Entre 2014 et 2016, l’entreprise Locster a racheté pas moins de six sociétés à la barre du tribunal de commerce. Le secteur où elle exerce - la gestion de flottes de véhicules via des solutions télématiques - est à l’époque confronté à une vague de faillites chez les acteurs historiques du marché, en majorité des TPE et PME familiales. Les sociétés reprises sont situées dans cinq villes différentes : Paris, Lyon, Saint-Nazaire, Lisieux, et Montauban où Locster a installé son siège social. En quelques mois, l’entreprise se crée un maillage national. « Nous avions déjà une volonté d’accélérer notre développement via la croissance externe : le rachat à la barre du tribunal de commerce a été une opportunité mais aussi un risque, se rappelle le PDG Stéphane Puis. Quand on reprend une société en redressement, on est quasiment aveugle sur sa situation. »
Phase de retournement
Pour Locster, relancer ces entreprises en difficulté s’avère un défi aussi économique qu’humain. Le passage devant le tribunal de commerce a été une première étape de la restructuration des activités et des effectifs, parfois insuffisante. « Au bout de quelques mois, nous avons dû nous séparer de certains salariés, toujours en négociant des solutions acceptables, assure Stéphane Puis. Ces décisions ne sont pas simples : il faut savoir les prendre pour ne pas reproduire la cause des échecs passés. » À chaque rachat, le PDG commence par de longs entretiens avec les équipes pour se faire une idée claire de la situation de l’entreprise et établir des indicateurs fiables sur la comptabilité, les comptes clients, les actifs technologiques. Commence ensuite la phase de retournement, la plus passionnante selon Stéphane Puis : « Toutes nos sociétés disposant de systèmes d’information différents, nous avons décidé de repartir d’une page blanche pour construire une offre unifiée et performante. Cela a été l’occasion d’une mobilisation formidable des équipes qui en ont gardé un sentiment d’appartenance très fort. » La PME fait plusieurs choix différenciant, dont celui de conserver en France l’ensemble des équipes dédiées à la relation client.
Prise de risque
Moins de trois ans après les premiers rachats, Locster est devenu un des leaders français de son marché. Sa technologie, qui s’est étendue à la gestion des interventions des techniciens, intéresse alors plusieurs investisseurs dont le groupe italien Viasat Connect, qui devient actionnaire majoritaire fin 2017. Une nouvelle page s’écrit pour la PME, qui bénéficie d’importants moyens financiers pour développer ses outils informatiques, et porte ses effectifs à 35 salariés pour un chiffre d’affaires de 5 millions d’euros. En 2020, Locster est rebaptisé Viasat Connect France : l’entreprise diffuse désormais ses solutions télématiques professionnelles à l’ensemble des filiales du groupe en Europe. « Nous avons pris un risque et il s’est avéré payant, se félicite Stéphane Puis. Mais il faut garder en tête que le coût d’une reprise au tribunal de commerce ne porte pas sur l’acquisition, mais sur la phase de reconstruction. »
