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Parfums Molinard : « Noël sera catastrophique »
Interview Grasse # Chimie

Célia Lerouge-Bénard directrice générale déléguée de Molinard Parfums Molinard : « Noël sera catastrophique »

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Les entreprises touristiques de « savoir-faire », à l’image des parfumeurs grassois, étaient jusqu’alors exclues du Plan Tourisme. Le décret les prenant en compte vient enfin de paraître. Pour autant, l’inquiétude demeure extrêmement forte pour Célia Lerouge-Bénard, directrice générale déléguée de Molinard, alors que les fêtes de fin d’année approchent et que la chute du chiffre d’affaires annuel devrait approcher les -70 %.

— Photo : O.oreggia

Le décret qui prend en compte les entreprises de « tourisme de savoir-faire », dont Molinard fait partie, pour le plan d'aide au tourisme du gouvernement, est enfin paru. Est-ce un soulagement ?

Célia Lerouge-Bénard : C’est vrai qu’après le long combat que nous avons mené ensemble, avec les autres entreprises concernées (Fragonard, Confiserie Florian, NDLR), nous sommes contents d’être reconnus comme des acteurs du tourisme. Mais maintenant, comment allons-nous jongler avec ça ? Nous ne comprenions pas à quel titre nous ne figurions pas sur la liste des entreprises concernées par le plan Tourisme alors que nous bénéficions du label Qualité Tourisme. Cela représente un stress énorme d’avoir cette épée de Damoclès au-dessus de la tête, sachant que, dans le même temps, il faut continuer de prendre des décisions.

Êtes-vous inquiète pour les semaines à venir ?

Célia Lerouge-Bénard : L’approche des fêtes de fin d’année, surtout le mois de novembre, est une période très importante pour le parfum et pour Molinard. Et aujourd’hui, les achats de Noël sont gelés. Noël sera catastrophique. Toutes nos boutiques sont fermées. Nous travaillons un peu grâce à notre site internet mais pas du tout à la même hauteur bien sûr. Nous avons très peur de ce qui peut arriver. On nous dit de consommer local, mais comment ? En aidant les plus gros qui sont des machines de guerre ? Pandémie ou pas, nous nous battons déjà face à de grands groupes. Nous avons fêté nos 170 ans d’existence en 2019, nous sommes l'une des dernières entreprises familiales françaises.

Comment garder le cap face à ce tableau sombre ?

Célia Lerouge-Bénard : Il faut rester positifs pour les équipes. Trois-quarts de nos effectifs, qui comptent une quarantaine de personnes, sont au chômage partiel. Nous vivons au jour le jour. Nous essayons d’avancer, en réalisant par exemple de nouvelles créations pour 2021, qui sera une année importante pour nous puisque nous fêterons les 100 ans d’Habanita (parfum mythique de la maison Molinard, NDLR). Nous avons ouvert de nouveaux marchés à l’international, en Corée par exemple. En parallèle, nous achetons moins, nous faisons attention. Nous avons évidemment pris un prêt garanti par l'Etat, mais c’est reculer pour mieux sauter. Cela sert juste à maintenir la tête hors de l’eau. Notre chiffre d’affaires aura chuté de 60 ou 70 % cette année. Je suis d’une nature positive, je suis une fonceuse mais je sais qu’il nous faudra des années avant de nous remettre sur nos deux jambes.

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