 25 % des achats d’une carrosserie. Or, une enquête réalisée auprès de nos clients a révélé que 83 % d’entre eux achèteraient tout sur notre site, s’ils le pouvaient… D’où l’idée de développer une marketplace qui nous permette de nouer un partenariat avec les autres fournisseurs de nos clients carrossiers et ainsi leur offrir, au même endroit, toutes les pièces neuves nécessaires, pièces d’occasion, consommables, matériels, outillages et services.

« Avec notre marketplace, nous avons acquis une expérience qui n’a pas de prix. »

En mars 2019, nous avons lancé la Marketplace By Aniel. Nous faisons figure de pionniers. La technologie que nous avons mise au point est capable de traiter d’importants volumes de données (10 millions de produits, 7 offres par produits). Dans un univers comportant un nombre immense de références, ce dimensionnement était indispensable. Bien sûr, nous allons faire entrer des offres concurrentes chez nous, mais c’est le prix à payer pour devenir la référence incontournable de la profession.

Avec la marketplace, nous avons vocation à répondre à 100 % aux besoins en pièces de nos clients. Actuellement, nous sommes focalisés sur l’univers des pièces de carrosserie. Demain, nous voulons faire entrer d’autres familles de produits : la mécanique, le freinage, le pneumatique, le vitrage ou les consommables.

Quels sont les premiers résultats de ce nouvel outil ?

V. B. : Début septembre, nous comptions 15 vendeurs enregistrés et plus de 800 ventes ont été passées auprès de tiers, grâce à la marketplace. Fin septembre, nous avions passé la barre des 3 millions d’offres proposées.

D’ici à la fin de l’année, nous espérons convaincre les constructeurs de l’intérêt de notre outil sur un marché complètement décloisonné. Mercedes et Toyota semblent déjà très emballés. Nous devons évangéliser et convaincre aussi nos clients - les réparateurs (70 % de notre clientèle), les vendeurs de pièces et les assureurs - de l’intérêt de notre modèle.

Nous avons acquis une expérience qui n’a pas de prix. Nous avons déjà investi près de 2 M€ et allons continuer à investir environ 700 000 euros par an dans cet outil. Au total, la marketplace devrait nous coûter entre 4 et 5 M€.

Quels sont vos objectifs à cinq ans ?

V. B. : D’ici à 2024-2025, nous espérons compter près de 1 000 vendeurs. Les flux vendeurs auront dépassé les flux Aniel et la plateforme contribuera au développement de nos ventes traditionnelles. Notre chiffre d’affaires devrait faire un bond considérable. J’ai bon espoir d’atteindre les 80 M€ d’ici à 5 ans : la moitié générée par la marketplace, et l’autre par nos ventes traditionnelles, qui devraient notamment être poussées par un autre projet qui nous tient à cœur.

Que pouvez-vous nous dire sur ce projet ?

V. B. : Notre ambition est de gagner des parts de marché dans le nord de la France. Pour cela, nous espérons concrétiser un projet de plateforme en région parisienne, d’une surface minimum de 12 000 m². Ce projet est ambitieux et coûteux - l’investissement global s’élève à 10 M€ - et demande du temps, car nous n’avons pas le droit à l’erreur. Si cette nouvelle plateforme voit le jour, nous sommes largement capables d’aller chercher les 40 M€ de chiffre d’affaires.

Votre développement passe aussi par le lancement de votre marque de consommables. Pour quelles attentes ?

V. B. : La marketplace est un sujet d’avenir pour Aniel. Le développement de notre propre marque distributeur l’est tout autant. Elle s’appelle ForBodyShops (FBS), propose aujourd’hui 150 références de consommables d’atelier (abrasif, mastic, colles, joints, etc.), et demain davantage.

La stratégie qui nous guide est toujours la même : réduire le nombre d’intermédiaires et, en l’occurrence, passer de trois à un seul. Ce sont en outre des produits très complémentaires, faciles à proposer en vente additionnelle et sans incidence sur les frais d’expédition. Ce nouvel axe de développement nous permet aussi de motiver notre force commerciale, qui est habituée et est même devenue adepte, comme tous les autres collaborateurs, du « changement permanent ». C’est une chance pour l’entreprise et nos projets.

Ces changements permettent-ils également à l’entreprise de sortir de l’ombre ?

V. B. : En effet, et nous sommes d’ailleurs fiers d’avoir décroché le prix de la RSE 2019, décerné par un magazine spécialisé dans l’automobile (Ze Pro de l’Auto). Cela nous permet de communiquer au-delà de notre secteur d’activité et de combler un vrai déficit de notoriété en local.

Ce prix récompense le travail accompli pour poser les bases d’une entreprise pérenne, citoyenne, respectueuse de l’environnement, soucieuse du bien-être de ses salariés. Nous avons aménagé les quais logistiques et les postes de travail, développé la polyvalence de notre équipe logistique et remplacé tous nos postes intérimaires par des salariés en CDI. Nous avons mis en place des indicateurs de performance. Nous avons remplacé notre toiture en fibrociment et financé cet investissement en installant deux centrales photovoltaïques avec l’entreprise Soleil du Sud.

Nous n’avons jamais cessé de rappeler notre attachement à notre territoire, en soutenant le Rugby Club Toulonnais ou en prenant part à la vie de l’Afuzi (Vincent Belhandouz est membre du conseil d’administration de l’Association des entreprises de Toulon Est, NDLR).

Vous avez aussi renforcé la direction de l’entreprise. Pour quelles raisons ?

V. B. : Un directeur général, Benoit Tanguy, puis un directeur supply chain et opérations, nous ont rejoints. J’ai choisi de muscler la direction pour me concentrer sur la stratégie et le développement de l’entreprise et du groupe. Aniel appartient en effet au Groupe Faubourg, que je détiens avec deux autres associés (Mohamed Aouar, le fondateur, et Patrice Nahmias, NDLR), un groupe passé de 650 000 € de CA en 2005 à 44 M€ en 2017.

Ce groupe mène de front trois activités, imbriquées les unes dans les autres : l’exploitation de carrosseries en propre (4 sites industriels, 10 carrosseries urbaines, 4 points relais), la distribution de pièces de rechange (Aniel) et la gestion de flottes de véhicules pour le compte de grandes entreprises (Traxall gère 60 000 véhicules pour le compte de 60 clients et génère 10 M€ de CA en 2018).

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