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Plombées par les nouveaux tarifs, les cliniques privées du Grand Est anticipent des "difficultés financières"
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Plombées par les nouveaux tarifs, les cliniques privées du Grand Est anticipent des "difficultés financières"

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En 2024, les tarifs des cliniques privées vont augmenter de 0,3 % contre 4,3 % pour les hôpitaux publics. Dans le Grand Est, la Fédération de l’hospitalisation privée s’attend à voir les comptes de 60 % des établissements de santé privés plonger dans le rouge et lance une mobilisation inédite.

Les établissements de santé privés tirent entre 92 et 94 % de leurs revenus grâce aux tarifs hospitaliers fixés par le gouvernement — Photo : Sasin Tipchai - Pixabay

Indigné, le président de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) dans le Grand Est, Patrick Wisniewski, décrit une "mobilisation inédite". À partir du 3 juin, les 51 cliniques et hôpitaux privés du Grand Est, soit 8 000 salariés, 1 700 médecins, pour un chiffre d’affaires global estimé à près de 800 millions d’euros, vont "cesser l’ensemble des activités de soin", à l’exception des "activités vitales", comme la dialyse, la chimiothérapie et les soins liés à la fin de vie. "Les urgences et la maternité seront redirigées vers le public", précise Patrick Wisniewski.

Des tarifs qui font les revenus des cliniques

Ce mouvement de grève, reconductible, a été lancé en réaction à la diffusion par le gouvernement des nouveaux tarifs hospitaliers 2024. Pour les activités de médecine, de chirurgie et d’obstétrique, l’activité du public va bénéficier d’une hausse de 4,3 %, contre 0,3 % dans le privé. Les établissements privés opérant dans les soins médicaux et de réadaptation verront quant à eux leurs tarifs progresser de 1,1 % contre 3,5 % dans le public.

"60 % des établissements pourraient boucler l’année 2024 sur un exercice déficitaire", tempête Patrick Wisniewski, président de la FHP du Grand Est.

"Inacceptable" pour le président de la Fédération de l’hospitalisation privée dans le Grand Est, qui rappelle que les établissements privés tirent entre "92 et 94 % de leurs revenus" grâce à ces tarifs. "Cela ne nous permet même pas de faire face à l’inflation. Nous avons enregistré des hausses de 6 voire 8 % sur les médicaments, de 6 % sur la restauration et tout le monde a compris que l’énergie avait explosé", décrit Patrick Wisniewski.

Christelle Rauchs-Febvrel, directrice de la clinique Saint André, Patrick Wisniewski, président de la Fédération de l’hospitalisation privée dans le Grand Es, t et Christophe Baillet, président du groupe Louis Pasteur Santé, préparent la grève du 3 juin — Photo : Jean-François Michel

Des marges faibles

D’après les éléments rassemblés par la FHP, 40 % des établissements privés du Grand Est rencontrent déjà des "difficultés financières", et la Fédération anticipe un accroissement brutal des déficits. "60 % des établissements pourraient boucler l’année 2024 sur un exercice déficitaire, tempête Patrick Wisniewski. Nous ne faisons pas des marges comparables aux groupes de luxe. Nous ne pouvons pas faire du report de bénéfice."

Concrètement, le Dr Christophe Baillet, président du groupe Louis Pasteur Santé, décrit des établissements dont les marges oscillent entre 2 et 3 %, marges qui sont normalement fléchées vers "de l’investissement dans des appareils de soin et d’aide au diagnostic de plus en plus coûteux et complexes, ainsi que dans le financement de l’innovation".

"Avec cette décision, le gouvernement va rouvrir de vieilles divisions", Christophe Baillet, président du groupe Louis Pasteur Santé.

Le président du groupe Louis Pasteur Santé tient à rappeler que le secteur privé réalise "38 % de l’activité médicale en France pour 18 % de la dépense de santé totale". Et au-delà du fond, c’est la forme que regrette le médecin : "Il ne sert à rien d’opposer les cliniques et les hôpitaux publics. Nous travaillons en bonne intelligence, et avec cette décision, le gouvernement va rouvrir de vieilles divisions".

Vers de nouvelles négociations avec le gouvernement ?

Au-delà des fuites potentielles de médecins vers le secteur public, le président de la Fédération de l’hospitalisation privée dans le Grand Est regrette que le travail mené depuis deux ans sur la refonte complète de la grille des salaires des personnels des hôpitaux privés, dite "Avenant 33", ne puisse pas être mis en place, faute de financements suffisants. "Avec ce mouvement, nous souhaitons que le gouvernement révise enfin sa position. Nous avons été reçus au Ministère, mais pour un échange de points de vue qui n’a rien donné", regrette Patrick Wisniewski.

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